Il aura suffi d’un cours de Torah, un soir, dans une petite ville de l’Est des Etats-Unis pour que la vie de Dina Stern change profondément et avec elle, celle de toute sa famille.

Le partage de connexion

Si Dina, heureuse épouse et mère de deux enfants, s’était retrouvée dans la grande salle de la synagogue ce soir-là, c’était avant-tout par politesse. Elle avait croisé la femme du rabbin au supermarché quelques heures plus tôt et n’avait pas eu le courage de décliner l’invitation.

Quand le cours commença, la jolie trentenaire espérait secrètement ne pas trop bailler d’ennui en entendant le rabbin annoncer le thème du cours. Elle était loin de se douter qu’elle serait en fait la dernière à quitter la salle.

Car, dès les premières paroles de Torah, Dina se sentit vibrer de l’intérieur. Un sentiment aussi étrange qu’incroyable.

Comme si une partie de son être se réveillait après un trop long sommeil, elle avait la sensation qu’une connexion immédiate s’établissait avec les enseignements de Torah.

Et c’est bien trop vite selon elle que le cours arriva à sa fin. En se dirigeant vers sa voiture, Dina réalisa qu’elle n’avait qu’une hâte : rentrer chez elle faire le récit incroyable de cette expérience à son mari David.

Tout le long du chemin du retour elle fut bien occupée à lister mentalement à tout ce qu’elle voulait lui dire pour être sûre de n’oublier aucun détail de ce moment si fort.

Mais à son grand étonnement, une fois rentrée, la réaction attendue ne fut pas au rendez-vous !

“Voyons Dina, ok tu as trouvé le thème du cours à ton goût, mais tu ne trouves pas que tu en rajoutes un peu ?

-       Mais chéri, en écoutant le rabbin ce soir j’ai réalisé que la Torah est comme un GPS qui montre à chaque juif la route à suivre. Je vois les choses avec un oeil nouveau. C’est incroyable !”

Non seulement il ne faisait pas écho à ce qu’elle ressentait, mais pire ! Il lui exprima clairement son désintérêt pour le sujet :

“Ma chérie, méfie-toi de tous ces rabbins qui veulent te convaincre avec leurs paroles. Je ne comprends pas que tu t’emballes pour un sujet si peu motivant.”

Quelle déception ! Elle se sentit si seule tout d’un coup. Et c’est confuse et triste que Dina monta se coucher ce soir-là.

Déployer toutes les méthodes

Le lendemain, plus déterminée que jamais, Dina sauta hors du lit. Elle n’avait pas fermé l’oeil de la nuit et était arrivée à la conclusion qu’il suffisait simplement de trouver la bonne méthode pour réussir à convaincre son mari.

David et elle avaient toujours été si complices jusqu’à maintenant. Sûrement qu’elle n’avait pas bien su s’exprimer la veille. Peut-être que si d’autres se chargeaient de lui montrer la beauté de la vie juive, il pourrait alors mieux comprendre ce qu’elle avait tant cherché à lui communiquer.

Elle se mit à penser au Chabbath, le moment le plus saint de la semaine. Dans sa tête, une idée prit forme : “Impossible - pensa Dina - qu’en voyant la beauté qui se dégage des tables de Chabbath, il reste insensible”.

Elle décida d’inviter des familles pratiquantes le vendredi soir suivant. Toute la semaine, Dina se consacra à ordonner sa maison et à cuisiner de bons petits plats.

Les mois passèrent et Dina continuait avec délectation à progresser dans l’apprentissage de la Torah et des Mitsvot.

Et au fur et à mesure, elle avait même réussi à intégrer sa famille à la vie communautaire du quartier. Les enfants se faisaient de nouveaux amis, elle-même se découvrait beaucoup de points communs avec ses voisines juives et son mari se montrait toujours sociable et agréable lorsqu’ils recevaient à la maison. 

Mais si leur vie sociale s’épanouissait, l’attitude de son mari semblait - elle - stagner dans un constant désintérêt pour tout ce qui avait trait à la Torah.

Dina continua d’assister à des cours à un rythme régulier et instaura le respect de certaines pratiques à la maison, comme celui de la Cacheroute des aliments avec la mise en place de vaisselle séparée, et au bout de quelques temps, suivit l’inscription des enfants dans une école religieuse.

Paradoxalement, la tension dans son couple augmentait. A chaque fois qu’elle abordait de près ou de loin le sujet du judaïsme avec David, la discussion finissait toujours par une incompréhension mutuelle et chacun se sentait plus seul que jamais.

Après quelques années, c’est épuisée et démotivée que Dina dût se rendre à l’évidence : le déclic n’arrivait pas et David n’était pas plus intéressé qu’au premier jour.

C’était donc ça la Téchouva ? Au lieu d’avancer ensemble dans une démarche si positive, le rapprochement vers Hachem était-il en fait synonyme de frustrations et de peines ?

Tout comme Dina, nombreux sont ceux qui s’interrogent : Comment instaurer la Téchouva au sein de notre couple quand l’un des deux membres ne manifeste aucun intérêt ou pire, rejette ce changement ?

Se changer soi-même avant de vouloir changer l’autre

Pour y voir plus clair, il faut comprendre que la priorité est d’abord de se concentrer sur sa Téchouva personnelle et de s’y sentir bien.

L’histoire personnelle du ‘Hafets ‘Haïm en est un très bon exemple. Au XIXème siècle, le jeune russe Israël Méir Kagan décida qu’un jour, il changerait le monde. Mais face à l’infinie difficulté de la tâche, il  dut revoir son projet à la baisse et décida de changer son pays.

Là encore le projet étant trop vaste, il se concentra sur son village. Visant toujours trop haut, il se dit qu’il allait se limiter à changer sa famille. Et même ce “modeste” objectif était encore trop ambitieux ! C’est ainsi qu’il comprit qu’il devait uniquement se préoccuper de se changer lui-même.

Ironiquement, en appliquant les enseignements de la Torah sur sa personne, il changea ses traits de caractère et ses attitudes et cela créa une onde de magnitude si forte qu’elle résonna non seulement auprès de sa famille, de son village mais aussi de son pays jusqu’à faire changer les Juifs du monde entier même longtemps après sa mort.

Cela prit du temps, mais Dina prit conscience qu’elle était passée à côté de ce point essentiel : elle devait d’abord vivre sa propre Téchouva avant de vouloir la faire naître chez son mari.

La Téchouva ? Un privilège !

Ce fut une autre grande leçon de vie pour Dina : en réalité, la Téchouva n’est pas uniquement une démarche de l’homme envers Hachem. Pour le comprendre, il faut voir la Téchouva comme un cadeau que Hachem réserve à certains d’entre nous (comme le Rambam l’enseigne dans son livre sur la Téchouva).

C’est pour cela qu’on retrouve ce conseil merveilleux dans les Téhilim du roi David : nous devons prier constamment pour recevoir l’aide Divine afin de développer nos capacités à faire Téchouva.

Alors Dina se mit à prier chaque jour pour se renforcer dans sa Téchouva et essaya de travailler ses traits de caractère. Elle apprit à accepter son mari malgré leurs différences.

C’est ainsi qu’elle finit par réaliser avec tendresse que même si David n’avait pas suivi le même parcours qu’elle, il avait néanmoins fait beaucoup de sacrifices toutes ces dernières années pour préserver l’harmonie de son couple.

Elle arrêta de lui mettre la pression sur la Téchouva et trouva beaucoup d’autres sources de complicité.

De son côté, David put apprécier le calme retrouvé à la maison. Avec le temps, il constata  que la sérénité de sa femme grandissait un peu plus chaque jour à mesure qu’elle trouvait de la joie dans l’accomplissement des Mitsvot. C’est alors avec étonnement qu’il comprit qu’il se sentait enfin prêt à intensifier sa pratique du judaïsme si cela pouvait lui permettre d’expérimenter le même bonheur que sa femme.

Après plusieurs années, David et Dina finirent enfin par construire ce foyer juif qu’ils avaient, chacun à leur façon, tant désiré.

‘Haya B.