Comme je reçois de nombreuses lettres évoquant divers problèmes de Chidoukhim, de personnes au background varié, il semble bien que les difficultés abondent dans ce domaine.

Si nous remontons à la genèse de notre histoire, au tout premier père juif de l’humanité, nous découvrirons que même alors, les difficultés existaient. Notre ancêtre Avraham a dû surmonter toutes sortes d’obstacles pour trouver à son fils sa Basherte, celle qui lui était destinée. A première vue, il paraît incompréhensible qu’Avraham qui avait une « ligne directe » avec Hachem et était l’un des hommes les plus riches, les plus respectés et les plus puissants de sa génération, ait pu avoir des difficultés à trouver un parti pour son fils, en particulier sachant que son fils Its’hak était un homme princier : brillant, intelligent, et au caractère impeccable. Néanmoins, en dépit de tous ces atouts, Avraham était soucieux et demanda à Eliézer, son fidèle serviteur et administrateur de ses biens, de prêter serment afin qu’il ne fasse pas de compromis pour le Chidoukh d’Its’hak. Relevez bien qu’Avraham n’avait jamais demandé un tel « serment d’allégeance » pour la gestion de ses vastes biens…l’argent, les biens immobiliers, le bétail avait peu d’importance à ses yeux. Mais il savait que le Chidoukh serait une décision des plus déterminantes dans la vie qui aurait un impact, non seulement sur son fils, mais sur toutes les futures générations également. L’exemple d’Avraham communique une leçon pour tous, valable en tout temps : trouver un conjoint approprié pour nos enfants doit être la plus grande priorité de chaque parent. Eliézer apprécia le caractère exceptionnel de cette mission et pria pour être guidé par D.ieu, car il comprit que même un homme tel que son maître, qui était saint et vertueux, avait besoin de l’aide et de l’intervention divine. Outre la prière, Eliézer conçut un test décisif qui devait lui indiquer s’il se trouvait sur la bonne voie. Le but de ce test pouvait se résumer en un mot : le ‘Hessed, la bonté. La jeune fille dotée de ce trait de caractère serait une épouse appropriée pour Its’hak.       

Des siècles se sont écoulés et nous avons oublié cette leçon, issue de la maison de notre patriarche, et nous rencontrons de graves difficultés. On admettra que l’exemple d’Avraham n’a pas été totalement abandonné. Dans une certaine mesure, il est maintenu dans de nombreux cercles. Dans les communautés de Torah, les parents font encore des Chidoukhim pour leurs enfants leur priorité numéro 1. Mais malheureusement, l’épreuve de vérité du serviteur d’Avraham a été abandonnée. Aujourd’hui, ce n’est pas le ‘Hessed - la bonté, les bonnes Midot - les bons traits de caractère, qui sont le facteur le plus décisif lorsqu’il s’agit de former un Chidoukh. Aujourd’hui, ce qui est plus important n’est pas ce qui est dans le cœur de la fille, mais dans les poches de ses parents, et plus important que la mesure de sa bonté, est la mesure de son apparence ; nous avons donc perdu de vue le critère le plus déterminant dans la recherche d’un Chidoukh.   

Dans le monde laïc, le problème est encore plus grave. Là, les parents ne s’impliquent pas du tout. Les jeunes gens doivent se débrouiller seuls et ils n’ont pas grand-chose à chercher, à part cette recherche d’« alchimie » : c’est le critère pour trouver leur partenaire pour la vie. Trop souvent, lorsqu’ils pensent avoir trouvé cette alchimie, ils commencent une relation intense jusqu’à ce qu’ils vivent une rupture qui les laisse blessés, meurtris, solitaires et dévastés.

Le monde des Baalé Téchouva a développé sa propre communauté de célibataires centrée autour du Kirouv - des activités comme des dîners de Chabbath, des fêtes et des événements spéciaux.  A première vue, tout ceci semble positif, mais rien n’est si simple. Souvent, ces programmes se sont avérés contre-productifs pour effectuer des Chidoukhim. Les célibataires deviennent trop à l’aise dans les nombreuses activités proposées : à travers ces événements, les célibataires deviennent « amis » et lorsqu’une possibilité de Chidoukh se présente, la réponse est : « Merci, mais nous nous connaissons déjà - nous sommes simplement amis. » Et le résultat, c’est que dans des communautés comprenant une grande population de Baalé Téchouva, il existe de nombreuses activités, mais peu de mariages.      

Les années passent rapidement et les célibataires font la transition de la vingtaine à la trentaine, puis à la quarantaine, puis à la cinquantaine. Les jeunes filles sont limitées par leur horloge biologique, tandis que les hommes refusent de reconnaître leur horloge biologique, car même s’ils prennent de l’âge, ils sont toujours à la recherche de jeunes filles plus jeunes pouvant avoir des enfants. De plus, les jeunes filles sont clairement désavantagées…les garçons reçoivent bien plus de recommandations, tandis que les filles (à moins d’être issue de familles riches ou prestigieuses et d’être très attirante) ont du mal. De plus, une fois qu’une jeune fille a passé un certain âge, ses chances diminuent, mais ce n’est pas nécessairement vrai pour les hommes. Néanmoins, très souvent, avec le passage du temps, lorsque ces hommes prennent de l’âge, ils deviennent ancrés dans leurs habitudes et il devient encore plus difficile pour eux de faire le saut jusqu’au mariage. Ce principe est valable pour tous les segments de la population. Nos Sages ne nous ont pas recommandé en vain de marier nos enfants jeunes, de sorte que les jeunes couples progressent ensemble et s’adaptent aux habitudes de chacun.

Quelle est la solution ?

Il n’y a pas de solution miracle, mais il y a des mesures à prendre pour faire une différence. Inspirons-nous de l’exemple de notre ancêtre Avraham. Idéalement, tous les parents doivent jouer un rôle actif dans les Chidoukhim. Mais, lorsque les parents sont absents, un remplaçant doit prendre leur place, que ce soit un Rav, une Rabbanite, un bon ami ou un Chadkhan. La communauté peut égaler jouer ce rôle de substitut et s’impliquer davantage. De nos jours, de nombreux individus et organismes tentent de se lancer dans cette entreprise, et un nombre croissant de gens sont conscients du problème, mais néanmoins, l’aide accordée n’est qu’une goutte dans l’océan. Chaque Juif bienveillant doit prendre la responsabilité d’agir en tant que Chadkhan concerné et affectueux, tel un parent de substitution. J’ai souvent mentionné que mon propre père, le Rav et Gaon Rav Avraham Halévi Jungreis zatsal ne quittait jamais la maison sans son petit carnet. « On ne sait jamais qui je peux rencontrer et faire un Chidoukh pour untel… », disait-il, et il insistait pour assister à chacun de mes cours à Hinéni (en dépit de sa maladie et son incapacité à  marcher) pour qu’il puisse donner du ‘Hizouk, des encouragements aux célibataires.    

Mais les célibataires doivent aussi faire leur part. Trop souvent, ils reçoivent des recommandations, mais les ignorent. Ils avancent toutes sortes de piètres excuses : « Nous avons joué au jeu du téléphone », « Nous avons été tellement occupés, » etc… S’ils sont réellement intéressés à faire un Chidoukh (et chaque célibataire doit l’être) alors ces excuses ne tiennent pas la route. De plus, lorsqu’ils sortent en rendez-vous, ils doivent s’abstenir de faire des jugements à l’emporte-pièce. Les premières impressions peuvent être trompeuses. Tout le monde n’est pas capable de se présenter sous une lumière positive. La timidité, la nervosité, l’anxiété, tout entre en jeu, alors tentez toujours de donner une seconde chance. Adoptez l’épreuve d’Eliézer et faites des bons traits de caractère la priorité numéro 1 lorsque vous recherchez un conjoint. Lorsque le ‘Hessed est la priorité, tout le reste se met en place, mais en son absence, tout sera voué à l’échec, car même le plus beau visage peut tourner au vinaigre ou devenir répugnant lorsque l’insensibilité remplace la sensibilité et la méchanceté remplace la bonté.                   

Les célibataires doivent être réalistes sur eux-mêmes et ne pas attendre la perfection dans des domaines où ils sont eux-mêmes imparfaits (Je suis toujours étonnée de voir que les gens ne se regardent pas eux-mêmes). Et surtout, les célibataires doivent suivre l’exemple d’Eliézer qui a adressé une prière à D.ieu pour qu’Il lui envoie le bon Chidoukh. Nos Sages nous enseignent que Min’ha, la prière de l’après-midi, est particulièrement favorable aux Chidoukhim, car notre patriarche Its’hak priait Min’ha lorsque Rivka apparut. Enfin, les célibataires doivent veiller à ne rencontrer des potentiels candidats que dans le but du mariage, et non pour s’amuser. Prolonger cette période des rencontres leur vole non seulement leurs plus belles années, mais induit aussi les autres en erreur, ce que personne ne souhaite.

Avec l’aide de D.ieu, puissent tous les célibataires trouver leur Basherte, leur âme sœur, afin que notre peuple juif puisse se développer et prospérer de génération en génération.