« Souviens-toi des jours [du commencement] du monde, méditez les années de chaque génération ; interroge ton père et il te racontera, tes anciens et ils te diront. » (Dévarim 32,7)

Ce verset nous enjoint de nous souvenir du passé et de comprendre les changements survenus au cours des générations. La fin du verset ne semble pas liée aux deux premières parties – il nous ordonne d’interroger nos Pères et nos Anciens, mais sans nous expliquer à quoi cela fait référence. Rav El’hanan Wasserman explique que de la même manière que nous devons comprendre la Torah, nous devons méditer sur les événements survenus dans le monde et les analyser avec un regard basé sur la Torah. Pour ce faire, il faut demander à nos ancêtres qui ont plus d’expérience et aux Talmidé ’Hakhamim qui ont du recul et considèrent les choses sous l’angle de la Torah.

Il est essentiel de voir la main d’Hachem tout au long de l’histoire. Rav Wasserman cite des versets indiquant que l’Histoire est entièrement tournée vers le peuple juif et tel est son objectif véritable. D’ailleurs, la Guémara affirme que les souffrances ne viennent au monde que pour le peuple juif ; en d’autres termes, elles sont là uniquement pour nous véhiculer un message.

Rav Avigdor Miller parle de la valeur qu’accorde la Torah à l’étude de l’Histoire : « En analysant l’histoire, chacun peut découvrir tout un programme qui se cache derrière les événements, qui nous fait prendre conscience de la manière dont Hachem dirige les pas de chaque individu. »[1]

Dans le même ordre d’idées, Rav Yaacov Astor[2] souligne que l’étude de l’histoire du monde, y compris les livres d’histoire utilisés dans les écoles orthodoxes, ne prend pas du tout – ou pas suffisamment – en compte le point de vue de la Torah et cela peut avoir un effet très désensibilisant sur les élèves, qui abordent alors les choses de façon tout à fait laïque, indépendamment de toute Main directrice et de l’idée d’un objectif ultime.

Bien entendu, nous ne pouvons jamais savoir de façon sûre pourquoi certains événements se produisent, mais en suivant les principes exposés par nos Sages, on peut discerner un programme général. Ainsi, Rav Astor (avec l’approbation de Talmidé ’Hakhamim) écrivit tout un livre montrant la Providence dans des événements majeurs survenus au cours du XXIe siècle. Il rapporte plusieurs cas, certains plus évidents que d’autres et certains qui semblaient mineurs et insignifiants, mais qui métamorphosèrent le cours de l’histoire. Bon nombre d’entre eux eurent lieu durant la Seconde Guerre mondiale, paradigme du conflit entre le bien et le mal absolu, et qui aurait fut s’avérer bien plus ravageuse si le Mal l’avait réellement remporté.

L’un des événements clés de cette guerre fut la Bataille d’Angleterre. Les Allemands avaient conquis presque toute l’Europe en fin mai 1940. La Russie n’entra en guerre qu’un an plus tard et les États-Unis quelques mois après. Le seul bastion restant était la Grande-Bretagne. La stratégie allemande pour l’envahir, appelée « Opération Otarie », fut d’attaquer la RAF, force aérienne anglaise. Les Allemands étaient certains de leur succès, étant donné que leur armée aérienne dépassait de loin les effectifs anglais. Les soldats allemands étaient quatre fois plus nombreux que les soldats anglais et ils disposaient de 1300  bombardiers, 760 avions de guerre et 300 bombardiers en piqué.

Rav Astor décrit un « détail » de cette opération : « Des vagues de bombardiers nazis, arrivant généralement par trois, attaquaient les convois de l’armée anglaise, ainsi que les terrains d’aviation et les radars, dans le but d’abattre la RAF. Les pilotes anglais combattirent bravement au début. Mais à la mi-août, les attaques de la Luftwaffe surenchérirent et frappèrent de plein fouet les points les plus stratégiques de l’Angleterre. La RAF s’épuisait et était à court de pilotes… Au fur et à mesure que le mois d’août s’écoulait, Goering[3] était certain – et il en assura Hitler – qu’en quelques jours supplémentaires d’attaques, l’opération prendrait fin. Mais un "curieux effet du hasard" changea le cours des événements – de cette bataille et de toute l’histoire. »

Au moment où la situation semblait la plus sinistre, un événement mineur transforma tout. Les ordres reçus par les forces allemandes étaient de détruire les bases militaires et les arsenaux, mais de ne pas bombarder les civils, pour ne pas subir de représailles sur les villes allemandes, mais une nuit, ils lancèrent des bombes, détruisirent des maisons londoniennes et tuèrent des civils. Les Anglais, en guise de riposte, bombardèrent Berlin. Les bombardiers de la RAF s’acharnèrent sur Berlin et Hitler, de mémoire maudite, changea de politique et ordonna à ses pilotes de bombarder les civils anglais. Cette décision était très courante, mais elle lui coûta la défaite de cette bataille et, selon certains, la défaite finale.

Les Allemands causèrent de gros dommages aux Anglais – des centaines de personnes furent tuées, des milliers blessées et des dizaines de milliers restèrent sans logis. Toutefois, en dépit de la grande terreur et de la mort de civils, ce changement de stratégie allemande donna à la RAF le temps de souffler, de remettre en état les terrains d’aviation, de réparer le matériel, de rétablir les connexions et de reprendre haleine. Les usines d’aviation purent poursuivre leur production. Finalement, les Allemands abandonnèrent leur tentative d’envahir l’Angleterre et la bataille d’Angleterre fut perdue. Outre cette « erreur » des bombardiers allemands, le fait qu’Hitler changea de stratégie de manière tellement stupide est également un signe de la Main divine.

Rav Astor souligne : « Les historiens laïques emploient souvent les termes "malheur", "hasard" ou "chance" pour décrire les événements comme ceux qui firent dévier les bombardiers nazis sur Londres et changer le cours des événements de la guerre. Cependant, d’après la conception de la Torah, on voit ici la Main d’Hachem qui fait bouger les "pions" sur l’échiquier. »

Étudier l’histoire avec un regard centré sur la Torah peut intensifier grandement notre Émouna et notre appréciation de la Providence.

 

[1] Jeunesse réjouis-toi, p. 347.

[2] Auteur connu de plusieurs livres de Torah.

[3] Herman Goering, de mémoire maudite, Maréchal et homme politique allemand. Haut dirigeant de l’Allemagne nazie, proche d’Hitler, il créa la Luftwaffe et fut chef de l’économie de guerre de l’Allemagne.