Les sentiments d’un homme sont influencés par ses actions. Pourtant, tant d’enfants de bonne famille ‘filent un mauvais coton’ ! Petit, cet enfant est éduqué selon une déontologie bien définie, peut-être même, avec un niveau de pratique religieuse très démarqué. Et dès son adolescence, il saisit toutes les occasions pour fuir ses devoirs moraux ! Pourquoi ? N’est-ce que l’influence néfaste du voisin ? Pourquoi s’obstine-t-il dans ce cas à se montrer plus délinquant que son copain ?! Pourquoi la règle évoquée par le Sefer ha’Hinoukh est-elle tant de fois démentie ? Après réflexion, cette question n’est-elle pas tout simplement la remarque du Rav Dessler sur le prisonnier-'ascète' ? Ce dernier a lui aussi vécu pendant 20 ans coupé de tout désir matériel; une fois libéré, il redevient en quelques heures une bête bien plus féroce qu’à son entrée, sans la moindre retenue face à la tentation. Pourquoi ?

Il est évident que la règle est toujours vérifiée, le cœur ne cesse de se faire influencer de l’action. Le problème est : quel aspect de l’action l’a-t-il influencé ? En effet, chaque action même bonne dans l’absolu peut être motivée par toutes sortes d’intérêts. Prenons l’exemple d’un pauvre qui me demande une pièce. Si je la lui donne parce que je comprends qu’il faut aider mon prochain, j’ai effectivement renforcé ma sensibilité à l’autre. Mais si je la lui donne parce qu’il m’exaspère, et espère ainsi m'en débarrasser, j’ai tout simplement renforcé dans mon cœur le dédain pour les parasites qui vivent sur le compte des autres. Et si je la lui donne pour qu’un spectateur remarque ma générosité, je sortirai de ce geste bien fier et enorgueilli. Et si toutes ces raisons motivent mon geste, chacun de ces sentiments aura été renforcé proportionnellement dans mon cœur.
 

Idem pour le prisonnier : tant qu’il ne perçoit que l’aspect ‘privation’ de son isolation, sa captivité décuple de façon exponentielle son désir de croquer la vie. Une fois sorti, il doit impérativement assouvir ses désirs ardents. Certes, il arrive qu’il intègre aussi l’importance de ne plus se faire attraper ‘la main dans le sac’, mais il n’intériorisera jamais la nécessité de vivre avec moralité.