A Hannouca, nous fêtons principalement deux choses : 
- le miracle de la fiole d'huile, qui a brûlé huit jours au lieu d'un seul ; 
- le miracle de la guerre, lors de laquelle quelques juifs (les Hachmonaïm) ont gagné des dizaines de milliers de Grecs. 
 
Après ces miracles, les Hachmonaïm vont régner pendant plus de 210 ans sur le peuple juif. 
 
La Guemara Baba Batra raconte ce qui est arrivé aux Hachmonaïm à la fin de ces deux cent dix ans, et c'est assez choquant : 
 
Un esclave appelé Hourdouss a voulu se marier avec l'une des filles des Hachmonaïm. Et puisque ce n'était pas possible, il a carrément décidé de tuer tous les Hachmonaïm... 
 
Le Ramban, dans parachat Vayé'hi, se demande : comment de tels tsadikim ont pu mériter une fin aussi tragique (être tous exterminés, au point qu'il n'y ait pas eu dans leur famille un seul survivant) ? 
 
Et il explique : lorsque Yaacov Avinou a bénit ses enfants, il a dit à Yéhouda que le bâton ne le quitterait pas (lo yassour chévète miYéhouda). 
 
Nos Sages expliquent que le mot "bâton" signifie ici : le droit de devenir roi, de diriger le peuple juif. 
 
Ce droit devait appartenir à la tribu de Yéhouda. Or les Hachmonaïm ne faisaient pas partie de celle-ci. Ils n'auraient donc pas dû régner sur le peuple juif. C'est pourquoi ils ont été si sévèrement sanctionnés. 
 
Pourtant, la Torah n'a jamais dit que celui qui transgresserait la demande de Yaacov Avinou (formulée par les mots "lo yassour chévète miYéhouda) serait 'hayav mita (passible de mort) ! Pourquoi donc une telle sévérité pour la transgression d'une demande qui n'est même pas une mitsva de la Torah, et encore moins une mitsva qui rendrait passible de mort celui qui ne la respecterait pas ? 
 
Dans la paracha de Béhaalotékha, Rachi rapporte un Midrash qui dit : pourquoi la mitsva d'allumer la Ménora est-elle énoncée juste après les offrandes apportées par les Nessiim (chefs de tribu) lors de l'inauguration du Michkane ? Parce que lorsque Aharon a vu que les douze chefs de tribu ont apporté des offrandes et que lui n'a pas été invité à en apporter, il a eu de la peine. Il s'est dit que peut-être Hachem lui en voulait encore d'avoir participé à la faute du veau d'or. Mais Hachem lui a dit : "Ta mitsva (allumer la Ménorah) est encore plus grande que la leur (avoir offert des offrandes lors de l'inauguration du Michkane)". 
 
Le Ramban explique que depuis la destruction du Beth Hamikdash, nous n'avons plus la possibilité d'y amener des sacrifices ou des offrandes. Mais nous avons chaque année la possibilité d'accomplir une mitsva qui nous rappelle la Ménora du Beth Hamikdash : la mitsva d'allumer les lumières de Hannouca. 
 
C'est en cela que la mitsva de Aharon (qui se perpétue, grâce à Hannouca) est encore plus grande que celle des Nessiim (qui, elle, a été ponctuelle, parce que liée à l'existence du Michkane/du Beth Hamikdash). 
 
Au Beth Hamikdash, deux mitsvot concernaient la Ménorah : 
- la hadlaka, la mitsva d'allumer la Ménora (qui pouvait être accomplie par tout le monde, et pas seulement par les Cohanim) ; 
- la hatava, la mitsva de nettoyer la Ménora (qui, elle, ne pouvait être accomplie que par un Cohen). 
 
On peut donc se demander : si n'importe quel juif avait le droit d'accomplir la mitsva d'allumer la Ménora, en quoi le fait de recevoir cette mitsva pouvait-il être pour Aharon une grande source de consolation et de joie ? 
 
Le Sifté Cohen explique que les bougies de Hannouca, aussi petites soient-elles, peuvent éclairer l'immense obscurité de notre exil (en vertu du principe méat or do'hé harbé hochekh / un peu de lumière repousse beaucoup d'obscurité). 
 
Certaines personnes vivent parfois dans l'obscurité, c'est-à-dire en oubliant complètement (ou, du moins, très souvent) de garder un lien avec Hachem. 
 
Lorsqu'une personne est plongée dans l'obscurité (au sens physique du terme, cette fois), elle ne peut pas voir d'un coup une forte lumière. Si elle le fait, elle risque hass véchalom de devenir aveugle... 
 
Elle devra s'habituer progressivement à la lumière, pour pouvoir finalement y vivre. 
 
Les lumières de Hannouca, que nous allumons progressivement (le premier soir, une bougie ; le deuxième soir, deux bougies etc...), nous rappellent l'importance de grandir progressivement (mais continuellement) dans le service d'Hachem. 
 
Si jusque-là nous avons vécu "dans l'obscurité" (c'est-à-dire loin d'Hachem), nous n'allons pas pouvoir directement affronter toute la lumière (accomplir d'un coup toute la Torah). Il va falloir avancer progressivement, étape par étape. Et alors, la lumière pourra nous accompagner toute la vie. 
 
Les Hachmonaïm étaient des Cohanim. Ils connaissaient bien la Torah (c'était eux que le peuple juif devait interroger en cas de questions à son sujet), et ils savaient donc pertinemment que la royauté ne revenait pas à ceux qui n'étaient pas de la tribu de Yéhouda. 
 
Pourtant, ils ont voulu s'emparer de la couronne de la royauté. La prendre de force, comme si les deux autres couronnes qu'ils avaient (celle de la Torah et celle de la Kéhouna) ne leur suffisait pas... Pourquoi ? 
 
Le Sifté Cohen explique que les Cohanim tienne énormément à ce que la Torah se perpétue à travers les générations. Ils doivent rapprocher avec gentillesse le peuple juif d'Hachem. Les Hachmonaïm ont voulu faire cela, mais pas dans la gentillesse. Avec force. En dominant. En étant les rois. Et ils ont même penser obtenir ainsi de meilleurs résultats (pouvoir rapprocher encore plus de gens d'Hachem). 
 
Et c'était cela leur erreur : avoir voulu imposer par la force. 
 
Hachem ne veut pas que la Torah nous soit imposée de force par un autre homme. Il nous l'a Lui-même imposée de force (en mettant le Har Sinaï au dessus de notre tête lors du don de la Torah, et en nous disant : "Si vous l'acceptez, tant mieux. Sinon, ici sera votre tombeau"), mais il n'empêche que pour que les mitsvot soient accomplies à très long terme, il faut les accomplir par choix personnel, et pas parce qu'une autre personne nous oblige à les faire. 
 
Si une personne nous oblige à faire une mitsva, on pourra la faire sur le moment, en se forçant par crainte de sa réaction. Mais dès qu'on aura la possibilité de ne plus la faire (lorsque cette personne ne sera plus là pour nous obliger, par exemple), on ne l'accomplira plus (sauf si entre temps, on a aimé la mitsva et on a donc, de nous-mêmes, envie de continuer à la faire). 
 
En étant un roi, on impose forcément. Et on prive donc les personnes que l'on domine d'agir par amour. On les force à agir par crainte. 
 
Le Sifté Cohen explique que si les Hachmonaïm ont été si sévèrement sanctionnés, c'est parce qu'ils ont voulu imposer au peuple juif les mitsvot par crainte, les empêchant ainsi de les accomplir par amour. 
 
Celui qui sert Hachem uniquement par crainte finira par ne plus Le servir. Celui qui Le sert par amour (tout en Le craignant, car il y a aussi une mitsva de Le craindre) continuera à Le servir. 
 
De même, ce qui permet à un couple de durer, c'est l'amour qu'il y a entre l'homme et sa femme. Si l'un des deux a uniquement peur de l'autre (et a fortiori si les deux ont ce sentiment l'un envers l'autre), le couple ne tiendra pas longtemps. 
 
La crainte d'Hachem ne doit pas être imposée. Sinon, Ses mitsvot ne seront pas accomplies par crainte de Lui (et encore moins par amour pour Lui), mais par crainte de celui qui nous oblige à les faire. 
 
Le Sifté Cohen donne une deuxième explication concernant la sévérité avec laquelle les Hachmonaïm ont été punis pour s'être emparé de la royauté : 
 
Il ramène un Midrash (rapporté dans Pirké déRabbi Eliézer 41) dans lequel Rabbi Éliézer ben Horkénoss raconte que Rabbi Chimon bar Yo'haï s'est dit : "J'ai longuement étudié la Torah ; et je voudrais maintenant faire une mitsva. Mais laquelle choisir ?". 
 
Après réflexion, il décida d'accomplir la mitsva de bikour holim (rendre visite aux malades), se disant qu'Hachem Lui-même avait accompli cette mitsva, lorsqu'Il est venu visiter Avraham Avinou après sa brit mila. 
 
Il alla voir un homme tellement malade qu'il ne pouvait pas bouger de son lit, lui prépara à manger et le nourrit lentement. Mais ce malade, au lieu de le remercier, se mit... à le maudire, en lui souhaitant tous les maux qu'il ressentait lui-même actuellement ! 
 
Mais Rabbi Chimon, au lieu de s'énerver contre cet ingrat, ou même d'être choqué de sa réaction, reconnu que cette dernière était certainement voulue par Hachem, pour le sanctionner d'avoir moins étudié la Torah. 
 
Car en vérité, Rabbi Chimon bar Yo'haï, au niveau spirituel où il était, n'avait pas à interrompre son étude de la Torah pour s'occuper de ce malade. Car en faisant cela, il aidait moins le malade que s'il avait continué à étudier. Car l'étude de la Torah fait encore plus de bien au monde que tout ce que les médecins ou médicaments pourraient faire... 
 
C'est pourquoi le malade en voulait tellement au Rav : celui-ci pensait bien faire en le nourrissant physiquement, mais en vérité il l'aurait encore plus aidé s'il avait continué à étudier. 
 
Le rôle des Cohanim est d'aider les gens à se rapprocher d'Hachem ; de les guider dans la voie de la Torah. En prenant le pouvoir, et en s'ajoutant ainsi de nombreuses contraintes, les Hachmonaïm se sont mis eux-mêmes dans une situation dans laquelle ils seraient moins disponibles pour l'étude de la Torah. Et ils ont ainsi privé le peuple juif d'une chose irremplaçable : l'aide qu'ils auraient pu lui apporter à travers cette étude. 
 
Le 25ème mot de la Torah est le mot "or (lumière)". Et nos Sages expliquent que la lumière dont il est question ici est l'éclairage apporté par l'étude de la Torah. 
 
A Hannouca, nous n'avons pas d'obligation de manger (comme à Pourim, où nous faisons un michté) ou de danser (même s'il est vrai que nous devons être heureux, et dire le Hallel avec une joie particulière). Par contre, la fête de Hannouca est fortement liée à l'étude de la Torah. 
 
En effet, avant la victoire des Hachmonaïm, nous n'avons pas de trace de la Torah orale. 
 
La lutte des Hachmonaïm n'était pas seulement une guerre physique. Son but était surtout de rappeler quelles sont les vraies valeurs dans la vie. 
 
A ce sujet, la Guemara rapporte une discussion entre Hillel et Chamaï, sur la question suivante : "Entre l'étude de la Torah et sa pratique, qu'est-ce qui est le plus important ?". Et elle conclut que l'étude de la Torah est plus importante, car elle amène à une bonne pratique de la Torah. 
 
Lorsqu'on n'étudie pas la Torah, on ne sait pas (ou, du moins, on ne sait pas bien) ce qu'elle nous demande de faire. En cela, l'étude de la Torah est plus grande que sa pratique. 
 
En luttant contre les Grecs, les Hachmonaïm ont voulu nous rappeler l'importance de l'étude de la Torah (en particulier de la Torah orale). En prenant le pouvoir quitte à moins l'étudier, ils se sont comportés à l'inverse de l'idée qu'ils défendaient ; de ce qu'ils voulaient enseigner. D'où la sévérité avec laquelle ils ont été sanctionné. 
 
Dans le même ordre d'idées, la Méguilat Esther nous dit qu'à la fin de sa vie, Mordékhaï était "ratsouy lérov é'hav", apprécié par la majorité de ses frères, mais pas par la totalité. Pourquoi ? Car, comme l'explique la Guemara, en s'occupant du royaume, Mordékhaï étudiait moins la Torah. 
 
Mordékhaï et les Hachmonaïm ont, chacun, sauvé le peuple juif. Pourtant, le fait qu'ils aient moins étudié la Torah leur est reproché... S'ils avaient demandé à Hachem : "Préfères-Tu que je devienne roi, ou que j'étudie Ta Torah ?", Hachem leur aurait répondu : "Vous, continuez à étudier Ma Torah. Et donnez le royaume à quelqu'un d'autre, de façon à maintenir le niveau d'étude de la Torah à son summum". 
 
L'étude de la Torah entraîne des bienfaits inimaginables dans le monde, même lorsque nous ne les voyons pas forcément immédiatement devant nous : paix entre les gens, guérison des malades, abondance matérielle etc... 
 
Les bougies de Hannouca nous rappelle l'importance d'éclairer nos vies à travers l'étude de la Torah. Et le fait que nous en allumons une de plus chaque jour nous rappelle l'importance de toujours progresser dans cette étude. 
 
Les lumières de Hannouca ne sont pas de simples lumières physiques. Elles nous rappellent l'importance de l'étude de la Torah, qui permet de se lier à Hachem et de recevoir, par conséquent, toutes les berakhot. 
 
(Hachem est, en effet, le seul à pouvoir tout nous donner. Car même les gens ne peuvent nous donner que ce qu'Il a décidé qu'ils nous donneraient). 
 
Retranscrit par Léa Marciano 

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