Cours dédié à la refoua chelema du Rav Claude Lemmel

Rabbi Israël Salanter demandait : pourquoi la paracha de Tazria, qui traite principalement de la lèpre, est-elle juxtaposée à celle de Chemini qui elle, a pour sujet les aliments interdits ?
 

Et le maître du mouvement du Moussar de répondre : la lèpre provient essentiellement de la faute de la médisance. Et pourtant, si la plupart des gens prennent garde à ne pas consommer des aliments interdits et inspectent soigneusement leurs légumes afin de ne pas avaler ne serait-ce qu’un minuscule insecte, ils n’hésitent pas à bafouer l’honneur de leur prochain en médisant à son propos. En juxtaposant les sections Tazria et Chémini, la Torah nous dit en substance : tout comme vous avez soin de ne pas consommer des aliments interdits, ayez soin de ne pas prononcer des paroles interdites.

 


On raconte que le Rav de Pssich’ha ordonna un jour à Rabbi Bounem de Pssich’ha (qui lui succéda) de partir en voyage sans toutefois lui préciser la raison ni la destination de leur déplacement. En fidèle disciple, Rabbi Bounem ne posa aucune question à son maître et prit la route accompagné de quelques-uns de ses fidèles.

Au bout de longues heures de ce voyage sans but apparent, la nuit tomba et la charrette arriva aux abords d’un petit village. Le cocher arrêta l’attelage devant l’auberge locale et les voyageurs pénétrèrent dans la grande salle à manger dans l’espoir de s’y restaurer. Rabbi Bounem s’installa dans une chambre attenante tandis que ses fidèles prièrent l’aubergiste de leur servir un repas lacté. « Je suis vraiment désolé, répondit ce dernier, mais je prépare uniquement des repas carnés. » Inquiets à l’idée de manger de la viande provenant d’un village inconnu, les ’Hassidim soumirent l’aubergiste à un interrogatoire serré : Qui est le cho’het local ? Dans quel état se trouvait la bête après l’abattage ? Présentait-elle des défauts quelconques ? Comment a-t-on effectué la salaison de la viande ?

Soudain, ils entendirent une voix qui s’écriait : « ’Hassidim, ’Hassidim ! » Les voyageurs se retournèrent pour voir d’où elle provenait mais ne virent personne. Après quelques recherches, ils finirent par découvrir un Juif en haillons assis près du fourneau. « Hassidim, ’Hassidim, harangua ce dernier. Sur ce qui entre dans votre bouche, vous questionnez et vous enquêtez : Qui est le cho’het ? Comment la viande a-t-elle été salée ? Mais sur ce qui sort de votre bouche – à savoir les paroles que vous prononcez – vous ne vous posez donc aucune question ? »

Depuis la chambre où il était installé, Rabbi Bounem entendit ces paroles de reproches et s’émerveilla de leur portée : « Cet homme a entièrement raison, se dit-il. Combien le Juif se montre pointilleux avec la nourriture qui entre dans sa bouche et combien il se montre négligent avec les paroles qui sortent de sa bouche alors que la gravité de l’interdit de la médisance dépasse de loin celui de la consommation de porc ! »

Puis il conclut à l’adresse de ses élèves: « A présent, je comprends pourquoi mon maître m’a envoyé en voyage. Cela valait la peine de parcourir une aussi longue distance ne serait-ce que pour entendre ces paroles de vérité remuantes ! »

Et sans plus attendre, Rabbi Bounem et ses disciples quittèrent l’auberge et prirent le chemin du retour.