Bonjour Rav,
Nous venons de passer la période de la Hiloula de Ra'hel et nous voyons beaucoup de vente de bougies "bénies" afin de réaliser la Ségoula de Ra'hel de 40 jours. Cela me perturbe un peu.
Comment peut-on bénir des bougies ou autres objets ? Jje pensais que seuls les grands d’une génération pouvaient bénir quelqu’un ou quelque chose. Est-ce que ce n’est pas faire du profit sur un mensonge ?
Ce que je trouve choquant, avec le respect que je dois à tout le monde, c’est que parfois ce sont des Rav ou des femmes de Rav qui font la publicité pour la vente de ces bougies.
Je comprends parfaitement la vente lors des Hiloulot car l’argent ira pour des synagogues ou associations ; mais le fait de dire que l’on doive absolument allumer avec la bougie bénie pour que la Ségoula fonctionne est-elle une réalité ?
Par ailleurs, pouvez-vous me dire si un objet placé sur le Kéver d’un Tsadik peut être béni ?
Merci Rav.
Chalom Ouvrakha,
Notre réponse se divisera en trois volets :
1. L’influence des Tsadikim sur les objets
Nous trouvons effectivement plusieurs sources indiquant que les objets ayant appartenu à un Tsadik peuvent exercer une influence positive sur ceux qui les détiennent.
Ainsi, la Chounamite (Melakhim II, 4, 21) posa son enfant mort sur le lit du prophète Élicha'. Le Zohar (Parachat Bechala’h 44b) explique qu’elle perçut une Kédoucha particulière planant sur ce lit. Plus tard, c’est le bâton du prophète qui servira à rendre vie à l’enfant.
De nombreuses autres sources talmudiques et rabbiniques appuient cette idée.
De même, l’endroit où repose un Tsadik possède une Kédoucha particulière qui favorise la prière et l’élévation spirituelle de ceux qui s’y rendent (Drachot Haran, Drouch Hachémini).
Même les ossements des Tsadikim exercent une influence spirituelle : nous pouvons constater que Yossef n'a pas exigé que l'on transfère immédiatement ses ossements en Israël. Les commentateurs expliquent [voir Tiféret Chlomo Parachat Bechala'h et Habeer Mayim 170] que c'est pour avoir une influence sur les Bné Israël qui seront confrontés aux forces du mal [voir aussi le livre du Rav Na'hman de Breslev "Hichtat'hout" 8, et Tsioun Hamesouyenet 6]. De plus, nos Sages affirment que la mer Rouge ne s'est ouverte que grâce aux ossements de Yossef [Béréchit Rabba 7-8].
2. Les limites de cette influence
Toutefois, il convient d’être très vigilant. Ces objets ne possèdent pas de pouvoirs miraculeux. Attribuer à un objet une force surnaturelle autonome pourrait relever d’une forme de 'Avoda Zara (idolâtrie) (voir Cha’aré 'Ezra II, Yoré Déa 66 ; Sia’h Its'hak 312).
Ainsi, le fait de faire passer des bougies sur la tombe d’un Tsadik peut, dans une certaine mesure, leur conférer une influence spirituelle positive — mais rien de plus.
En revanche, je n’ai trouvé aucune source attestant qu’un Tsadik puisse « bénir » un objet au point de lui transmettre une force propre. Cela semble être une pratique récente, sans fondement dans nos sources. On pourrait éventuellement assimiler un tel objet à celui ayant appartenu à un Tsadik — porteur d’une certaine Kédoucha — mais ce n’est qu’une théorie, non un principe halakhique établi.
3. Les Ségoulot : rappel fondamental
Aucune Ségoula ne peut agir indépendamment du travail spirituel personnel. Sans Mitsvot, sans Téchouva, sans effort intérieur, il n’existe pas de « formule magique » (Mé'am Lo'ez Bechala’h ; Séfer Ha'ikarim 41).
Malheureusement, certains préfèrent se reposer sur des Ségoulot plutôt que de progresser dans leur service divin, espérant ainsi obtenir guérison ou délivrance. Cette attitude est contraire à la Torah (Zohar Beréchit 56a ; Eikha Rabba 2, 5 ; Rachi sur Eikha 2, 2 ; Mikhtav Mééliahou III, 174 ; Maharal sur Sanhedrin 109a ; Ressissé Laïla n° 25 ; Likouté Torah Noa’h ; Maharcha sur Baba Batra 16b).
Conclusion : Les objets ayant appartenu à un Tsadik, ou ayant séjourné à proximité de sa tombe, peuvent effectivement porter une influence positive.
Les objets « bénis » peuvent, dans certains cas, être inclus dans cette catégorie.
Mais il est essentiel de ne jamais leur attribuer des forces miraculeuses ni de croire qu’ils agissent de manière autonome. Toute bénédiction découle uniquement de la volonté d’Hachem et du mérite spirituel de la personne elle-même.
Kol Touv.