À l’heure où des manifestations violentes se déroulent en France, pour protester contre un acte de la police, en Israël pour s’opposer au résultat d’élections démocratiques, aux États-Unis pour protester contre un ancien président, qui refuse le verdict électoral, il n’est pas surprenant que l’on s’interroge sur la relativité d’une législation humaine. Une société, pour subsister, se doit d’ériger des lois qui organisent et régularisent la vie de la société. Depuis Solon le législateur grec jusqu’à Montesquieu, auteur de « L’Esprit des Lois », les tentatives sont nombreuses pour proposer des lois à l’humanité.

À partir de ces prémisses, il est important de savoir distinguer entre une législation, basée sur des réflexions humaines, et une Loi qui relie la créature au Créateur. La Torah ne saurait être une Loi comparable aux législations humaines, puisqu’elle est d’origine divine. C’est d’ailleurs une législation qui définit le peuple. Au début du Livre de Beréchit, dans son premier commentaire sur la Torah, Rachi précise que la Torah n'est pas un livre historique, mais un recueil législatif, c’est-à-dire que le but de la Torah est d’organiser la vie de la créature dans le monde, et non d’évoquer des évènements historiques. Cela signifie que le judaïsme est – objectivement – un texte législatif, car, en nous conformant à la Loi, nous assurons une proximité avec le Législateur divin. Cela explique le fait que, même dans le cas où une loi laïque serait semblable à une loi de la Torah, il serait cependant interdit d’aller se faire juger au Tribunal laïque. En effet, le but de la Torah est toujours d’élever l’homme spirituellement. De ce fait, une législation laïque peut être valable à une époque, et caduque à une autre époque. C’est également la raison pour laquelle les premiers chrétiens décidèrent que les lois de la Torah n’étaient plus valables, car elles étaient trop charnelles, et les lois doivent, selon eux, être comprises spirituellement. Ainsi, pour eux, la législation torahique était devenue caduque.

Dans ces conditions, il est évident que, la législation n’étant pas considérée comme divine, il est possible de changer les lois selon la volonté de l’homme. Une Assemblée législative peut changer des lois qui ont été fixées par une autre Assemblée. Cela explique également la possibilité des révolutions. L’homme peut modifier ce qu’un autre homme avait décidé. Ainsi, par exemple, la Révolution française, en 1789, ou la Révolution bolchévique, en 1917, ont pu transformer des sociétés qui avaient été figées pendant des siècles. Il ne s’agit, en aucun cas, dans cette présentation objective, d’exprimer un accord avec tel ou tel régime, mais seulement de souligner que l’Humain (relatif) peut changer l’Humain (autre relatif). Les bouleversements des derniers siècles s’expliquent ainsi : le relatif change, l’Absolu ne saurait être modifié. Cependant, il y a un autre aspect de la question qui doit être envisagé. Le relatif peut devenir, provisoirement, absolu. Cela signifie qu’une idée fondamentale cherche à se donner un caractère absolu, pour l’humanité entière. C’est le cas de la démocratie, reconnue comme un certain Absolu, pour les sociétés organisées. Bafouée par la dictature, la démocratie – qui trouve son origine dans la civilisation grecque – est plus ou moins reconnue comme une valeur nécessaire pour une société policée. Mais – et c’est essentiellement le problème de notre époque –, voilà que la démocratie est battue en brèche par la rue. La rue veut détruire aujourd’hui ce qu’a fait l’urne, et les manifestations veulent détruire le résultat d’élections démocratiques. La dictature de la rue se veut plus forte qu’une dictature fondée sur un putsch militaire ! Les exemples sont hélas nombreux !

N'avons-nous pas ici précisément la preuve que seul un Absolu divin peut donner un sens réel – et non fictif – à l’histoire de l’humanité ? Quand il s’est agi de distribuer les territoires d’Erets Israël entre les diverses tribus, la Torah nous dit qu’il fallait à la fois faire le partage selon le nombre de la population de la tribu, et aussi selon le sort. Si l’homme fait sa « Hichtadlout » (un effort nécessaire pour prouver sa confiance en D.ieu), Hachem répond par le sort quel doit être le résultat mérité. Les élections sont l’effort de l’homme, le résultat dépend du mérite. Les « démocrates » prétendent faire confiance à la démocratie, quand ils obtiennent les résultats qu’ils désirent. S’ils ne l’obtiennent pas, alors la démocratie n’existe plus : on manifeste pour empêcher les députés élus démocratiquement de légiférer, car les lois qu’ils vont édicter ne correspondent pas à leur conception de la démocratie. L’« absolu » apparent devient relatif. La rue remplace l’urne. Même le Capitole, siège suprême de la démocratie, valeur théoriquement absolue, n’est pas à l’abri de ces attaques. En Israël, ce sont clairement les parangons de la démocratie qui nient le résultat de la démocratie. Y a-t-il une meilleure preuve de la vanité des valeurs « humaines », que de se révolter contre un résultat qui ne correspond pas à nos espérances ? Se révolter signifie clairement que l’Absolu apparent est une FICTION, et ce que l’on désire, c’est détenir le pouvoir. Ce que faisaient autrefois les « putschistes » pour prendre le pouvoir illégalement, ces prétendus démocrates sont aussi des victimes de leur orgueil, ou de leurs ambitions, mais ils ne croient pas en une valeur absolue.

Seule la Torah apporte une réponse absolue à la créature, parce qu’elle est l’objet du Créateur. Toutes les autres idoles – idoles en bois, en pierre, ou idéologies passagères – ne résistent pas à l’épreuve du temps. Le combat actuel de la rue contre l’urne en est un exemple, et illustre une fois de plus le caractère éphémère de l’idéologie face à l’éternité du Tout-Puissant. Est-il de meilleure illustration pour notre époque, pour nous encourager à renforcer notre foi en un Créateur Tout-Puissant Qui désire accorder Ses faveurs à la créature ?