Chaque mercredi, retrouvez les aventures de Eva, célibattante parisienne de 30 ans… Super carrière, super copines. La vie rêvée ? Pas tant que ça ! Petit à petit, Eva découvre la beauté du judaïsme et se met à dessiner les contours de sa vie. Un changement de vie riche en péripéties… qui amèneront plus loin que prévu !

Dans l'épisode précédent : Entre son travail qui lui échappe, ses amies qui lui tournent le dos et David qui n’a pas l’air sérieux, Eva se sent perdue, mais la rabbanite lui conseille une mise au point dans un séminaire de Jérusalem…

“Wouaw ! Tu pars en Israël ? C’est super, ça va énormément t’enrichir ce voyage !” Cette réaction spontanée et sincère, je la devais à Louise, une ancienne collègue devenue une copine depuis. Je lui racontais mes dernières nouvelles un jour que je la croisais devant le nouveau salon de manucure du quartier. Ses paroles me réchauffaient le coeur. Depuis que j’avais pris ma décision, je n’étais pas très fière de moi. J’avais l’impression de fuir mes problèmes d’un côté, mais de l’autre, je me sentais comme attirée vers Jérusalem et ses promesses de Torah. J’avais été un peu vite à me confier à Louise, je ne l’avais même pas annoncé au travail ni à ma famille.

Quant à David… je n’avais même pas le courage de le recontacter. J’arrivais à ne pas trop culpabiliser en me répétant que lui m’avait fait attendre des mois et des mois, mais quand même, ce n’était pas mon genre et je n’avais pas envie de lui ressembler sur ce point.

Depuis la dernière discussion avec ma mère, où elle avait cru que faire Téchouva signifiait en français devenir une orthodoxe rigide comme de l’acier, on s’était contentées des échanges minimums et j’appréhendais de lui dire que je partais en Israël ! Mais bon, je n’avais pas le choix, mes parents allaient bien finir par s’apercevoir de mon absence après quelques jours !

Étonnamment, mes parents accueillirent plutôt bien la nouvelle quand je leur racontais mes projets autour du couscous d’anniversaire (oui, ça existe !) que ma mère avait préparé à la demande de ma grande soeur. Leur seule inquiétude était de savoir si mon absence momentanée allait porter préjudice à mon travail (j’avais pris sur moi de ne pas leur dire qu’à mon avis, mon poste était en train de sombrer plus vite que le Titanic), mais ils n’osérent pas émettre des critiques trop vives (ok, je fis semblant de ne pas entendre quand ma mère lâcha “j’espère qu’ils ne vont pas te farcir la tête avec des idées bizarres”). Pour le reste, ils étaient plus intéressés par nous raconter leur expérience en Israël du temps de leur jeunesse et leur plantation de bananiers dans les Kibboutzim du Golan !

Cette première étape passée avec succès me redonna un surplus de courage. Maintenant, il fallait que je puisse obtenir de mon travail l’autorisation d’un congé sabbatique. Même si j’avais le sentiment d’être de moins en moins utile dans cette agence, ce n’était pas dit qu’ils me laissent partir aussi facilement. J’avais demandé un rendez-vous à la DRH et, en attendant, je n’en menais pas large, donc j’étais partie préparer mon discours et mes arguments chez Guila qui me servait de coach.

C’était une super prof, mais moi j’avais l’air d’un perroquet à répéter mon texte pour la 10ème fois, je saturais et je proposais une pause goûter.

Pendant que je mordais sans retenue dans une madeleine faite maison par Guila, elle me dit avec beaucoup de douceur : “Tu sais, ça ne sert à rien d’apprendre par coeur ton texte, ce qu’il faut, c’est juste que tu remettes les choses à leur place. Qui est le patron ?”

- Ben, ché Fwanck, dis-je la bouche pleine en m’étouffant à moitié. Tu sais, Franck mon directeur, je t’en ai déjà parlé.

- Je sais, mais non, ce n’est pas lui Le “Vrai” Patron. Je te parle de Celui qui t’a mise sur terre, Celui qui renouvelle chaque jour le monde en t’y donnant une place à part. C’est Lui le vrai patron ! En hébreu, on dit : “Ein Od Milévado”, ça veut dire “Il n’y a rien ni personne au-dessus de D.ieu”. C’est donc Lui que tu dois convaincre, pour le reste, il n’y a pas à s’inquiéter.

- Guila, tu as raison en théorie, mais si jamais la DRH et Franck refusent mon congé sabbatique, comment je fais moi pour aller étudier à Jérusalem ?

- C’est ce que j’essaie de te faire comprendre. Au lieu de répéter tes arguments, répète plutôt cette phrase et tu laisses Hachem gérer le reste… Tu verras, quand on Lui fait confiance, Il peut faire des miracles… comme pour moi !

Elle n’avait pas besoin de me dire plus… j’avais compris ! Guila attendait un bébé. D’un coup, les larmes me montèrent aux yeux ! C’était magnifique. Je savais qu’elle s'inquiétait parce qu’elle-même était fille unique après beaucoup d’années d’attente chez ses parents, alors forcément, elle avait craint la même chose pour elle. Mais finalement, elle serait maman à peine un an après son mariage.

Je quittais Guila plus heureuse que jamais et remontée à bloc. “Ein Od Milévado”, elle avait raison. Après tout, je voulais prendre du temps pour étudier la Torah et me rapprocher d’Hachem, c’était sûr que D.ieu Lui-même serait de mon côté !

Le lendemain, j’étais déjà devant la porte de la DRH 5 minutes avant l’heure du rendez-vous. Philippe mon collègue préparait justement un colis dans les couloirs et me trouva bien étrange à murmurer en boucle “Ein Od Milévado”, il devait penser que j’apprenais le japonais. Mais j’étais au contraire en train d’adresser une prière silencieuse à D.ieu : “Hachem, je ne vais pas Te mentir, c’est hyper dur de Te faire confiance, vu que Tu ne me réponds pas, ne serait-ce que pour me dire si je prends la bonne décision, mais Tu sais quoi ? Guila a raison, c’est Toi Le Boss ! Moi je vais tenter le tout et si vraiment Tu penses que c’est une bonne chose que de partir en Israël, alors ça se fera. Et sinon… ben ça voudra dire qu’il y a mieux pour moi ici à Paris. Quoi qu’il arrive, ce ne sera que du positif, n’est-ce pas ? Bon et si jamais Tu veux m’envoyer un petit signe, n’hésite pas !”

C’est à ce moment que Frédérique, la DRH, ouvrit la porte et m’invita à entrer. Franck était déjà installé dans son bureau.

25 minutes plus tard, je sortais du bureau en cherchant du coin de l’oeil les caméras cachées. Parce que la réunion qui venait d’avoir lieu était surréaliste et même Guila n’en croirait pas ses oreilles !

- Allo Guila ? Tu es assise ? Parce que tu ne devineras jamais ce qui s’est passé !

- Ils ont décidé de t’offrir le billet d’avion ?

- Mieux ! Non seulement ils ont accepté ma demande de congé sabbatique sans discuter, mais en plus, ils aimeraient que sur place je conduise une analyse de marché pour qu’ils puissent ouvrir une antenne de l’agence événementielle en Israël. Et ils vont me payer pour ça ! Tu te rends compte ? Je pars en Israël et je garde mon travail !

- Ah ah ah, c’est énorme Eva ! “Ein Od Milévado”, tu vois qu’Hachem avait non seulement prévu que tu devais aller à Jérusalem, mais en plus, Il te donne une Parnassa pour ça. Mazal Tov ! C’est une superbe nouvelle.

Non seulement mon projet prenait forme, mais j’avais la conviction profonde qu’Hachem était à mes côtés. Quelle force incroyable !

Du coup, pour fêter la bonne nouvelle, j’avais organisé un dîner chez Sababa Sushi avec toutes les copines (minus Karen).

Sababa Sushi, c’était LE nouveau resto sushi Cachère de Paris, celui où tout le monde se pressait, aussi bien parce que les california étaient à tomber, que pour le chef, un juif orthodoxe d’origine asiatique, qui ajoutait encore plus au côté exotique.

Pas une des copines invitées ne manquait à l’appel et ça faisait un bien fou de retrouver les filles qui m’avaient manqué toute cette période. Chacune riait de mes péripéties et de ma bravoure à répétition. L’humeur était au beau fixe et j’en regrettais presque l’idée de les quitter quelque temps.

Mais cette pensée fut balayée en un éclair, dès que j’entendis dans mon dos : “Et ben, tu as l’air d’aller bien, je suis content, bon appétit les filles”... Oups ! David !

Bon, la lâcheté ce ne serait pas pour cette fois. Je lui proposais de m’accompagner dehors du restau pour discuter au calme (et sans spectatrices).

- David, excuse-moi, je n’ai pas eu le temps de t’appeler…

- Ça va, ne te fatigue pas Eva, je te connais. Si ta réponse avait été positive, je n’aurais même pas eu à attendre que tu m’appelles. Tu as changé. Je ne sais pas trop ce que c’est, mais tu es différente et j’ai compris quand on s’est vu, qu’entre nous ce ne serait pas cette fois-ci.

- Je suis désolée. Oui, tu as raison, j’ai changé, plein de choses ont changé dans ma vie d’ailleurs. Je pars quelque temps en Israël. D’abord pour étudier dans un séminaire et aussi pour une mission au travail. J’ai l’impression qu’on passe notre temps à se rater, on n’est pas synchronisés.

- Toi qui pars étudier dans un séminaire ? Et ben, ça c’est un changement, c’est fou ! Effectivement, je ne m’étais pas trompé. Je ne sais pas si on est synchro ou pas tous les deux, mais essaie de me donner des nouvelles quand tu reviendras… si tu reviens.

La suite, la semaine prochaine…