« Hachem parla à Moché en disant : "Vois, J’ai appelé par nom Betsalel fils d’Ouri, fils de ’Hour, de la tribu de Yéhouda. Je l’ai empli de l’esprit Divin, de sagesse, d’intelligence et de connaissance et de [savoir-faire pour] tout ouvrage… Et Moi, voici, J’ai mis avec lui Aholiav, fils d’A’hissamakh, de la tribu de Dan…" » (Chémot 31,1-3 ;6)

Rabbi Yo’hanan dit : « Hakadoch Baroukh Hou annonce trois choses par Lui-même ; la famine, l’abondance et un bon Parnass (bon fournisseur), comme il est écrit : "Hachem parla à Moché en disant : ‘Vois, J’ai appelé par nom Betsalel…’". » (Guémara Brakhot 55a)

Le personnage de Betsalel est mentionné à plusieurs reprises dans les Parachiot ayant trait au Michkan. La Guémara tire une leçon intéressante de l’introduction que fait Hachem à Moché Rabbénou concernant Betsalel. Il « annonce » le fait qu’Il a choisi Betsalel pour ériger le Michkan. Et la Guémara de déduire que l’une des trois choses qu’Hachem annonce Lui-même est le bon Parnass, qui est généralement traduit par « bon fournisseur », bien que le mot Parnass soit souvent employé pour décrire des dirigeants ou des personnes impliquées dans le Zikouï Harabim. Mais quand on pense aux célèbres dirigeants du peuple juif, il est assez rare que le nom de Betsalel nous vienne à l’esprit. Certes, il fut un illustre personnage qui accomplit d’incroyables choses lors de la construction du Michkan, mais il n’a pas le charisme propre à un chef ou un fournisseur pour la nation.

Pour répondre à cette question, il nous faut redéfinir ce que signifie le mot Parnass. Comme susmentionné, ce terme désigne quelqu’un qui pourvoit aux besoins des autres. C’est ce que nous apprend la Guémara qui décrit Moché, Aharon et Myriam comme « des bons Parnassim » du peuple juif, parce qu’ils fournirent des besoins vitaux à la nation ; les mérites de Moché permirent de bénéficier de la Manne dans le désert, Aharon fut à l’origine des Nuées de Gloire et par le mérite de Myriam, le peuple reçut de l’eau. Qu’apporta Betsalel ? Il était à l’origine de toute la subsistance spirituelle que le peuple juif tira du Michkan. Le Daat Chraga[1] développe cette idée – il remarque qu’un Parnass est quelqu’un qui guide et qui dirige le peuple : Betsalel ne l’a pas activement guidé, mais il est tout de même considéré comme un Parnass. « Nous en déduisons que ce n’est pas seulement celui qui gère concrètement la communauté ou celui qui juge le peuple d’Israël qui peut être appelé « Parnass Tsibour », mais quiconque élève le niveau spirituel du Klal Israël et qui le renforce grâce à ses actes est un Parnass Hatsibour… De même, tout Ben Torah qui étudie la Torah a une grande influence sur l’ensemble du peuple. Même s’il étudie discrètement, dès lors qu’il le fait avec assiduité et crainte du Ciel, il influe sur la situation de tous les Juifs à travers le monde, autant dans le domaine spirituel que dans le domaine matériel ! Ainsi, Hakadoch Baroukh Hou nomma Betsalel pour la construction du Michkan et par son intermédiaire, la situation spirituelle des Bné Israël s’améliora, la Chékhina put résider au sein du peuple. Il est le véritable Parnass et le véritable dirigeant de la nation… »

Rav ’Haïm Zaitchik propose une approche différence, se focalisant sur une qualité particulière chez Betsalel, qui lui permit d’être un bon dirigeant. Il cite le Yalkout Chimoni affirmant que pour la construction du Michkan, il fallait un partenariat entre deux tribus – celle de Yéhouda, représentée par Betsalel et celle de Dan, représentée par Aholiab ben A’hissamakh. Bien entendu, Betsalel aurait pu remplir ce rôle tout seul, étant donné ses talents divins, mais il savait qu’Hachem désirait ce partenariat.

Bon nombre de personnes sont intéressées à s’impliquer dans les activités communautaires dès lors que les spots sont tournés vers eux, à condition que tous les honneurs leurs soient accordés. Ils agissent de façon à ce qu’une fois la mission accomplie, ils puissent dire : « Regardez ce que j’ai fait ! » Mais si on leur propose d’être les co-présidents, de partager les tâches et les responsabilités et donc, de partager la gloire et les compliments, ils diront : « Dans ce cas, je ne suis pas intéressé. » Le Tout-Puissant recherche des gens qui travaillent Lichma – avec altruisme. Il veut des personnes qui feront des efforts pour l’honneur du Ciel et non pour leur égo. Pour tester réellement les motivations de l’individu, il suffit de voir s’il tolèrera un partenaire. Donc la première épreuve qu’Hachem fit passer à Betsalel – pour vérifier qu’il était adapté à cette mission – était de le placer en tant que co-président : « Je veux que tu travailles avec quelqu’un, qui n’est d’ailleurs pas issu de l’illustre tribu de Yéhouda, mais d’une tribu "simple", celle de Dan. » En acceptant cet associé, Betsalel nous a montré comment être un bon dirigeant.

Ces deux approches concernant le titre de Parnass de Betsalel semblent complémentaires. Il était un Parnass dans le sens où il apporta un grand bénéfice spirituel au peuple juif à travers l’édification du Michkan et il était un bon dirigeant, parce qu’il était prêt à partager sa place avec quelqu’un d’autre, qui était à un niveau moindre que le sien.

Puissions-nous tous mériter le titre de Parnass ; agir en faveur des autres et savoir partager humblement la responsabilité de nos entreprises.

 

[1] Daat Chraga, Parachat Vayakel, écrit par Rav Chraga Grossbard, Roch Yéchivat Poniewietz Latséirim.