Un grand homme nous a quittés : ‘Hakham Chalom Cohen, comme on avait l’habitude de l’appeler, qui fut à la tête du Conseil des Sages de la Torah et dirigea le parti Chass après le décès du Rav ‘Ovadia Yossef. En dehors de ses connaissances hors pair sur toute la Torah, il était connu pour sa recherche de la vérité et sa simplicité. Rabbi ‘Ovadia envoyait certaines personnes auprès de lui pour obtenir sa bénédiction, car “sa bouche est sainte et ne prononce que des paroles de Torah” leur disait-il à son propos.

Mais il était aussi à la tête de la célèbre Yéchivat Porat Yossef, située à Jérusalem à proximité du Kotel. Elle avait été inaugurée dans les années 1930, construite face aux vestiges du Temple. Mais en 1948, lors de la Guerre d’Indépendance, les Jordaniens avaient incendié l’énorme bâtisse avec tout son contenu, comprenant une bibliothèque de milliers de livres et de manuscrits rares et inédits. La Yéchiva sera reconstruite plus tard dans le quartier de Guéoula à Jérusalem, mais le Rav Chalom Cohen tiendra après la reconquête par Israël de la Vieille Ville en juin 1967 à y reconstruire une Yéchiva, portant le nom de “Porat Yossef” elle aussi, là où se tenait l’établissement initial avant d’être détruit.

Pendant la semaine de deuil de ‘Hakham Cohen, de nombreuses histoires le concernant ont refait surface, touchant également l’historique de cette Yéchiva. C’est ainsi qu’on a pu apprendre que celui qui avait financé l’achat du terrain et la construction de cet établissement était un commerçant très riche de la ville de Bagdad, Yossef Avraham Chalom, qui faisait dépendre sa réussite dans les affaires de la bénédiction que lui avait accordée le fameux Sage Rabbi Yossef ‘Haïm, le Ben Ich ‘Haï. Ce philanthrope voulait consacrer une partie de son argent à aider les Juifs d’Erets Israël et prit conseil auprès de son Maître, le Ben Ich ‘Haï, pour savoir où “investir” au mieux sa Tsédaka

Celui-ci le surprit en lui proposant d’édifier une grande Yéchiva dans laquelle on étudierait la Torah. Le Rav justifia son choix en lui disant que pour n’importe quelle cause, il se trouvera toujours des personnes généreuses intéressées à donner leur aide financière, mais pour la construction d’une Yéchiva, ‘’si tu ne la construis pas, personne d’autre ne le fera à ta place”. Le donateur écouta le Rav de Bagdad et édifia un immense établissement, permettant aux élèves et aux familles des Rabbanim d’y résider. Pour l’anecdote, il fallut s’arranger avec pas de moins de 70 résidents non-juifs qui revendiquaient des droits de propriété sur le terrain sur lequel on voulait bâtir la Yéchiva.

Le Ben Ich ‘Haï fut un grand visionnaire, car de Porat Yossef sortiront de très grandes autorités rabbiniques qui vont permettre le refleurissement du judaïsme séfarade en Israël. Citons le Roch Yéchiva Rabbi ‘Ezra Attia et ses élèves les Rabbanim Rav ‘Ovadia Yossef, Rav Mordekhaï Eliahou, Rav Its’hak Kadouri, Rav Ben-Tsion Aba Chaoul, Rav Yéhouda Tsadka, Rav Chalom Cohen (le défunt), Rav ‘Adès, Rav Moutsafi, Rav Chrem, etc. Quel “visage” aurait aujourd’hui le judaïsme séfarade sans l’intervention du Ben Ich ‘Haï ? N’oublions pas que les enfants et les disciples de ces Rabbanim précités continuent le “travail” de leurs pères et Maîtres, ouvrant dans tout le pays des Talmud-Torah, Yéchivot, Kollelim, prodiguant des cours de judaïsme et assurant Cacheroute, construction de Mikvaot et autres services religieux dans tout Israël.

Cette constatation donne à réfléchir, car la nature humaine n’a pas changé. Même de nos jours, il est beaucoup plus facile de demander une cotisation pour toutes sortes de causes (des plus louables), que pour le soutien d’un établissement dans lequel on étudie la Torah. Le grand Maître de Bagdad prévenait déjà il y a près d’un siècle : peu de gens saisissent l’importance de l’étude de la Torah, et pourtant elle représente l’âme même du peuple juif !