Dans la paracha Vayéra, le troisième jour après sa brith mila, Avraham avinou se sent très faible. Voulant lui éviter de se fatiguer en recevant des invités, Hachem amène une forte canicule sur la région. Personne n’entreprend de voyage et Avraham avinou ne peut accueillir aucun passant, il se sent donc seul.

Au lieu de profiter de cette opportunité pour se reposer, Avraham avinou a du chagrin. Il aimerait tant recevoir quelques invités et les aider… Dans l’espoir d’apercevoir un passant au loin, il sort de sa tente et scrute les dunes du désert. Le soleil ardent tape fort, très fort, mais Avraham avinou ne pense qu’à une seule chose : pourra-t-il recevoir un invité aujourd’hui ?

Voyant la piété de ce tsadik, Hachem décide de lui rendre visite ! Il se "dévoile" à lui lorsque soudain, Avraham avinou aperçoit trois bédouins qui ont l’air de se diriger vers sa tente. Ce sont trois anges (déguisés en hommes) qu’Hachem a décidé d’envoyer à Avraham avinou afin de lui permettre de faire ce qu’il désire : recevoir des invités. (Ces anges ont également une mission à remplir.)

Immédiatement, Avraham avinou s’excuse auprès d’Hachem en lui disant qu’il est obligé de s’interrompre pour aller recevoir les invités. Avraham avinou demande à Hachem de ne pas "partir" mais de l’attendre, puis il se lève et court vers les trois bédouins, afin de les convaincre de venir se restaurer et se reposer chez lui.

La guémara conclut de cet épisode qu’il est plus important de recevoir des invités que de recevoir la gloire divine. (On parle ici de personnes ayant besoin d’un gite ou d’un couvert, pas simplement des invitations amicales. Inutile de préciser que toutes les invitations ne doivent en aucun cas heurter les lois de kédoucha…)

Le saint Rav Israël Abou’hatsira zatsal (plus connu sous le nom de Baba Salé) pose une question sur ce passage : la guémara a appris du comportement de Avraham avinou qu’il est préférable de recevoir des invités que de rester en compagnie de la présence divine. Mais d’où Avraham avinou lui-même savait-il qu’il fallait adopter cette conduite ?

Le rav répond que les grands tsadikim ont tellement purifié leurs corps, que celui-ci est poussé de lui-même à faire des mitsvot ! C’était le cas d’Avraham avinou : ils’était rapproché d’Hachem et avait sanctifié son corps par un accomplissement parfait de Sa volonté. Son corps, devenu saint et pur, ne faisait plus obstacle entre l’âme et son Créateur. Au contraire, il désirait de lui-même accomplir la volonté d’Hachem.

Ainsi, lorsqu’Hachem "apparut" à Avraham avinou, ce dernier était très faible. Mais dès que les trois anges apparurent au loin, il ressentit que son corps était soudain motivé à se lever et à courir en direction des passants.  Sachant qu’il avait atteint ce niveau de purification et que son corps recherchait uniquement à accomplir les mitsvot, Avraham avinou comprit que c’était la volonté d’Hachem de s’interrompre pour aller à la rencontre des invités. C’est donc ce qu’il fit…

Si ce niveau exceptionnel à l’air loin de notre portée, le besoin de sanctifier notre corps (et notre âme) est tout à fait entre nos mains !

Il n’y a pas de secret ni de potion magique. Ce n’est qu’en utilisant et en soumettant notre corps pour accomplir la parole d’Hachem que nous le purifions. Chaque mitsva purifie notre âme, mais aussi notre corps !

Un jour, le rav surnommé  « Divré ‘Haïm » marchait dans la rue, lorsqu’il s’arrêta soudain devant l’une des maisons. « Je sens l’odeur du paradis qui émane de cette demeure ! » dit-il à ses élèves.

On toqua à la porte et un vieil homme ouvrit la porte. Le Divré ‘Haïm dit qu’il sentait une odeur sublime qui provenait de sa maison, et demanda au propriétaire de la maison s’il en savait quelque chose. Ce dernier répondit par la négative et proposa au rav d’y faire un tour afin de découvrir la source de ce parfum.

Le rav entra dans la maison, suivi par ses élèves. Il passa de pièce en pièce lorsque soudain il désigna une armoire et demanda si on pouvait l’ouvrir. Le vieillard s’exécuta et le Divré ‘Haïm s’écria : « L’odeur du paradis provient d’ici, de cette soutane de curé ! Sans aucun doute ! »

Les assistants étaient perplexes. Que faisait ce vêtement dans cette maison et comment avait-il été imprégné de l’odeur du paradis ? On demanda des explications et le vieillard raconta à l’assemblée l’histoire suivante :

Je suis responsable d’une caisse de tsédaka. Toutes les semaines, je fais une "tournée" et les habitants du village me remettent de l’argent, que je distribue ensuite aux nécessiteux.

Un jour, juste après avoir distribué l’argent de ma "tournée", un pauvre toqua à ma porte et me demanda de l’aide. Je lui expliquai qu’il venait à un mauvais moment et que je ne pourrais l’aider que la semaine suivante. Mais ce pauvre n’accepta pas mon argument, et il m’expliqua qu’il avait urgemment besoin de cet argent. Entendant ses supplications, je décidai de refaire la quête en sa faveur. Ce ne fut pas facile… Les habitants de ce village n’étaient pas riches, mais ils avaient tous bon cœur et chacun s’efforça de donner ce qu’il put. Je reçus beaucoup moins que d’habitude, j’y ajoutai mes maigres économies personnelles, et transmis la récolte au nécessiteux.

Quelques minutes plus tard, un autre pauvre toqua à ma porte. Il me raconta qu’il avait fait faillite et qu’il devait une somme d’argent importante. « Aujourd’hui, j’ai reçu une menace claire et explicite : si je ne paye pas d’ici ce soir, mes créanciers se vengeront sur mes enfants ‘has véchalom. J’ai besoin de telle somme, s’il vous plait, je vous en supplie ! » Puis, il éclata en sanglots.

Je ne savais que faire. Cela ne servirait à rien d’organiser une nouvelle "tournée", car les villageois ne donneraient plus ou presque rien. De plus, la somme était équivalente à ce que j’avais l’habitude de ramasser en quatre semaines. Que faire ? Je me mis tout de même à parcourir les rues et à essayer de les convaincre d’aider ce malheureux. Comme on pouvait s’y attendre, je ne réussis pas à atteindre le centième du montant nécessaire.

Soudain, j’eus une idée ! Je connaissais un endroit où quelques voyous se réunissaient pour jouer aux cartes. Comme je ne leur demandais jamais de l’argent, peut-être qu’ils consentiraient à me donner quelques pièces qui contribueraient à gonfler ma maigre récolte…

Lorsque je les trouvai et leur expliquai la raison de ma visite, je reçus quelques pièces mais très peu… Voyant ma déception, l’un des jeunes me lança : « J’ai avec moi une soutane de curé. Si tu es d’accord de t’en vêtir et de faire le tour du village avec, alors je te donnerai toute la somme que tu as besoin. » Sans hésiter, j’acceptais son marché. Je ne pouvais laisser ce pauvre juif sous la menace de ses créanciers. Je fis donc le tour de la ville vêtu de la sorte, suivi par le groupe de moqueurs qui riaient bruyamment !

Le vieillard finit son récit et le Divré ‘Haïm s’exclama : « Je comprends maintenant d’où provient l’odeur du paradis que j’ai ressentie dans ce vêtement. L’immense mitsva que tu as méritée d’accomplir a parfumé cette soutane d’une kédoucha incroyable ! Garde toujours cet habit chez toi et demande d’être enterré avec après ta mort. Il te sauvera de toute difficulté. »

Après son décès, le vieillard fut enterré avec cette soutane. Mais puisque l’un des bords était déchiré, les membres de la hevra kadisha utilisèrent un bout de tissu blanc pour recouvrir l’un des pieds.

Des dizaines d’années plus tard, les autorités civiles ordonnèrent de déplacer les tombes du cimetière afin de faire passer une route. Les juifs du village essayèrent d’annuler le décret, mais en vain…

Lorsque les fossoyeurs déterrèrent la tombe de notre ami, ils furent ébahis de le trouver intact, comme le jour de son décès. La partie du corps qui été enveloppée par la soutane avait entièrement été conservée. Seul le pied du défunt (qui avait été entouré par le bout de tissu) était décomposé !

Profitons donc de toutes les occasions qui se présentent à nous afin de sanctifier notre corps, notre âme et notre entourage. Lorsque nous récitons une bénédiction avec minutie, lorsque nous sanctifions nos yeux, notre bouche, nos pensées, nous "réparons" le monde dans lequel nous vivons.

Qu’Hachem nous aide à Le servir et à nous rapprocher de Lui, avec joie, amour et kédoucha, amen.