Question d’une internaute : Je suis un peu désemparée. Je viens de découvrir que mon fils de 18 ans fume. Je l'ai une première fois surpris en train de se rouler une cigarette. En discutant ce matin un peu plus avec lui, je me rends compte qu'en fait, il fume non seulement du tabac mais aussi du cannabis chaque fois qu'il est en soirée. Il dit qu'il n'est pas accro car s'il n'y a pas de soirée pendant 2-3 semaines, il n'en ressent pas le besoin. Mais je sais que ce genre de substances détruit le cerveau ! Il doit passer le bac cette année, commencer ses études et j'ai tellement peur qu'il gâche tout à cause de ça ! Je ne sais pas quoi faire. Je sens que si son père et moi l'empêchons de fumer, cela l'attirera encore plus. Aidez-moi Mme Seyman !

La réponse de Mme Nathalie Seyman

A une époque où les enfants se marient de plus en plus tard, la période d’adolescence s’est par conséquent allongée. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) considère qu’elle se situe entre 10 et 19 ans. Moi, je rajouterais qu’elle s’arrête lorsque votre enfant devient réellement responsable, tant envers les autres qu’envers lui-même. En attendant ce passage, on ne peut se soustraire à une certaine autorité, mais comme toujours avec les adolescents, en passant par le dialogue.

Quels dangers ?

Avant toute chose, il est important d’avoir en main toutes les informations sur le problème que l’on rencontre. Qu’est-ce que le cannabis ? Quels effets produit-il ? Est-ce dangereux ? Afin d’être crédible et d’avoir de l’influence sur son adolescent, il faut s’assurer d’être toujours plus informé que lui.

Le cannabis est une plante dont les feuilles donnent l’herbe (ou marijuana) et dont la résine donne le haschich (ou shit). Il induit une sensation de relaxation ainsi qu’un sentiment d’euphorie qui dure entre six et huit heures. Les réflexes sont ralentis, d’où l’interdiction de conduire sous son effet (sous peine d’augmenter par trois les risques d’accident de la route). Plus précisément, le haschich amplifie l’état émotionnel dans lequel on se trouve. Ainsi, quand on fume en étant stressé ou déprimé, on peut provoquer un état de plus grande anxiété avec des migraines, des vertiges, des vomissements…  Et cela peut amener à une véritable perte de maîtrise de soi et des troubles de la personnalité.

Pour les utilisateurs récurrents, cela peut s’avérer très dangereux : une consommation régulière provoque fatigue, état dépressif, distorsion de la réalité, hallucinations. Et à long terme, s’installe un "syndrome amotivationnel" : le fumeur est constamment morose et ne s’intéresse plus à rien ; il devient apathique.

Il y a moins de conséquence si l’utilisation est occasionnelle mais il faut savoir qu’il suffit d’un joint par semaine pour que la toxicité du cannabis s’accumule dans le sang et endommage la mémoire, l’attention et la concentration.

Il est vrai que la consommation de cannabis ne fait pas forcément basculer vers les drogues dures. Mais cela reste un risque à considérer car ceux qui vendent du cannabis vendent aussi de l’ecstasy et autres drogues bien plus dangereuses. Le pas peut donc plus facilement être franchi...

Même si la consommation du cannabis s'est banalisée, en particulier auprès des jeunes de cette génération, je pense personnellement que c'est un produit dangereux contre lequel il faut prémunir nos adolescents et jeunes adultes.

L’autorité passe par le dialogue

Avant tout, il faut savoir que, paradoxalement, un adolescent a besoin, et même souhaite au fond de lui, que vous lui fixiez des limites. Mais il a besoin de comprendre les règles pour pouvoir les appliquer. Si ses parents lui fournissent des arguments logiques et des règles raisonnables, et s’il sait qu’ils veilleront à les faire respecter, sans excès, alors il aura moins tendance à les contredire et à désobéir. Il faut prendre le temps d’en discuter avec lui. À l’inverse, des parents qui ne fixent aucune limite donnent à leur ado l’impression de ne pas se soucier de lui, ce qui induira plus facilement une révolte.

En règle générale, un parent ne devrait jamais autoriser son enfant à fumer ou à boire. Au sujet du cannabis ou de la cigarette, le droit des parents reste d’interdire de fumer chez eux et devant eux. Car au-delà des effets néfastes sur la santé, il s’agit de poser une limite à leur enfant. Le fait qu’il fumera dehors ou en cachette ne doit pas vous empêcher de lui poser ces limites. Pour cela, il faut lui expliquer en priorité les dangers qu’il encourt avec cette habitude que vous ne pourrez jamais tolérer. Un jeune qui a confiance en ses parents et sent leur autorité légitimée par le désir de le protéger, sera réceptif à leur message de prévention.
Ensuite, il faut poursuivre le dialogue afin de comprendre pourquoi il ressent le besoin de fumer : est-ce pour se faire accepter par sa bande de copains ? Est-ce parce qu’il se sent stressé, angoissé ? Ou est-ce en quête d’un plaisir artificiel ? En effet, une addiction, quelle qu’elle soit (cigarette, alcool, drogue ou même la nourriture), permet de compenser un manque psychiquement impossible à supporter. Un jeune qui fume, d’autant plus du cannabis qui lui provoque l’anesthésie de sa pensée, ce n’est jamais anodin. Soyez vraiment à son écoute car toute réponse qu’il va vous donner vous mettra sur la voie de son mal-être et sera ainsi l’occasion d’une discussion beaucoup plus profonde.

Enfin, parlez-lui de l’illusion du bonheur trouvé dans les plaisirs artificiels. Toute euphorie provoquée par la drogue finit par disparaître pour être remplacée par une phase de dépression due au contraste avec l’état de joie et la réalité retrouvée. C’est pourquoi un fumeur occasionnel aura tendance progressivement à augmenter sa consommation afin d’entretenir ce paradis artificiel. Mais ce qui est artificiel n’est pas réel. Dans la Torah, il est précisé qu’un bonheur obtenu sans effort n’apporte aucune satisfaction. Les Pirké Avot précisent : ”La récompense vient selon l’effort”. Lorsque nous recherchons des raccourcis au plaisir, sans peine ni effort, nous n’obtiendrons qu’un plaisir stérile, dénué de sens et de profondeur. Et cette sensation artificielle de bien-être s’évaporera aussi vite qu’elle est venue, nous laissant plus abattus qu’à l’origine. Alors qu’une véritable sensation de plaisir, résultat d’effort et de travail sur soi, est la source d’un bonheur plus intense et surtout durable.

Mes conseils

- Établissez un dialogue à trois : vous, son père et lui. Ne prenez pas un ton accusateur ni de colère. Il faut lui montrer que cette discussion est POUR lui et non CONTRE lui.

- Restez ouverte à ce qu’il vous dit. Il faut qu’il puisse tout vous confier. S’il voit que cela vous choque ou que vous dramatisez trop, il ne vous parlera pas. Vous avez besoin de ses explications et de sa façon de voir. Vous y puiserez des éléments précieux pour poursuivre la discussion et savoir quelles solutions apporter.

- Restez ferme. Etre ouvert avec son enfant n’empêche pas d’être clair sur sa position. Il doit bien entendre que vous ne l’autoriserez jamais à fumer et cela sans ambigüité ni compromis.

- Fumez-vous vous-même ? Votre mari ? Si c'est le cas, peut-être serait-il intéressant de réaliser qu'il a peut-être été influencé par vous. Les comportements des parents sont le premier exemple de leurs enfants. Dans ce cas-la, parlez ensemble de cet inconvénient qui n'est pas l'idéal pour vous non plus évidemment, mais que le fait que vous soyez une adulte et lui pas encore, vous donne le droit de faire vos propres choix, et que votre rôle est de le guider.. Mais peut-être devriez-vous tout de même faire une introspection là-dessus et pourquoi pas vous donner un challenge d'arrêter en famille?

- Comme je l’ai dit plus haut, expliquez. Un adolescent est en âge de comprendre les risques sur la santé, l’impact sur les performances respiratoires, les contraintes financières ou encore les effets néfastes sur son physique (l’haleine, la peau et les dents). Sans compter qu’au niveau de la loi, un consommateur de cannabis interpellé par la police est passible d’une peine allant de deux mois à un an de prison et d’une grosse amende : autant d’arguments destinés à le dissuader de fumer…

- Amenez-le chez un médecin spécialiste des addictions : sous prétexte de l’ausculter, il pourra aussi et surtout le sensibiliser et le responsabiliser sur sa santé psychique et physique.

- Réunissez-vous : À côté de cela, montrez-lui que le véritable bonheur se trouve dans la famille. Organisez des vacances ou des sorties ensemble, invitez ses amis, faites des activités en famille...

- Demandez de l’aide. Si vous voyez que votre enfant reste hermétique à la discussion ou que sa consommation révèle une détresse, n’hésitez pas à consulter un thérapeute.

Elever un enfant est ce qu’il y a de plus difficile au monde. Lisez des Téhilim et ressourcez-vous dans la prière lorsque vous sentez que la tâche est trop ardue à supporter. Hachem nous écoute et nous aide. Vous trouverez la solution. Vous seule connaissez votre enfant et si Hachem vous l’a confié, c’est que vous avez le pouvoir de l’amener vers le droit chemin. N’oubliez jamais cela...

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.