Bien que le divorce soit devenu une triste réalité dans la vie juive en Amérique, non seulement ce n’est pas la solution à une situation difficile, mais plus souvent, il génère des difficultés plus grandes. J’ai reçu la lettre d’une divorcée au cœur brisé qui déplorait son sort et remettait en question l’apathie de ses amies, de ses proches et de sa communauté, ainsi que l’attitude du Beth Din (tribunal rabbinique). Elle se sentait blessée, déçue, désillusionnée et abandonnée. Voici ma réponse:

Ma chère amie,

J’ai personnellement été témoin des expériences de nombreux couples qui, après avoir choisi cette option, m’ont secrètement confié que s’ils avaient su alors ce qu’ils savaient maintenant, ils ne se seraient jamais embarqués dans cette voie destructrice. La Torah accorde une place au divorce, car dans certains cas, la relation entre le mari et la femme est si intenable que seul le Guet (divorce religieux) est la solution viable : mais dans la majorité des cas, un peu de Méssirout Néfech - de sacrifice et de dévouement sont nécessaires pour sauver le mariage. Il est écrit que lorsqu’un mari et sa femme divorcent, le Mizbéa’h, l’autel lui-même verse des larmes. La question se pose : pourquoi seulement l’autel ? Pourquoi pas la Ménora ?  Pourquoi pas l’arche ? En effet, l’autel est le lieu où les sacrifices étaient apportés et c’est précisément la raison pour laquelle l’autel prend le deuil, comme pour proclamer : « Si le mari et la femme avaient fait plus d’efforts, s’ils avaient offert un sacrifice plus grand, leur mariage aurait pu être sauvé. » Hélas, ils découvrent trop tard qu’ils ont détruit ce qui était le plus précieux dans leur vie : leur foyer, leurs enfants et leur famille.

Notre société a glorifié le divorce, en insinuant que les membres du couple peuvent renaître et tout recommencer à zéro, mais dans la réalité, ça ne se passe pas de cette manière. Les problèmes anciens persistent, sous des formes différentes certes, et ils se compliquent par de nouvelles réalités qui sont plus douloureuses à gérer, car désormais, il y a des enfants traumatisés, blessés, des ex, et deux familles distinctes à gérer, sans parler du poids financier et affectif. J’ai une fois entendu un éminent avocat spécialiste du divorce déclarer qu’un mauvais mariage est presque toujours mieux qu’un mauvais divorce. Il est douloureux pour les enfants d’affronter le « mari » de maman, la « femme » de papa, un Chabbath ici, une fête là. Qui paiera pour ceci ? Qui en assume la responsabilité ?  Trop souvent, les enfants du divorce souffrent dans leur vie scolaire et sociale, et finissent par passer des années en thérapie. Si l’on veut que les enfants se sentent « bien dans leur peau », ils ont besoin d’un foyer et non de deux, d’un père et d’une mère et non de deux mères et deux pères - ou le petit ami de maman et la petite amie de papa. Ils ont besoin de deux parents unis à leurs côtés.

Le divorce est une situation triste, sans vainqueur. Il n’y a pas de Mazal Tov à la fin du processus ; personne n’en ressort heureux ou victorieux. En conséquence, il arrive souvent que le porteur de mauvaises nouvelles, le Beth Din, devienne le bouc émissaire de la colère et la douleur que les parties ressentent pour avoir reçu, d’après leur jugement, un traitement sans ménagement.

Néanmoins, le Beth Din est le seul véhicule en notre possession pour arbitrer nos conflits. En tant que Juifs respectueux de la Torah, nous devons tenter d’éviter les tribunaux laïcs et devons prendre toutes les précautions possibles pour ne pas miner l’autorité du Beth Din.

Alors quelles suggestions constructives puis-je vous donner ?

Les couples qui envisagent le divorce doivent repenser leurs options et explorer toutes les possibilités avant de s’embarquer dans ce choix désastreux. Ils doivent consulter des thérapeutes engagés dans la Torah ou des Rabbanim et Rabbanites réputés pour parvenir à réunir des époux déconnectés. Les conjoints doivent également se poser la question : « Serais-je heureux si je reste célibataire pour le reste de mes jours ? » C’est une possibilité réelle à envisager, et si c’est le cas, ne serait-il pas mieux de rester marié ?

Des amis et proches bien-intentionnés qui veulent montrer leur soutien doivent faire preuve d’une grande prudence. Des phrases telles que : « Tu es jeune, tu es attirante, tu rencontreras quelqu’un qui t’appréciera » peuvent induire en erreur les conjoints et leur faire penser qu’un super parti les attend, alors qu’en réalité, il n’en est rien. Ironiquement, après le divorce, ces mêmes voix qui leur avaient assuré d’un superbe avenir, disparaissent très rapidement de la scène, laissant les divorcés se débrouiller seuls. Il faut admettre que certains réussissent à se remarier (plus d’hommes que de femmes), mais ce sont des exceptions et il leur reste à affronter une nouvelle série de problèmes, en particulier lorsqu’ils doivent gérer la dynamique de ses enfants à lui ou à elle… ce n’est pas du tout évident.

Vous mentionnez dans votre lettre qu’un « ami » a recommandé à votre mari de quitter temporairement le domicile conjugal pour voir comment il se sent, et que son thérapeute a approuvé cette idée. Comme vous l’avez-vous-même souligné, c’était le pire conseil possible, car une fois cette étape franchie, le feu vert a été donné pour partir. Si, au lieu de conseiller votre « ex » de partir, cet ami avait usé de son influence pour l’aider à éviter de fréquenter les discothèques et les filles, et si au même moment, il l’avait surveillé de près, et si le thérapeute avait censuré cette conduite et s’était opposé à l’idée de s’installer ailleurs, la situation aurait pu tourner autrement. Lorsque les amis découvrent des problèmes dans un mariage, ils ont la responsabilité de tout faire sur le plan humain pour éviter cette tragédie. Au lieu de tendre une oreille sympathique à un conjoint qui dévie, ils doivent lui passer un savon et lui demander de se conduire avec maturité. Ils doivent lui rappeler qu’il ou elle ne trouvera jamais son bonheur en détruisant les autres…en divisant leur famille, et s’ils s’obstinent, ils découvriront au final que non seulement ils ont détruit leur famille, mais aussi leur propre vie. Les gens sont très sensibles à la pression sociale et si les amis se montrent fermes et secouent l’individu récalcitrant en le mettant face à la réalité tragique du divorce, ils peuvent sauver un mariage. Enfin, si nous voulons endiguer la vague des divorces, nous devons retourner à la voie de la Torah et respecter les lois de Tsniout, pudeur. De nombreux divorces et tragédies auraient pu être évités si les couples avaient adhéré aux enseignements de nos sages qui limitent les amitiés entre hommes et femmes aux maris et femmes. Nous sommes devenus beaucoup trop tolérants envers des conduites inappropriées et avons adopté le jargon contemporain selon lequel l’amour et le bonheur justifient tout. D’après votre lettre, il est évident que votre triste situation n’est pas survenue du jour au lendemain. Votre mari s’est relâché dans son observance, il rentrait à la maison aux petites heures du matin, souvent saoul. Pourquoi n’a-t-il pas été stoppé avant que le malheur ne se produise ?  La responsabilité juive exige que si l’on voit un méfait, il faut parler et si nous n’en sommes pas capables, nous devons nous adresser à un Rav de confiance.    

Quant à votre fille rejetée par son école, je m’associe à votre douleur. Les enfants qui ont des problèmes à la maison ont besoin d’un soutien affectif et non d’un rejet. Dans mon travail de Kirouv (rapprochement des Juifs au judaïsme), j’ai découvert qu’un peu d’amour joue beaucoup. Je ne suis en aucun cas pour rejeter les enfants. Après Auschwitz, où nous avons perdu plus d’un million de nos enfants, puissions-nous ne pas être responsables de la destruction d’une Néchama (âme) juive. J’espère que cette lettre secouera les lecteurs, induira une introspection et incitera ceux qui ont des difficultés de couple à repenser le divorce. Il n’y a qu’une seule direction dans laquelle les couples mariés peuvent avancer : consolider leur famille et leur engagement envers leur époux (à moins, que D.ieu préserve, qu’il s’agisse d’une situation qui exige la dissolution du mariage).

J’espère que dans le sillage de cet article, nous serons plus scrupuleux dans notre adhésion aux lois de la Tsniout en nous protégeant des nombreuses tentations de notre société. Puisse Hachem accorder à tous les couples le Chalom Bayit, l’entente conjugale.

Quant à votre situation actuelle, et la manière dont vous pouvez traiter les problèmes, j’espère les aborder dans un futur article.