Au sein de la parachat Vayakhel (35, 2), un verset nous dit : שֵׁשֶׁת יָמִים תֵּעָשֶׂה מְלָאכָה וּבַיּוֹם הַשְּׁבִיעִי יִהְיֶה לָכֶם קֹדֶשׁ שַׁבַּת שׁבַתָּוןֹ (Pendant six jours, le travail sera fait, mais au septième, vous aurez une solennité sainte.)

Question : pourquoi le verset emploie-t-il la forme passive pour décrire l’activité des jours profanes (« le travail sera fait ») et non pas la forme active (« vous ferez un travail ») ?

Comme chacun le sait, le statut financier d’une personne n’est pas tributaire des efforts qu’il fournit mais dépend essentiellement de l’intervention divine. Par conséquent, l’homme doit placer son entière confiance en D.ieu et ne pas se fatiguer outre-mesure pour assurer sa subsistance. Fort de cette attitude, il ne concevra pas de jalousie envers ceux qui sont mieux nantis que lui et se réjouira de son sort.

A l’inverse, celui qui se préoccupe à outrance de ses entreprises matérielles ne connaîtra même pas le repos du Chabbat, car ses pensées étant tournées vers les différentes activités qui l’attendent dès la fin du Chabbat, il en oubliera de goûter aux délices de ce saint jour ainsi que de s’adonner à l’étude de la Torah.

Cette idée se retrouve en filigrane dans le verset cité en exergue :

« Pendant six jours, le travail sera fait » – durant toute la semaine, l’on ne fait pas son travail ; il est fait comme par lui-même. Et si l’on adhère à ce principe, alors seulement : « au septième vous aurez une solennité sainte » – on méritera de ressentir pleinement la sainteté du Chabbat (PitouHotam).

On raconte que le ’Hafets ’Haïm fut de passage dans la ville de Tchernikov et apprit qu’un industriel Juif employait des coreligionnaires durant le Chabbat. Le maître de Radin se présenta chez lui pour l’exhorter à cesser de profaner le Chabbat, mais ce dernier déclara : « Je gagne chaque jour 4000 roubles. Voudriez-vous que je perde une telle somme en fermant mon usine durant le Chabbat ? »

Le ’Hafets ’Haïm lui répondit qu’il faisait totalement erreur dans ses calculs et ajouta que s’il continuait à profaner le Chabbat, il risquait de perdre toute son usine. Il justifia ses dires par le fait que lorsque la Torah veut exhorter l’homme au respect du Chabbat, elle introduit une injonction qui semble apparemment superflue : « Pendant six jours, le travail sera fait. » Selon le ’Hafets ’Haïm, cela vient nous enseigner que si l’homme désire gagner sa subsistance durant les six jours de la semaine, il doit impérativement chômer le septième jour. Et dans le cas contraire, il n’aura même pas de quoi s’occuper durant les jours ouvrables.

Nullement impressionné par les mises en garde du sage, le propriétaire de l’usine riposta : « Que dit le rabbin ?! Un simple verset de la Torah va-t-il conduire mon usine à chômer durant toute la semaine ? »

Quelques temps après cette échange de paroles, les Bolchéviques prirent le pouvoir de la Russie et entre autres mesures, ils ordonnèrent la fermeture des usines appartenant à cet homme. Par miracle, ce dernier réussit à se sauver les mains vides, échappant ainsi à une mort certaine. Alors qu’il réfléchissait à son triste sort, il se souvint des paroles prophétiques du ’Hafets ’Haïm. Sans plus attendre, il lui adressa une lettre dans laquelle il écrivit : « Je constate maintenant la justesse de vos propos. Effectivement, un simple verset de la Torah a bel et bien le pouvoir de fermer une usine ! »…