Pourquoi la fête de Souccot est-elle caractérisée par la joie – elle est appelée « Yom Sim’haténou – le jour de notre joie » – plus que tous les autres Yamim Tovim, qui sont tous des jours joyeux ? Pour répondre à cette question, il convient d’analyser le lien qui existe entre Souccot et les autres fêtes de l’année juive.

Rav Its’hak Hutner[1] souligne que les Fêtes ne sont pas isolées les unes des autres, elles sont catégorisées en deux groupes différents : le premier est constitué des Chaloch RégalimPessa’h, Chavou'ot et Souccot. La Torah mentionne Souccot en dernier, après Pessa’h et Chavou'ot, car cette fête représente l’étape finale du processus agricole, quand la récolte est rassemblée, d’où l’un des noms de Souccot’Hag Haassif – Fête de l’engrangement.

Le deuxième groupe est constitué de Roch Hachana, Yom Kippour et Souccot. Cette combinaison est expliquée par ’Hazal : en évoquant la Mitsva des quatre espèces, le Midrach[2] précise que pour savoir si une personne jugée au tribunal a gagné le procès, il suffit de voir si elle sort en tenant ses armes, en signe de victoire. Donc, si nous agitons notre Loulav, nous manifestons notre foi qu’Hachem a accepté notre Téchouva de Yom Kippour et que nos fautes ont été pardonnées. Ce Midrach indique un lien fort entre Souccot et les Yamim Noraïm, à savoir que Souccot représente le point culminant de la Téchouva effectuée en ces jours.[3]

Ainsi, Souccot est un « double Yom Tov » car il fait patrie de deux groupes de jours joyeux. Rav Immanouel Bernstein explique que c’est la raison pour laquelle Souccot est décrit comme Zman Sim’haténou, plus que toute autre fête. Ce n’est pas seulement le paroxysme des Chaloch Régalim, mais aussi l’événement suprême à la fin des Yamim Noraïm. C’est un peu comme si Souccot était une fusion de deux fêtes. D’ailleurs, les Korbanot apportés pour le Moussaf de Souccot sont différents de ceux des autres fêtes. Sept agneaux étaient habituellement approchés, mais à Souccot, il en fallait quatorze. Cette quantité doublée prouve qu’il s’agit de deux fêtes associées.[4]

Le dénominateur commun de la fête de Souccot, dans ces deux groupes, est qu’elle est le climax de séquences, ce qui joue un rôle clé dans la joie exceptionnelle de ces jours. Notons que Souccot termine par une troisième apogée : le jour de Chémini Atséret, qui est intrinsèquement lié à Souccot et qui marque la fin des Fêtes est également le jour où l’on termine la lecture de la Torah – Sim’hat Torah. Ceci montre également que la joie qui fait la spécificité de Souccot est celle de l’aboutissement.

En réalité, dès le début de la Torah, on nous enseigne l’importance de l’achèvement. Le Ramban[5] souligne qu’à la fin de chaque jour de Création, Hachem vit que c’était « Tov » – bien, excepté le deuxième jour. Le Ramban, sur la base du Midrach[6], explique qu’une chose n’est considérée comme « bien » que quand elle est finie. Le deuxième jour, la création de l’eau débuta, mais ne fut complétée que le lendemain. C’est pourquoi on ne présente pas le deuxième jour comme « Tov », mais ce mot est écrit deux fois lors du troisième jour – une fois pour la fin de la création des eaux et une autre pour la création des végétaux. Le bien est donc lié à l’arrivée au but. Et il n’est donc pas surprenant qu’il soit source d’une grande joie.

Mais cela ne signifie pas qu’il faut se reposer sur ses lauriers quand on a terminé un projet. Il faut recommencer, à un niveau supérieur, pour atteindre de nouveaux sommets. D’ailleurs, à Sim’hat Torah, immédiatement après avoir terminé la lecture de la Torah, on la recommence.

Puissions-nous tous éprouver une joie véritable lors de la culmination des Chaloch Régalim et des Yamim Noraïm, et de recommencer en progressant.

 

[1] Pa’had Its’hak, Yom Hakippourim, Maamar 8.

[2] Midrach Tan’houma, Emor 18.

[3] Voir Téchouva, p. 280-281 du Rav Bernstein pour un autre rapport entre les Yamim Noraïm et Souccot.

[4] Téchouva, p. 281-282, note 16.

[5] Ramban, Béréchit, 1:10, dh: Vayar.

[6] Béréchit Raba, 4:6.