Chalom Ouvrakha,
'Hazak pour vos recherches ! J’espère pouvoir vous être utile et être à la hauteur de vos attentes.
Concernant les graines dans le Étrog, bien que certains exigent leur présence pour valider le Étrog (voir Michné Halakhot 15, 222), et que ce soit d’ailleurs l'une des raisons pour lesquelles certains évitent les Étroguim du Maroc, la Halakha et la coutume ne retiennent pas cette exigence.
En effet, nos Sages mentionnent bien les graines dans les Étroguim (voir Tossefta Troumot 1, 2 ; Rambam Hilkhot Ma'asser Chéni 11, 11, ainsi que Rachi, Tossafot, Roch, Ran sur Soucca 36a et autres). Toutefois, cette présence n’est pas considérée comme un critère indispensable rendant le Étrog non-Cachère.
De même, bien que nos Sages parlent du parfum du Hadass (Vayikra Rabba 30, 12), personne n’a jamais exigé qu’un Hadass dépourvu d’odeur soit invalidé.
Il est néanmoins intéressant de relever que le Ménorat Hamaor (1, 131) compare les quatre espèces aux quatre éléments : feu, air, eau et terre. Il associe les graines du Étrog à la poussière. Selon cette lecture symbolique, on pourrait en déduire une nécessité des graines. Mais halakhiquement, ce critère est difficile à intégrer.
La même problématique se pose d’ailleurs à propos des raisins sans pépins. La Halakha finale – bien que discutée – est de les considérer comme des raisins valides (voir Sdé 'Hémed Péat Hachoul'han 40, 23 ; Kaf Ha'haïm 272, 40 ; 'Hazon 'Ovadia 1, 6).
Ainsi, tous les Rabbanim ayant validé les Etroguim marocains – qui, parfois, ne contiennent pas de graines – ne considéraient pas leur absence comme problématique.
Sur la question du jus :
Aucune source explicite ne permet de conclure que la présence de jus dans un Étrog est un critère de Cacheroute, à l’instar de ce que nous avons vu pour les graines.
Certains ont exprimé une certaine perplexité à ce sujet (Techouvot Véhanhagot, 1, 382), mais le Étrog yéménite, bien qu’il contienne du jus à l’origine, le réabsorbe rapidement par la suite (Pisské Harav Its'hak Ratsabi, 204, qui en témoigne).
Par ailleurs, si nous comparons le Étrog à un fruit, c’est à la pomme qu’il est comparé (Tossafot sur Chabbath 88a), fruit qui ne contient pas davantage de jus qu’un Étrog.
À noter également que le 'Hazon Ich (Or'hot Rabbénou 15) préférait justement le Étrog yéménite précisément parce qu’il contenait peu de jus — critère positif à ses yeux. Certains évitent même les Étroguim trop juteux, y voyant un signe possible de greffe.
Nos Sages mentionnent souvent le pressage de fruits (voir Chabbath 144a), mais jamais celui du Étrog. Le citron, en revanche, est explicitement cité (voir Beth Yossef et Choul'han Aroukh, Siman 320). Cela semble indiquer que le Étrog ne contient pas une quantité de jus suffisante pour justifier un tel usage.
Enfin, si le jus était un critère halakhique, alors un Etrog ayant perdu son jus serait invalidé. Or, la Halakha statue clairement qu’un Etrog vidé de son jus reste Cachère (voir Choul'han Aroukh, début du Siman 648, et 'Hazon Ich fin du Siman 147).
Sur la position des graines :
Il est vrai que le Olat Chabbath évoque la position des graines comme élément de distinction entre Étrog et citron. Pourtant, le Bikouré Ya'acov atteste avoir vu des Étroguim Cachères dont les graines étaient disposées comme celles des citrons. J’ai moi-même constaté ce fait sur plusieurs Étroguim, notamment marocains.
Il apparaît donc que lorsqu’on a une Massoret claire (tradition ininterrompue) quant à la nature de l’arbre et de son fruit, ce critère devient secondaire.
Caractéristiques spécifiques du Étrog yéménite :
Le Étrog yéménite présente deux caractéristiques conformes aux descriptions de nos Sages (Soucca 35a) :
1. Sa peau est épaisse, ce qui correspond à l’idée que le goût du fruit est semblable à celui de son arbre.
2. Il reste sur l’arbre toute l’année, sans être soumis à une saisonnalité, conformément à ce que dit la Guemara : "Étrog Yéch Lo Pérakim" – il n’a pas de saison définie (voir le livre du Rav Ben Chim'on, Arba'at Haminim Kéhilkhatan).
Ces caractéristiques ne se retrouvent pas dans les autres Étroguim courants.
Il y aurait encore beaucoup à dire, notamment sur :
- L’absence de Pitam (voir Rama 648, 7),
- La couleur verte (Choul'han 'Aroukh 648, 21),
- Ou encore l’amertume extrême du fruit, qui le rend impropre à la consommation (Beer Hagola 649, 3, Maguen Avraham 20 et autres)
Mais je me suis limité à répondre à vos questions.
Conclusion :
Le Étrog yéménite, à condition que l’on soit certain qu’il n’a pas été greffé, est Cachère sans conteste. La minorité de décisionnaires ayant tenté de l’exclure n’a pas été retenue, et la majorité écrasante, parmi lesquels le 'Hazon Ich, le Rav de Brisk, le Rav Kadouri (voir Divré Its'hak p. 278), l’ont utilisé personnellement et le recommandaient.
Voir aussi : Responsa Rivevot Ephraïm 8, 255, Alé Tamar chap. 3, qui réfutent toute suspicion de greffe pour cette variété. Mieux encore, la Massoret entourant ce Étrog remonte à une époque très ancienne (voir Mayim 'Haïm tome 3, Siman 23).
Kol Touv.