Il est intéressant aujourd’hui – alors que l’Islam est devenu une des religions essentielles de la France, de constater d’une part la ressemblance entre certaines habitudes de l’Islam, et de nombreuses Mitsvot du judaïsme. Mais pour revenir à la comparaison idéologique APPARENTE entre les deux confessions, il convient de se référer au dernier livre paru récemment de Bernard Rougier (version augmentée des « Territoires conquis de l’islamisme » paru déjà en 2020). Bernard Rougier est un universitaire qui a vécu un certain temps dans les camps palestiniens et est reconnu comme un islamologue sérieux. Il rapporte des faits qu’un juif religieux ne refuserait pas d’accepter, mais par ailleurs la mentalité est tellement différente, pour ne pas dire opposée. Expliquons-nous : si l’on apprend aux enfants très jeunes que les maladies viennent du ciel, car « rien ne bouge dans ce monde sans la volonté divine » (cité dans L’Express, n° 3629 Janvier 2021), cela ne contre nullement un enseignement du judaïsme. Tenter d’intégrer la foi chez les jeunes enfants à l’aide de jeux pour petits n’est nullement répréhensible. Refuser dans les écoles laïques de donner à manger de la viande « Halal » est une brimade injustifiée, que ne peuvent accepter ceux qui veulent manger « Cachère ». Les limites à ne pas franchir, pour vivre en commun dans le cadre d’une société différente, ont été justement définies par Alain Juppé qui fut Ministre des Affaires Etrangères, maire de Bordeaux : il a clairement précisé : « Arrêtons de fantasmer sur certains sujets. Qui cela gêne-t-il qu’une femme porte un foulard sur la tête ? Je ne parle pas de ‘burka’ évidemment (voile qui cache toute la figure sauf les yeux, la loi en fait l’interdiction). A l’école, il est normal qu’il y ait une neutralité religieuse absolue. A l’école, je suis contre l’édiction d’une obligation de fournir un repas conforme à un rite religieux. Je suis pour une offre diversifiée afin que chacun puisse y trouver son compte. En revanche, ne tolérons pas qu’à l’hôpital quelqu’un refuse d’être soigné par une personne de sexe différent » (texte cité dans « Ouvrons les yeux » p. 273-274).

Cette remarque d’un haut dignitaire de la République résume bien la différence fondamentale entre les deux confessions, le judaïsme et l’islam. Remarquons d’abord que ce n’est pas de l’islamisme – branche fondamentaliste de l’islam – que l’on tient à parler ici, mais plutôt de l’aspect particulariste de l’islam. Dire que « tout vient du ciel » ou « proposer aux enfants des jouets pour leur apprendre des éléments de sainteté ou de pureté – on l’a dit – n’est pas négatif, à condition que l’on continue à éduquer dans cette direction. Dire aux enfants : « Sachez que tout vient du Ciel » est certes positif, mais il faut collaborer avec le Créateur et agir dans le monde ! Les Rabbanim disent de vacciner contre la maladie, et c’est notre rôle. L’école juive confessionnelle, qui existe en France depuis 1935 avec la création de l’Ecole Maïmonide, n’a jamais eu de conflit avec la laïcité. A remarquer d’ailleurs que « laïcité » en français n’est pas adversaire de la religion, mais dépourvue de religion, et n’a pas à être une difficulté majeure pour un élève religieux (contrairement à Israël où laïque, « ‘Hiloni », exprime une idée de « ‘Hol – profane » , opposé aux valeurs religieuses). Quant aux prières publiques dans les rues, même 5 fois par jour, elles n’ont pas à être une gêne pour le public. Connait-on l’histoire – peut-être apocryphe – du Cerfbeer, représentant du judaïsme alsacien, venu un après-midi à Versailles faire une demande au Roi Louis XVI, et attendant dans l’antichambre le roi, voit la journée s’achever. N’ayant pas prié Min’ha (la prière de l’après-midi), il se met dans un coin de la chambre pour prier, et quand il est appelé auprès du roi, il se trouve au milieu du Chemoné Essré et refuse de bouger, malgré les instances du chambellan qui l’invite. Quand il finit sa prière, il dit au roi qui l’avait attendu : « Je m’excuse, mais j’étais occupé auprès du seul Roi Qui est plus grand que Sa Majesté ». L’excuse fut comprise et acceptée. Ce qui fait problème aujourd’hui dans une société française de plus en plus éloignée de la religion, c’est cet apport d’une communauté de 5 millions d’habitants qui cherchent à rester fidèles à leurs traditions, et refusent de s’intégrer dans une société laïque. C’est ce que signifie le titre du livre de Bernard Rougier « Les territoires conquis de l’islamisme ». La présente chronique ne cherche pas à aviver l’aspect politique du problème, mais uniquement à souligner que les aspects extérieurs – et aussi ce dérivé inhumain qu’est l’islamisme – risquent de cacher l’essentiel. Pour nous, juifs croyants vivant depuis 3 500 ans, dans le sillage de la Révélation du Sinaï et de son écho talmudique, il nous importe de chercher plus à voir ce qui unit que ce qui déchire. Le Rambam l’a écrit : « Le christianisme comme l’Islam sont plus proches de la vérité monothéiste que les idolâtres de l’antiquité » et assurément pouvons-nous nous permettre d’ajouter que les matérialistes et athées de notre époque. C’est dans un tel esprit que nous construirons le monde de demain, basé sur la foi en D.ieu, sur Son Hachga’ha, et notre souhait de voir se révéler bien vite l’aspect messianique de l’Histoire.