Question d'une internaute : “Voilà 6 ans que je suis mariée et nous n'avons toujours pas eu le bonheur de devenir parents. Mon mari et moi sommes très déprimés et nous n'allons plus dans les Brit-Milot ni même dans les voyages Cachères organisés car c'est une trop grande souffrance pour nous d'être le seul couple sans enfant.
Depuis 4 ans, mon mari et moi nous sommes beaucoup renforcés en Torah. Je me couvre la tête, il va à la synagogue tous les jours et j'ai fait toutes les Ségoulot possibles et imaginables, mais rien ! Je précise bien entendu que nous avons entamé toutes les démarches médicales nécessaires et j'en suis à ma quatrième FIV qui échoue. Je suis très malheureuse et j'en veux à Hachem terriblement ! Pourquoi ne nous envoie-t-Il pas un enfant malgré tous les efforts matériels et spirituels que l'on fait ?”

La réponse de Mme Nathalie Seyman

Le désir d’enfant est ancré en nous dans notre instinct maternel : une envie de donner, de transmettre, de protéger… Un homme et une femme se plaisent, se marient et la suite logique voudrait qu’ils aient des enfants. Or il arrive que ce qui paraît si naturel et donné à tous ne soit pas forcément facile à obtenir. Commence alors un combat plus ou moins long pour le couple. Comment faire en sorte pour que cette épreuve ne nous détruise pas ?

Acceptez vos émotions

Lorsque l’on vit ce genre d’épreuve, il est tout à fait normal de diriger sa tristesse et sa frustration vers les autres (pourquoi eux et pas nous ?) ou même envers Hachem. C’est non seulement humain mais il est également plus facile d’être en colère envers quelqu’un d’autre que d'affronter sa propre tristesse. Car une femme de notre entourage qui tombe enceinte reste un rappel douloureux de ce que nous vivons : la peur de ne jamais avoir d’enfant, de ne pas être “comme tout le monde” et d’être en quelque sorte punie. L’infécondité crée une véritable souffrance chez la femme car elle s’attaque à son “rôle mythique”, sa raison d’être en quelque sorte. Elle se sent dévalorisée. C’est très violent comme sentiment. Et progressivement, il se peut que l’obsession s’installe, toute la vie tournant autour de ce désir d’enfant. Le couple s’enferme sur-lui-même, s’isole et il peut du coup se créer des tensions au sein même de leur vie conjugale.
Pour éviter d’en arriver à ce stade, il faut éviter de refouler tous les sentiments négatifs que vous pouvez ressentir (colère, jalousie, tristesse). Il faut au contraire s’autoriser à les ressentir pour les comprendre et mettre des mots sur ce que vous ressentez. Le but de cette introspection, c'est de réaliser que tout ce que vous ressentez n'est qu'un symptôme de la peur de ne pas réussir à avoir d'enfants. Et vous avez le droit d’avoir peur et d’être triste de cette épreuve difficile ! Et perçus ainsi, vos sentiments deviennent beaucoup plus acceptables et il sera plus facile pour vous de les dépasser.
Pour le reste, écoutez-vous : si la perspective d’une Brit-Mila vous déprime, alors déclinez. Vous avez le droit de vous laisser le temps d'aller mieux.

Appréhendez la situation différemment

Aujourd’hui, la contraception a produit l’illusion d’une maîtrise de la fécondité. Or nous avons chaque jour des preuves que seul Hachem contrôle ce domaine. Mais nous avons la sensation dans notre société actuelle que tout s’obtient, pire, que tout doit s’obtenir et rapidement. Même les choses sur lesquelles nous n’avons aucun pouvoir ! La non-réussite n’est ni plus ni moins qu’un échec qu’on s’attribue au lieu de la percevoir comme un message et peut-être même une opportunité pour s’améliorer avant de trouver la bonne voie.

Or il faut bien être conscients que nous avons tous un combat à mener. Pour certains, ce sera de trouver leur Mazal, pour d’autres une bonne Parnassa et pour d’autres encore, comme vous, ce sera de mener un combat jusqu’à pouvoir enfanter. Si la vie n’était qu’un chemin sans embûches, comment pourrions-nous grandir et nous améliorer ? Les épreuves nous sont envoyées pour nous faire grandir, pour trouver une force en nous que nous ne soupçonnions pas. Il faut remplacer cette sensation de punition par l’image d’un chemin particulier par lequel nous devons passer pour une raison que nous ne sommes pas à même de comprendre au jour d’aujourd’hui.

Si quelqu’un vous annonçait avec certitude que vous tomberez enceinte dans deux ans par exemple, il est sûr que vous attendriez patiemment en vous investissant sur autre chose en attendant, confortée par ce qui vous attendra dans deux ans. Ce qui vous freine est votre manque de confiance en l’avenir. Et c’est cette vision qu’il vous faut modifier. Ce désir d’enfant vous a amenée à vous renforcer en Torah, ce qui est magnifique. Hachem a probablement encore d’autres projets pour vous avant de vous envoyer Bé'ézrat Hachem un beau bébé. Faîtes-Lui confiance.

Mes conseils

- Le corps n’est pas une machine qui obéit à coup sûr à ce que nous avons décidé pour lui. Il est en effet aussi lié à notre conscience qu’à notre inconscient. C’est pourquoi il faut rechercher des réponses du côté de son psychisme : chaque corps a son histoire et sa mémoire et parfois il ne faut pas aller trop loin pour comprendre d'où vient le blocage.

- S’il vous est difficile de faire seule votre introspection, n’hésitez pas à consulter un thérapeute. Car la parole peut énormément vous apporter. Ainsi, il vous amènera à trouver et dénouer vos blocages mais également à dépasser votre colère en vous aidant à vous apaiser et à vous sentir mieux dans votre corps pour mieux appréhender les situations du quotidien.

- Le médical seul n’a pas toutes les réponses. Il ne faut pas mettre le religieux de côté. Gardez en tête que la médecine est l’outil mais Celui Qui guérit est Hachem. Continuez sur votre voie sans jamais penser que c’est pour rien, car il est sûr et certain que ce n’est pas le cas. Demandez des Brakhot à un Rav et parlez avec lui, il pourra répondre à vos questions et peut-être que ses paroles vous feront du bien.

- Bravo pour toutes vos Ségoulot, elle peuvent vous aider car une Ségoula est une sorte de “remède” qui a la faculté de régler certains soucis. Or elles ne sont pas infaillibles. Elles sont des coups de pouce qu’Hachem nous a donné mais la meilleure des Ségoulot reste la prière !

- Investissez-vous dans une activité qui vous tient à cœur et que vous n’avez jamais osé faire ou eu le temps de commencer (rendre visite à des malades, aider des gens dans le besoin ou tout simplement une activité d’art ou autre qui vous passionne…). L’investissement sur quelque chose d’extérieur vous aidera à ne pas tomber dans le cercle vicieux de l’obsession et vous apportera beaucoup.

- Expliquez à vos proches avec des mots simples que s’ils veulent vous aider, il faudra qu’ils vous comprennent si vous n’avez pas envie d’en parler ou si vous préférez ne pas être présente à un évènement. Qu’ils ne vous jugent surtout pas et surtout qu’ils soient patients. Ils doivent bien comprendre que vos décisions ne sont pas dirigées contre eux. Personne ne peut comprendre ce que ressentent les femmes qui vivent cette épreuve. Aussi la meilleure façon qu’ils auront de vous aider sera de faire preuve de patience.

- Sachez faire une pause dans vos démarches de procréation médicalement assistée. Il faut que périodiquement, vous vous réappropriez votre corps. Le temps de vacances en amoureux, d’un week-end, d’un séjour familial… Oubliez tout et ne vous concentrez que sur votre mari et sur votre bien-être.

- Gardez confiance en Hachem. C’est le plus difficile mais le plus important des conseils. Au sujet de l’infertilité dans la Torah, on retrouve souvent cette phrase très juste et qui résume tout : “Ein Od Milvado”: Tout vient de Lui.

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.