Vous connaissez ces soirées réservées au public féminin, soirées de renforcement et d’inspiration. Généralement, on y fait intervenir des personnes qui délivrent des messages poignants pleins de forces et d’espoir.

Il y a quelque temps, lors d’une de ces soirées, j’ai entendu un témoignage qui m’a profondément marqué. Je me devais de vous le raconter.

Une dame d’une cinquantaine d’années, dont on croyait aisément qu’elle avait été pratiquante toute sa vie, à se fier à son allure vestimentaire, est montée sur scène, et, avec une voix claire et captivante, a commencé à nous raconter.

« J’ai fait Téchouva il y a 2 ans et demi. Avant, je ne faisais rien de rien. Je vivais une vie de parfaite laïque et ça me convenait parfaitement. J’ai étudié la Kabale pendant 13 ans, j’étais en quête de je ne sais quoi, je disais aux gens que je recherchais la vérité, mais, honnêtement, je tournais en rond. Imaginez 13 ans de ma vie envolés en fumée.

Et puis, un jour, sans que je m’y attende, la révélation. C’est arrivé sans prévenir, mais j’étais convaincue que je touchais enfin la vérité du bout des doigts. Je n’avais jamais ressenti ça avant. Ma « transformation » s’est faite très rapidement, en l’espace de moins de temps qu’il faut pour le dire, ma maison entière subissait un processus méticuleux de cachérisation.

J’étais très investie dans ma Téchouva et je ne voulais pas faire les choses à moitié. Aussi, je me documentais, me renseignais, et chaque soir je rentrais à la maison avec une nouveauté que j’imposais à mon adorable mari, qui, je dois le dire, a été d’une coopération extraordinaire.

Ce soir-là, je faisais le bilan. Je me couvrais la tête, j’étais maintenant Tsanou’a (pudique), je ne me permettais plus aucun contact physique avec la gente masculine, je mangeais Cachère, je faisais Chabbath, je respectais même les lois de pureté familiale, mais je voulais plus, je voulais une Mitsva rien que pour moi, une Mitsva spéciale qui ferait foi de ma volonté d’avancer, qui m’engagerait auprès du Maître du monde. Je n’eus pas besoin de réfléchir longtemps, la Mitsva s’offrait à moi, je décidai de pétrir le pain de Chabbath chaque semaine, en accomplissant ce commandement dans ses moindres détails. Et c’est ce que je fis chaque vendredi avec la même émotion profonde et sincère. Je m’approchais de ma bassine où je tamisais ma farine en pensant à mon tamisage personnel, où je séparais le bon du mauvais, où je devais m’éloigner de ce qui pourrait nuire à mon développement. Puis, je pétrissais les ingrédients liquides et solides ensemble pour en faire une seule et même pâte, je sentais sous mes doigts la « transformation » s’opérer, cette même transformation qui avait fait de moi celle que je suis aujourd’hui. Combien de larmes ai-je versées en pétrissant, combien de prières ai-je sourdement prononcées, combien de reconnaissance ai-je ressentie à ce moment précis.

Cette Mitsva était la mienne, et je me mettais un point d’honneur à ne jamais la dénigrer ou la bâcler. Je respectais et aimais profondément ce commandement, c’était sans savoir que ce commandement me protégeait et m’aimait également de façon inconditionnelle en retour.

En effet, quelques mois plus tard, je me rendais chez mon médecin pour un examen de routine, lequel a vite pris une tournure tout ce qu’il y a de non-routinier. On m’annonçait que je devais subir une opération en urgence afin de retirer l’utérus. Je me suis évidemment pliée aux recommandations, et, le lendemain, je me retrouvais en direction vers le bloc opératoire. Mon réveil, au sens propre comme figuré, a été perturbé. J’étais dans le flou, je ne savais pas exactement ce qui m’arrivait. Puis, le docteur s’est approché de mon lit et m’a dit avec une voix douce et rassurante : « Tout s’est bien passé, nous avons même, contre toute attente, réussi à sauver les ovaires, qui étaient en parfaite santé, elles vous protégeront de bien d’autres maux. »

Ces mots résonnaient à mes oreilles, excusez l’image un peu crue, mais le docteur venait de me dire que mes ovaires me protégeaient. Cette phrase qui tournait en boucle dans ma tête (mon corps n’avait pas le droit de bouger, alors ma tête compensait) me fit comme un électrochoc. En hébreu, les mots « Hafrachat ‘Halla », soit le prélèvement de la ‘Halla, ont les mêmes lettres que « Tafra Chehala », la couture de l’ovaire. Si vous m’aviez vu, j’ai fondu en larmes, et je n’ai pas pu m’arrêter de pleurer pendant de longues heures. Personne ne comprenait, mais moi oui, je comprenais tout justement. Je comprenais Sa grandeur et Sa bienfaisance. Pendant de si longues années je L’avais ignoré et occulté de ma vie, et maintenant que je commençais à Lui redonner Sa place, Il me faisait don de la vie pour la deuxième fois. Combien Tu es grand, combien Tu es bon !

Tout comme j’observais la Mitsva du prélèvement de la ‘Halla avec amour et bienveillance, cette même Mitsva me gardait avec amour et bienveillance.

Le vendredi qui a suivi mon opération, je n’ai pas pu assurer la préparation des plats, je n’ai pas pu faire le ménage. Mais vous l’aurez compris, j’ai réuni mes petites forces pour faire LA seule et unique chose qui me tenait à cœur : pétrir et exprimer mon infinie gratitude envers le Créateur de l’univers. Lorsque je tamisais, je remerciais d’avoir été séparée de la partie de mon corps qui n’était pas bonne, et d’avoir pu garder la partie saine, et lorsque je pétrissais, je remerciais pour cette seconde renaissance qui s’offrait à moi.

Moda Ani Léfanékha Mélèkh ‘Haï Vékayam. Je Te suis reconnaissante, ô Roi vivant ! »