Herzl est un homme profondément croyant, qui pratique la Torah et les Mitsvot. Il est le petit-fils de Rabbi Mess'od Ben Chabbath, qui priait dans la même synagogue que Baba Salé au Maroc.

Il travaille comme chauffeur d'autobus en Israel depuis plus de 28 ans. Les voyageurs réguliers de la ligne le connaissent bien, il fait quasiment partie de leurs proches. Lui-même se soucie de chacun, un peu comme un Papa de l'autobus.

Le matin d'un tragique attentat, Herzl a pris son service comme de coutume. « Le superviseur m'a juste demandé de venir un peu tôt en raison d'un collègue qui était absent. J'ai pris mon service à 6h47 au lieu de 6h52. A la troisième station est montée une femme orthodoxe avec une poussette de jumeaux. Cette dame voyage chaque matin avec ses deux enfants. Habituellement, son mari l'accompagne, mais ce matin-là il était déjà parti à la Yéchiva. Alors je suis descendu du bus pour l'aider à monter la poussette, et j'ai redémarré une fois que je l'ai vue assise. J'ai continué mon trajet comme de coutume, en passant par l'avenue Rothschild jusqu'à la gare autoroutière. »

« Un jeune homme est monté à la station de la société nationale d'électricité. Il n'avait pas spécialement un physique oriental ; il avait du gel dans les cheveux et paraissait très normal. Rien d'extraordinaire. Il n'a pas réussi à introduire de l'argent dans la machine à tickets et s'est acharné sur les boutons. Je lui ai demandé pourquoi il s'énervait ainsi et il a prononcé quelques borborygmes incompréhensibles ; je me suis même dit qu'il était peut-être sourd ou muet. Alors je l'ai calmé et me suis occupé de lui sortir ses tickets. Puis il s'est assis derrière moi. »

Herzl continue de conduire, tout en jetant un œil de temps en temps sur l'intérieur du bus, comme à son habitude. Arrivé à proximité du carrefour Maariv, il constate que tout le trafic est bloqué. Soudain, il lève la tête et se rend compte que le terroriste est en train de le poignarder.

« Sur le moment, je n'ai pas compris ce qui se passait, dit Herzl. J'ai cru qu'il s'était vexé de ma remarque à propos des tickets. Je n'ai pas réalisé que c'était un terroriste. Il m'avait déjà blessé, mais je ne ressentais aucune douleur. Simplement ma chemise blanche était complètement ensanglantée. Apres m'avoir agressé, il s'est déplacé de siège en siège en hurlant "Allah Hou Akbar !" Il poignardait quiconque se trouvait sur son chemin. Dans ce tohu-bohu, je n'ai pas perdu mon sang-froid. Je cherchais comment stopper l'autobus, j'essayais de réfléchir à comment neutraliser le terroriste. »
 

« Herzl, fais ce que je te dis »

Herzl aperçut derrière l'autobus une patrouille de l'administration pénitentiaire, et tenta de s'en faire remarquer en faisant zigzaguer le véhicule et en faisant clignoter les feux de détresse. Ils ont a priori compris que quelque chose se passait, mais ils n'ont pas réussi à le doubler. Pendant ce temps, la terreur a régné dans l'autobus pendant près de 5 minutes, le terroriste portant des coups de poignards à tout va. Quand Herzl l'a vu s'approcher de la maman et de ses jumeaux, il a compris qu'il devait réagir mais il ne savait pas comment faire. « J'ai vu la dame tenter de protéger ses enfants en criant "Chéma’ Israël". C'est là que j'ai eu un flash. Je vis mon frère devant moi. Nous avons été élevés comme des jumeaux, n'ayant que onze mois de différence. Son décès après une longue maladie m'a beaucoup affecté. Il est décédé dans mes bras, en me demandant de veiller sur ses enfants.

Mon frère s'est alors adressé à moi : "Herzl, fais ce que je vais te dire, et tu verras que le terroriste viendra vers toi". Je lui ai dit que je ne pouvais déjà plus bouger, car j'étais très blessé. Il m'a répondu "Je vais t'aider. Pour le moment, actionne l'arrêt d'urgence, afin d'immobiliser l'autobus. L'arrêt brusque va propulser ce type à l'avant du bus, et là, ne le laisse pas s'en tirer. Frappe-le pour le maitriser". J'ai effectivement freiné, et le gars a littéralement volé jusqu'à moi depuis le fond de l'autobus. J'ai ouvert les portes et les passagers sont sortis à toute vitesse. C'est alors que je me suis battu avec le terroriste, jusqu'à arriver à le sortir de l'autobus. Et même dehors j'ai continué à le frapper jusqu'à ce qu'il arrête de bouger. »

Malgré ses blessures et le sang qu'il perdait, Herzl a continué à se battre avec le terroriste jusqu'à épuisement. Quand les forces de sécurité ont pu maitriser la situation, Herzl a tremblé de tout son corps et a ressenti un froid terrible. A ce moment-là il a pensé que sa dernière heure était arrivée. C'est lui-même qui a averti ses enfants quand il était sur le chemin de l'hôpital. « Tout dépend de D.ieu et de Ses Tsadikim, leur a-t-il dit au téléphone. D.ieu veille sur moi. J'ai confiance, je vais m'en sortir », les a-t-il rassurés.
 

« Une force supérieure a veillé sur moi »

Herzl est conscient qu'il a bénéficié d'une bienveillance particulière à chaque instant de cette terrible aventure. Même une fois arrivé à l'hôpital, il a vécu une expérience spirituelle inédite. Pendant son opération, il a entendu sa Néchama échanger avec celles de ses proches décédés. « J'ai vu devant moi un tunnel et un éclair jaune, et mes parents qui tentaient à tout prix de me faire sortir de cet endroit. Je leur ai demandé pourquoi ils me poussaient ainsi, alors que je voulais profiter d'eux depuis le temps qu'ils avaient disparu. Ils m'ont répondu que mon heure n'était pas arrivée, que je devais encore marier mes enfants. C'est comme si j'avais voulu rendre mon âme au Créateur, mais qu'il n'était pas temps. »

« Je remercie le Maître du Monde, que Son nom soit une bénédiction, déclare Herzl avec émotion. Je demande à tous de sanctifier le nom d'Hachem le plus possible. Une force supérieure m'a protégé dans tous ces évènements. D.ieu a souhaité que je reste en vie, et m'a envoyé mon frère pour cela. »

« J'étais entre la vie et la mort. Aujourd'hui grâce à D.ieu mon état s'améliore. Hier je suis sorti de l'hôpital pour commencer ma rééducation. En sortant du centre de rééducation, j'ai récité la bénédiction du Gomel et fait un repas de remerciement à D.ieu en présence de Rabbanim, afin de sanctifier Son nom. Peut-être cela faisait-il partie de mon Tikoun d'être dans cet autobus et de pouvoir porter assistance aux passagers. Mais le véritable héros, c'est le Maître du monde. Je n'ai été que Son émissaire. »