Pourquoi trois repas ?

Il est écrit dans la Torah au sujet de la Manne le jour du Chabbath (Chémot 16, 25) : « Moché dit : “Consommez-la aujourd’hui, car aujourd’hui est un jour saint pour D.ieu ; aujourd’hui, vous n’en trouverez point dans les champs”. » De la triple redondance du terme « aujourd’hui » (alors qu’on sait que la Torah est généralement avare en mots…), nos Sages déduisent que le Chabbath doit être rythmé par trois repas, dont les deux premiers seront précédés d’un Kiddouch. La Sé’ouda Chlichit (le troisième repas du Chabbath), à tort considérée comme facultatif, prend part avant le crépuscule et est, d’après les écrits de mystique juive, d’une importance extrême.

Précisons également que depuis l’époque du roi David, un quatrième repas est venu « se greffer » aux trois autres. En effet, le roi David sut par esprit prophétique qu’il était appelé à quitter ce monde un jour de Chabbath. Or, comme l’ange de la mort ne peut atteindre l’homme lorsque celui-ci s’adonne à l’étude de la Torah, le roi David étudiait la Torah chaque Chabbath jusqu’à sa fin. Et lorsqu’à la fin de Chabbath, il constatait qu’il était encore en vie, il organisait un repas afin de remercier D.ieu de l’avoir épargné de la mort. Ce repas fut depuis lors institué en tant que repas visant à « raccompagner » la reine Chabbath, de la même manière que l’on raccompagnerait un invité d’honneur venu nous rendre visite…

Un temps pour l’essentiel

Pour qui n’a jamais eu la chance d’expérimenter un repas du Chabbath authentique, aucune description, aussi lyrique et réaliste soit-elle, ne pourra le lui dépeindre ! Le roi David nous enjoint bien dans ses Téhilim (34,9) : « Goûtez, et vous verrez comme Hachem est bon… » !

Majestueusement entouré des siens et affranchi du poids de ses soucis profanes, c’est autour de la table du Chabbath que le Juif devient un être véritablement libre. Tout, autour de lui a pris un aspect de fête : depuis ses habits qu’il ne porte qu’en l’honneur du Chabbath, jusqu’aux mets délicats concoctés spécialement pour ce jour saint, en passant par la fine vaisselle et les bougies venues rehausser la gloire de ce moment unique… C’est autour du repas du Chabbath que la famille juive soude ses liens : c’est le moment d’échanger, de rire, de partager des enseignements sur la Paracha, de chanter ensemble les chants du Chabbath, mais également de se délecter des bons plats concoctés par la maman… Bref, de prendre le temps de faire tout ce que nous n’avons pas le temps de faire le reste de la semaine…

Les repas du Chabbath sont en outre la concrétisation ultime du principe fondamental de la Torah selon lequel le but du juif dans ce monde est d’utiliser la matérialité pour l’élever vers un but spirituel. Ainsi, ne vous étonnez pas, si vous êtes invités pour un repas de Chabbat, de trouver des tables richement garnies et une abondance de mets et de boissons ! Rien n’est trop beau pour embellir et rehausser l’éclat des repas du Chabbath.

Petit précis du déroulement d’un repas chabbatique

- Le vendredi soir et le samedi midi, on procède d’abord au Kiddouch. Le vendredi soir, le Kiddouch lui-même est précédé des chants ChalomAlékhèm et EchetHayil (l’éloge à la femme juive).

- Le père de famille bénit ensuite chacun de ses enfants l’un après l’autre, du plus grand au plus petit, en apposant ses deux mains sur leur tête (se reporter au Siddour pour le texte en hébreu).

- On procède ensuite à Nétilat Yadayim (l’ablution rituelle des mains) puis au Motsi, pour lequel on emploiera deux pains entiers, préparés de préférence spécialement en l’honneur du Chabbath (ce sont les fameuses ‘Hallot tressées). Attention, il est interdit de parler entre les deux, si ce n’est pour répondre Amen aux bénédictions des autres !

- Le Motsi se déroule comme suit : une fois tous les membres de la famille attablés en silence après Nétilat Yadayim, le père de famille découvre les deux ‘Hallot, les saisit en mains une sur l’autre, puis prononce la bénédiction sur le pain (« Baroukh AtaHamotsi Lé’hèm Mine Haarets ») en ayant à l’esprit de rendre quitte de la bénédiction les autres convives. Eux aussi devront avoir à l’esprit de se rendre quittes et répondre Amen à la fin de la Brakha. Le père de famille coupe ensuite pour lui un morceau de pain, le trempe dans le sel (ou, à défaut, dans un plat salé) et en mange. Ensuite, il coupe une grande tranche pour chaque convive, la trempe dans le sel et la lui distribue. Il veillera à ne pas donner les tranches de pain de main à main (car cela ressemble à la façon dont on donne le pain aux endeuillés), mais les déposera sur la table ou dans l’assiette de chacun. On ne s’interrompra par aucune parole avant d’avoir consommé un morceau de pain.

- Il est bon de consommer des mets à base de poisson et de viande, mais pas en même temps (un tel mélange étant interdit par nos Sages pour des raisons de santé). On se rincera les mains et la bouche à l’eau entre le plat de poisson et celui de viande. On changera de couverts et d’assiettes.

- Il est permis, voire même recommandé, de boire du vin (modérément !) en l’honneur du Chabbath.

- A la fin du repas, on récite le Birkat Hamazone (la bénédiction qui vient clôturer un repas de pain) : après avoir terminé de manger, on procède aux Mayim A’haronim (les ablutions de fin de repas). Si trois hommes de plus de 13 ans ont participé au repas, ils prononceront ensemble le Zimoun. Puis, chacun récitera le Birkat Hamazone, en n’omettant pas le passage « Rétsé Véha’halitsénou », propre au Chabbath.