La mère de Rivki me fait le portrait de sa fille, 8 ans : « elle est turbulente en classe. Elle a du mal à se concentrer en cours ». La mère de Jonathan me présente son fils, 5 ans : « il se bagarre beaucoup à l’école. Il a du mal à s’intégrer dans la classe. L’apprentissage de la lecture lui est très difficile ». Ces deux enfants, en échec scolaire, sont venus me voir, chacun séparément, pour un bilan psychologique. Dans ces deux cas, les conclusions de mes tests font ressurgir un fait que je livre à votre appréciation : « absence du père »…

Pour vous, public profane en psychologie, à quoi une telle conclusion fait-elle écho ?

Le papa de Rivki est bien vivant ! Sa femme le décrit comme suit : « Il est incapable, c’est moi qui fais tout, il ne veut pas s’occuper des enfants ! » Le papa de Jonathan est lui aussi bien vivant, et sa femme dit de lui : « Les enfants, c’est moi. Mon mari dit que c’est moi qui dois m’en occuper. Oui, c’est le rôle de la mère de s’en occuper, les maris n’ont pas le temps ou la patience de le faire, n’est-ce pas ? »

Alors un papa, pour faire quoi ?

La fête de Tou Bichvat met en évidence la préséance des fruits d’Erets Israël, qui doivent être consommés avant les autres fruits. Une simple consommation de fruits nous renvoie à une hiérarchie. Cette hiérarchie souligne que le monde n’est pas livré au chaos : il est organisé, il existe un Projet dans le monde qui obéit à une certaine distribution.

Déjà dans Béréchit, Hachem ordonne la Création selon les jours. Par exemple, la création des astres s’est conformée à un ordre préétabli par le Maître du Monde. La lune, par l’acceptation de sa diminution, a respecté l’ordre établi par Hachem. Le soleil est l’astre rayonnant et la lune, l’astre sans lumière, le réceptacle des rayons du soleil et le redistributeur sur les étoiles. Hachem a imprimé aux astres, à la nature… à chaque chose, un « Séder », un ordre, une structure, une hiérarchie.

Chaque chose dans l'univers a une place. Quelle est la nôtre ? Et pour ce qui fait l’objet de notre actuelle discussion, quelle est la place du père dans la famille ?

Chez l’être humain, la cellule familiale est différente de la famille animale. Les bébés animaux grandissent selon leurs instincts, et une fois devenus grands, ils s’en vont. Il n’y a pas à proprement parler d’éducation ou de « problème de place ». Tout est orchestré « selon la nature », selon un ordre rituel incontesté et immuable.

Il n’en va pas de même pour la cellule familiale humaine. Elle est vouée aux interactions à la fois familiales, sociales, ethniques, culturelles, religieuses... Il n’y a que très peu de « lois pré-organisées ». Certains vont jusqu’à dire qu’il n’y a pas du tout d’instincts, voire même d’instinct maternel, et que tout est éducation. L’enfant est avant tout le fruit éducatif de la mère et du père. La mère est la pièce maîtresse de l’éducation. C’est elle qui, en général, par sa présence, sa nature, sa volonté… cherche à s’occuper de ses enfants. Ceci est généralement acquis. La preuve demeure qu’au niveau des divorces, dans tous les tribunaux du monde entier, tout le monde est enclin à vouloir confier la garde des enfants à la mère plus qu’au père.

Alors un père à quoi ça sert ? Il doit y avoir une réponse à cette question, puisque mes tests, « bêtes et méchants » peuvent en constater l’absence, même quand elle n’est pas physique. Mais suspense… ! 

Remontons à Béréchit, ‘Hava (Eve) avait deux enfants, Caïn et Abel. Il est dit : « ‘Hava conçut et enfanta Caïn en disant : « J’ai fait naître un homme, conjointement avec l’Éternel ! (Kaniti ich et Hachem) » (Béréchit 4;1). Cette déclaration de ‘Hava cherche à éliminer de la trilogie génétique, son mari, pour ne garder en partenaires qu’Hachem et elle : « Hachem m’a donné un enfant pour moi ! »

Observons combien de jeunes femmes sont seules, non mariées, ou seules avec un enfant. Le mono-parentisme chez les femmes est courant. Il est l’héritier du mouvement de libération de la femme. Celui-ci a eu pour conséquence, de désirer « seule » des enfants, pour elle « seule », sans avoir le partage avec son conjoint de ce fruit nouveau.

Le féminisme a bouleversé l’ordre familial. Ce féminisme est né lui-même du bouleversement de l’ordre tout court, du Plan, du Projet divin : celui d’accepter Hachem comme Créateur et Maître du monde. Hachem a nommé l’homme responsable du monde, responsable de ses actes, de ceux de sa femme et de ses enfants. En effet, c’est ‘Hava qui a fauté, mais c’est à Adam qu’Hachem a demandé des comptes, et celui-ci s’est empressé d’accuser sa femme.

L’homme, joyau de la Création, permet la Glorification d’Hachem dans le monde. Mais, les hommes se sont dégagés de ce joug et des obligations qui l’accompagnaient. À l’instar des hommes libérés du Service Divin, les femmes à leur tour, se sont dégagées de l’ordre établi par Hachem d’être une « aide pour l’homme ».

Le désir de conquête, d’indépendance des femmes, l’envie du pouvoir de l’homme chez la femme, et la désertion de la responsabilité des hommes, ont conduit le monde à des aberrations, à des situations familiales quelquefois catastrophiques, comme celles citées dans les exemples précédents. Mais c’est surtout à l’adolescence que surgit le plus grand nombre de difficultés, et où se pose de façon cruciale la place de chaque parent. La crise de l’adolescence questionne principalement l’autorité, le pouvoir, la direction dans la famille et la place du père.

Hachem a donné un pouvoir formidable à la femme, celui de rendre père son mari. C’est elle qui « offre » ses enfants à son mari. Comment ? En lui accordant une place - une place physique certes -, mais surtout une place psychique, une place immatérielle, une place au-dedans de son être, une place au-dedans de sa tête. Une place d’honneur et de respect, une place de confiance, une place d’amour. Pour être efficace et efficiente, c’est elle qui doit tisser cette place. Car il peut exister une famille avec les deux parents qui fonctionnent comme s’il n’y en avait qu’un ! Quelquefois démission du père, souvent non partage de la mère !

Pour comprendre, prenons un exemple : une famille c’est comme une grande entreprise, le mari, c’est le chef d’entreprise. La femme elle, est le fondé de pouvoir, le commercial, le gestionnaire, le chargé de relations, le ministère de l’éducation, le ministère de l’intérieur, le ministère des affaires étrangères, etc. Même si la femme occupe tous ces rôles, il n’en demeure pas moins qu’elle doit imprégner sa famille de la direction donnée par le mari à son entreprise. Encore faut-il qu’il ait une direction ! Il ne peut y avoir de direction que si l’homme accepte, lui, de rentrer au service de son Créateur, chacun selon ses possibilités. Alors, et alors seulement, la femme peut le sacrer maître des lieux. Cette condition remplie, la femme doit engager ses forces à donner place à son conjoint, et à lui de s’en saisir pour le bien de tous ! Et ainsi tout l’univers familial en sera vivifié !

Pour qu’un enfant grandisse et se développe harmonieusement, il faut qu’il ait deux racines. Le petit enfant a besoin de se sentir protégé par sa mère pour grandir, mais les limites imposées par son père l’aident à comprendre le monde qui l’entoure. Il est au centre de l’univers de sa mère et il apprendra par son père qu’il existe d’autres univers qu’il devra affronter pour survivre et s’épanouir. Les enfants ont besoin d’affection, de limites, de différenciation, de connaissances et de directives. 

Un père est un père et une mère est une mère. 

Les fonctions ne sont pas interchangeables. La valeur des deux parents est la même, mais leur gérance est différente. La mère, c’est l’abri, la sécurité, la protection, la chaleur, l’affection. Le père permet à l’enfant de s’émanciper du lien fusionnel avec sa mère et d’avancer dans la vie. Il le guide dans l’apprentissage de la Torah, et l’accompagne jusqu’au mariage. Il lui apprend à construire sa vie. Alors que la mère, c’est la source nourricière, l’amour fusionnel, le père aide à assumer la séparation psychologique et fixe les limites, les lois, la Torah.

Puissions-nous avoir la force de puiser dans notre Sainte Torah, des enseignements qui nous guideront dans notre rôle de parents authentiquement Juifs !