Parmi les nombreuses symboliques que referment la fête de Souccot, la mitsva des 4 espèces (loulav, étrog, saule, myrte) compte parmi les plus emblématiques. Différentes significations  allégoriques accompagnent ce rituel, la plus connue étant peut-être celle qui associe à chacune de ces espèces végétales un type de « juif » : l’étrog qui dispose d’une bonne odeur et d’un goût agréable désigne le Juif attaché aux mitsvot et à l’étude de la Torah, le loulav qui dispose seulement d’un bon gout grâce à ses fruits (les dattes) désigne le Juif qui étudie la Torah sans faire les mitsvot, la myrte qui a une bonne odeur mais pas de goût désigne le Juif qui pratique les mitsvot sans étudier la Torah, et, enfin, le saule, sans goût ni odeur, désigne le juif qui n’étudie pas la Torah et n’accomplit pas les mitsvot.

Face à cette diversité des membres du peuple juif, notre tradition nous demande de prendre symboliquement ces quatre espèces, des les rassembler, les unir et les secouer ensemble. Nos maîtres y voient un symbole de l’unité nécessaire du peuple juif, si précieuse aux yeux de l’Eternel.

Le judaïsme ne connait ainsi ni ostracisme, ni mise à l’écart, envers ceux qui ne pratiquent pas la Torah ou n’accomplissent pas les mistvot. Au contraire, notre tradition nous demande d’adopter une démarche d’inclusion, confiante dans le fait que, au contact des Sages et des érudits, le peuple entier évoluera progressivement vers les chemins vertueux.

Toutefois, il faut noter que lorsque l’on saisit les 4 espèces, l’étrog est saisi généralement par une main alors que les trois autres espèces sont attachées ensemble et saisies dans une autre main. On doit ensuite rapprocher les deux mains pour rassembler les 4 espèces et les secouer ensemble.

Pour quelle raison l’étrog est-il saisi dans une main spécifique ? Plusieurs réponses peuvent être apportées, et, une d’entre elles peut être trouvée dans un passage, de prime abord énigmatique, du Traité Erouvin du Talmud.

Voici ce que l’on peut lire à la page 53 b de ce traité : « Lorsque Rabbi Abbahu parlait de manière énigmatique, il disait « Faites que les charbons aient la couleur d'un étrog » ».

Un commentateur fameux du Talmud, le Ben Yehoyada, a apporté l’explication suivante à ce passage mystérieux. Il rappelle tout d’abord que l’étrog est le symbôle de l’embelissement, conformément à une des appellations de ce fruit : « Hadar ».  Par ailleurs, les charbons désignent métaphoriquement ce qui est « noir », et plus précisément la partie noire de yeux, siège de la vision. 

Aussi, cet enseignement de Rabbi Abahou peut se lire de manière métaphorique de la manière suivante : « Embelissez ce que vous voyez », dans chaque situation, efforcez-vous de faire émerger la dimension positive, et ne vous focalisez pas uniquement sur les aspects négatifs.

L’étrog peut ainsi devenir une sorte de « révélateur » de ce que le monde, la nature, mais aussi, les êtres humains, ont de bon et de meilleur. Voilà pourquoi, nous le saisissons avec une main spécifique et nous l’approchons des autres espèces qui sont déficientes afin de faire émerger ce qu’elles ont de positifs. L’étrog incarne le prisme à travers lequel nous devons aborder la vie : la recherche du bon en chaque chose.

Et c’est là également, probablement, le rôle du Tsadik représenté par cet étrog : ne pas porter un regard sévère sur autrui, mais essayer d’embellir chaque être humaine, aider son prochain à révéler ce qu’il a de meilleur, lui accorder de l’importance, du respect.

C’est ainsi, nous dit-on, que Aharon parvenait à faire progresser le peuple. Il se rendait au domicile des familles, parlait avec elles, leur témoignaient de la sollicitude, de la bienveillance. En retour, celles-ci se disaient : « Mais comment est-ce possible qu’il vienne chez moi, me parler avec tant d’affection ? S’il savait ce que je fais, il serait déçu ! ». Et, ainsi, il amenait le peuple à s’améliorer et à progresser spirituellement.

Cette année, notre peuple continue de passer les fêtes importantes de notre calendrier dans un contexte tout à fait inédit et parfois très déstabilisant. 

Pour autant, durant ces fêtes de Souccot, en regardant l’étrog, nous pourrons essayer de rechercher dans quelle mesure cette crise va nous « ouvrir les yeux » en nous permettant de comprendre ce qui nous faisait défaut auparavant, et de penser à de nouvelles décisions susceptibles de réorienter notre vie vers ce qui est essentiel à nos yeux.

Enfin, nous pourrons mesurer combien le regard bienveillant que l’on porte sur autrui est fondamental car, comme cette crise le démontre, nous sommes tous co-responsables et garants, avec l’aide d’Hashem, du bien-être de notre prochain.

Puisse l’Eternel nous permettre de passer de très bonnes fêtes de Souccot, et connaître très prochainement la fin de cette épidémie, et la libération finale !