Je vais vous raconter l'histoire d'un Juif Tsadik, Rabbi Nissim Yaguen, que son mérite nous protège. Il est très charismatique et il relate que lors d'un de ses voyages à l'étranger, il rencontra un Juif qui lui dit : vous faites du Zikouïm Harabim, vous êtes une star du Tsitsit, vous organisez des Chabbath...

Il montra son Tsitsit et lui dit : j'aimerais vous raconter l'histoire de ce Tsitsit, comment il m'a sauvé pendant la Shoah. Il m'a sauvé de la Shoah ! Écoutez bien. Je m'appelle Ya'acov et j'ai été dans un camp d'extermination (en Allemagne ou en Pologne, je ne sais plus.) J'y ai rencontré des Juifs à bout, complètement à bout de force. J'ai vu des morts étranges, atroces, j'y vis des choses terribles, à en perdre la tête. J'ai vu ça, et j'ai eu de la peine pour mes frères Juifs. Je me suis dit : je vais leur remonter le moral, leur insuffler du courage, de la bravoure juive. Je marchais dans le camp, et je chantais des chansons. Je parlais avec des Juifs pour les renforcer. Dès que je voyais un groupe de dix Juifs, je récitais le Kaddich. On m'appelait au sein du camp Ya'acov Méchiguéné, Ya'acov le fou. Je passais à côté des nazis et chantais devant eux des chants juifs ! On me roua de coups, etc. Mais j'étais seul avec le Maître du monde : tuez-moi, faites de moi ce que vous voulez. On me frappa, etc. Les Allemands se rendirent compte que dans ce camp, les Juifs avaient l'air heureux, contrairement à tous les autres camps où ils perdaient leur bon sens. Comment était-ce possible ? C'était un camp déprimant, comment la joie pouvait-elle régner ? Ils se renseignèrent et découvrirent mon existence. Ils me parlèrent, me frappèrent, mais je leur répondais par des chants.  

Un jour, un général arriva et entendit un homme chanter devant le baraquement. Il demanda aux soldats présents ce que c'était. Les SS lui répondirent qu'il s'agissait d'un certain Ya'acov le fou. C'est un fou, laissez-le. 

Quoi, c'est un fou ?! Pourquoi chante-t-il des chansons ici ? Ici, il faut pleurer.

Ils répondirent : il est fou, mais il travaille bien.

Il dit : non, non.

Il sortit et m'appela. Juif, tais-toi !

Quoi, ce n'est pas une belle chanson ?! Je vais en chanter une autre.

Ce général me donna des claques et des coups de poing, mais je continuais à chanter devant lui. 

Il me menaça : si tu continues à chanter, je te fais subir une mort étrange.

Savez-vous de quoi les Nazis sont capables ? Il vaut mieux ne pas le savoir…

Je lui demandai : tu veux me tuer ? 

Je me mis alors à chanter : Hochia' Et Amékha…

Il me prit par le collet, siffla et fit venir tout le camp, il me conduisit quelque part dans le camp, traça un cercle autour de moi et lui dit : commence à creuser !

Apportez-moi un outil, demandai-je.

Avec les mains, mon ami, avec les mains.  

Avec mes mains ?

Oui.

Ok. 

Je commençai à creuser tout en chantonnant.

Je creuse et le Nazi crie : tais-toi !!

Je creuse et je suis heureux.

Je continue à creuser, et pendant ce temps, le général est parti. Il veut me tuer, mais pas d'une simple balle dans la tête. 

Je continue à creuser pendant une heure, deux heures, trois heures…

Pendant ce temps, mes amis juifs ont compris que c'était sérieux. Ils veulent me mettre en garde : 

écoute Ya'acov, jusqu'-là c'était drôle et sympathique, mais là, ce n'est plus un jeu, c'est un général de l'armée…, Ya'acov, silence ! 

Que voulez-vous que je fasse ?

Tais-toi ! Pourquoi tu chantes devant lui ?!

Alors, je dois sombrer dans la déprime ?

Non, mais ne chante pas devant lui !

Mais c'est sérieux, il veut te tuer !

Il veut me tuer ?

Oui !

Je me remets à chanter.

Je creuse et creuse et le général revient et voit que je suis déjà profondément enfoncé dans le sol. Il me dit alors : tu sais ce que tu as creusé ?

Quoi ?

Ta tombe.

Je chante alors une chanson d'Emouna.

Il me dit alors : allez, commence à te déshabiller.

Je commençai à se déshabiller. Je commence à retirer ses chaussures, puis la tunique des camps. Puis je retire ma chemise. Et que portais-je sous ma chemise ? Un Talit Katan. Un Tsitsit.

Lorsque le général l'aperçut, il hurla : qu'est-ce que c'est ?!

Un Tsitsit.

Il me dit : retire-le.

Soudain moi qui chantais constamment des chants, le regardai droit dans les yeux tout en tenant mon Tsitsit : 

ça, même si tu me tires dessus des milliards de balles, je ne l'enlève pas. Fais de moi ce que tu veux. 

Je ne l'enlève pas !

Or, j'étais sous la terre, et on m'avait prévenu : on va te liquider, tu vas être enterré vivant, sous terre. Mais je saisis le Tsitsit en main et répondis : 

ce Tsitsit, sais-tu ce qu'il signifie ? Cela veut dire que vous les Nazis, chaque nazi qui a porté atteinte à un Juif : il y a un D.ieu dans le ciel qui se vengera de tout ce que vous avez fait. Il ne gardera pas le silence. Et si tu me nuis, si tu me tues, mon Père dans le ciel, qui est responsable de toute la Création et également de toi, t'exécutera. Ça c'est le symbole du Tétragramme, le Maître du monde et ça, je ne le retire pas. 

Le nazi me répondit : tu es fou, sors de là et viens avec moi.

Il me fit entrer dans sa Jeep et m'attacha les mains avec des menottes. Nous quittâmes le camp. J'étais assis à l'arrière et le nazi était à l'avant, nous étions seuls dans la voiture. Je chantais Ana Ana Békoa'h. C'était la première fois que je sortais du camp. On était en voiture et on roula pendant une heure ou plus. Le nazi se taisait, mais il était rouge de colère. Enfin, il arrêta la voiture à côté d'une frontière, ouvrit la porte de la Jeep et m'ordonna : sors !

Comment puis-je sortir ? Je suis attaché.

L'homme sortit et m'ouvrit la porte. Il prit des clés pour ouvrir les menottes et me dit : Ya'acov, tourne-toi.

Je compris que c'était fini, qu'il allait me mettre une balle dans la tête, c'était fini. 

Subitement, ce général nazi sortit une carte bancaire et dit : 

Prends ça, ça t'aidera à passer les frontières. Prends de l'argent pour t'acheter à manger ce que tu voudras. Prends la fuite !

Je le regardai et lui dis : quoi ? Moi, m'enfuir ? Vous êtes censé me tuer et non m'aider. 

Le nazi me dit alors : je crois à chaque mot que tu as dit. Fuis.

Je pensais que si je me mettais à courir pour m'enfuir, il me mettrait une balle dans la tête. 

J'empochai la carte et l'argent dans la poche et me mis à courir. Je m'enfuis et entendis la Jeep repartir. 

Je levai alors les yeux au Ciel et dis : Maître du monde, j'ai réussi à instiller la Émouna à un nazi, un non-Juif, une brute. Je voudrais aussi aider un Juif pour obtenir un mérite au Ciel. Par le mérite de quoi ? Du Talit Katan. De la Émouna. Avec le Maître du monde, on peut tout faire.