Question 

Chalom Kvod HaRav. 

Je m’appelle Eliahou. J’ai le mérite, D.ieu merci, d’avoir atteint un âge avancé et d’être en bonne santé. Mais comme beaucoup de gens âgés, il m’est de plus en plus difficile de m’endormir la nuit. J’ai besoin de prendre régulièrement un somnifère pour m’endormir. Pourrais-je savoir s’il m’est permis d’en prendre le Chabbath ? 

Réponse

S’il vous est très difficile de vous endormir (et que vous ne pouvez pas vous en abstenir même en réduisant votre consommation de caféine ou en prenant des mesures similaires) au point d’éprouver un insupportable malaise et une grande faiblesse, vous pouvez prendre un somnifère comme d’habitude.  

Réponse détaillée

Nos Sages ont interdit de prendre des médicaments le Chabbath de peur qu’on en vienne à les préparer d’une façon susceptible d’impliquer une interdiction de la Torah. Cependant, les Richonim (les premiers décisionnaires) ont fait remarquer que ce décret ne concerne ni une personne en bonne santé prenant des produits qui ne sont pas des médicaments ni une personne considérée comme « malade qui n’est pas en danger », mais seulement celui qui souffre de douleurs ou d’une maladie particulière dans une partie du corps et qui est capable de vivre normalement ; celui-là n’aura pas le droit de prendre un médicament, quel qu’il soit (par exemple un cachet contre un mal de tête supportable).

Se fondant sur ces principes, les décisionnaires ont éclairci la loi en ce qui concerne les somnifères. Dans son livre Ketsot Hachoul’han, Rabbi Avraham ’Haïm Naé écrit que le manque de sommeil n’est absolument pas défini comme étant une maladie et, en conséquence, les somnifères ne sont pas du tout considérés comme des médicaments. De plus, ils ne sont composés d’aucun produit thérapeutique, mais uniquement de substances provoquant une sorte d’ivresse. Aussi est-il autorisé de les utiliser. Cependant, le Rav Waldenberg, dans son livre Tsits Eliezer, soutient que les hypothèses de base du Rav Naé ne sont pas exactes et que ces produits contiennent également des composants médicinaux (qui peuvent, par exemple, concourir à la santé des bébés). À dire vrai, dans une autre de ses réponses, il rapporte l’avis du Rav Chlomo Zalman Auerbach qui statue que même si dans ces pilules il y a des composants curatifs, du fait même que la personne n’a pas l’intention d’être guérie par ces produits, mais seulement de pouvoir dormir, cette raison suffit pour ne pas les interdire.

Parmi les décisionnaires contemporains, certains pensent qu’il faut faire la différence, d’une part, entre les difficultés de dormir dues à l’émotion, au stress, etc., et, dans ces cas-là, conformément à ce qu’on a expliqué plus haut, on peut se montrer moins strict, et, d’autre part, les difficultés de dormir dues à un certain état de santé ou à des troubles nerveux qui sont jugés comme étant des maladies et, de ce fait, les somnifères sont considérés comme des médicaments. Et par suite il est nécessaire de faire montre de plus de sévérité dans ce deuxième cas à moins que la maladie ne commence à affecter presque tout le corps. 

Le principe de la Halakha, quant à lui, figure dans le livre Chemirat Chabbath Kehilkhata : celui que l’insomnie dérange énormément a le droit de prendre un somnifère. C’est-à-dire que celui qui, la nuit, n’arrive pas à dormir ou qui même réussit à s’endormir, mais que cela lui prend beaucoup de temps ou se réveille plusieurs fois au cours de la nuit, a le droit de prendre un somnifère.

La raison en est que certains décisionnaires ont estimé que le manque de sommeil était un état voisin de celui « d’un malade qui n’est pas en danger » à qu’il est permis de prendre des médicaments. Le Rav Naé, par exemple, emploie l’expression « le manque de sommeil constitue une grande souffrance et brise tout le corps. » 

Et sans aucun doute, on peut appliquer le principe de « malade qui n’est pas en danger » à celui pour qui le manque de sommeil est si grave à tel point que tout son corps s’en trouve affaibli ; aussi lui est-il permis, d’après toutes les opinions, de prendre des somnifères.

Dans ce cas-là, il n’a nul besoin d’attendre de ressentir le fait que tout son corps s’affaiblit. S’il sait que, sans ces pilules, il ne pourra pas dormir pendant la nuit, il a le droit d’anticiper la prise du somnifère en dépit du fait qu’il se sente bien pour le moment.

 Références : Ketsot Hachoul’han, fin du siman 138 ; Tsits Eliezer, 8e partie, Siman 15 ; chapitre 15:14 ; Ibid, 9e partie, siman 14, chapitre 2, 40 ; Or’hot Chabbath, 2e partie, chapitre 20, 142 ; Chemirat Chabbath Kehilkhata, chapitre 33, 16 ; Choul’han Chelomo Arke Refoua, 2e partie, pages 180-181 ; ’Hout Chani Chabbat, 4e partie, page 152.