Dans l’article précédent, nous avons abordé les trois formes de vol : le vol en secret (Guénéva), le vol en public (Guézél) et dérober à quelqu’un ce qui lui appartient légitimement (Ochek).Dans les semaines à venir, nous nous concentrerons sur diverses manières de s’emparer d’objets en analysant si cela constitue du vol selon la Torah. Nous verrons que l’interdiction de voler s’applique à une gamme bien plus large d’actions que ce que nous avions imaginé au départ.

S’emparer d’objets de valeur infime

Il est interdit de voler un objet, quelle que soit sa valeur. Même si l’objet vaut moins d’une Prouta,[2] on ne pourra pas le prendre sans permission. Par exemple, un individu séjourne dans un hôtel et au moment de partir, il emporte un petit sachet de ketchup de la salle à manger. Il se peut que le propriétaire de l’hôtel s’oppose au fait que les clients emportent quoi que ce soit avec eux ; en conséquence, le client devra s’abstenir d’une telle pratique à moins d’avoir la certitude absolue que le propriétaire autorise les clients à emporter des objets avec eux au moment de quitter les lieux.

La seule exception à cette règle est lorsqu’on est totalement certain que personne ne s’opposera à ce qu’on emporte un tel objet. Par exemple, on pourra prendre un éclat de bois d’une barrière pour l’utiliser - mais si le propriétaire de la barrière s’y oppose, alors s’emparer de cet éclat de bois constituerait un vol.

Prendre un objet pour plaisanter

On pourrait s’imaginer que s’approprier un objet appartenant à un ami pour faire une blague n’est pas considéré comme du vol puisque le plaisantin compte le lui restituer. C’est néanmoins considéré comme une forme de vol interdit par la Torah. Emprunter quelque chose même temporairement n’en reste pas moins un acte de vol. Il est important d’éduquer nos enfants en leur expliquant qu’emprunter des objets de cette manière est une activité inacceptable.

Il est également interdit de voler à un enfant. On ne pourra donc prendre aucun objet ou nourriture à un enfant.[3]

Dans certaines situations, on pourrait estimer que le fait de dérober temporairement l’objet d’autrui est bénéfique. Par exemple, on pourrait vouloir subtiliser l’objet d’un ami pour l’aider à corriger un trait de caractère négatif. Or, même cette manière d’agir est considérée comme du vol. De même, on ne pourra pas prendre un objet appartenant à un ami pour le remplacer par un objet de meilleure qualité, mais il faudra au préalable obtenir l’autorisation de notre ami à cet effet.[4]

En s’appuyant sur ces lois, un enseignant aura-t-il le droit de confisquer des objets appartenant à ses élèves à titre de mesure disciplinaire ? Les Posskim (décisionnaires)[5] sont d’avis que c’est permis ; un enseignant a en effet le droit de discipliner ses élèves de la manière qu’il juge nécessaire.[6] Il est préférable que l’enseignant restitue l’objet à une date ultérieure, mais s’il a le sentiment néanmoins qu’il vaut mieux détruire l’objet pour des motifs disciplinaires, il sera autorisé à procéder ainsi.

Il est interdit de voler dans le but d’éviter une maladie ou une douleur qui ne met en aucune manière notre vie en danger. Par exemple, si un intimidateur menace quelqu’un de s’approprier l’objet de son prochain ou d’affronter les conséquences d’être frappé, il n’aura pas le droit de prendre l’objet. Ce principe est valable même lorsqu’on a l’intention de rembourser l’intégralité de la valeur de l’objet.

On aura cependant le droit de voler pour sauver sa vie, mais uniquement à condition de rembourser le propriétaire par la suite. Par exemple, on aura le droit de s’emparer des médicaments de quelqu’un d’autre pour sauver potentiellement une vie, mais il faudra être prêt à rembourser la valeur totale des médicaments.



[1] Une bonne partie des informations de cet article sont extraites de l’ouvrage Halachos of Other People's Money du Rav Yisroel Pinchos Bodner.

[2] Une Prouta est définie comme la plus petite monnaie utilisée pour acheter des objets.

[3] Dans un futur article, nous aborderons les lois d’un parent confisquant les objets ou l’argent de leur enfant.

[4] Voir Halachos of Other People's Money, p.23, qui expose un moyen autorisé d’y procéder.

[5] Le terme Posskim désigne les rabbins spécialistes de rendre des décisions relatives aux lois de la Torah.

[6] Voir Halachos of Other People’s Money, p.23 pour plus de détails.