Voici l’histoire personnelle de Daniel, un fidèle de Torah-Box habitant aujourd’hui à Jérusalem, qu’il nous a lui-même envoyée.

Daniel est né dans une famille religieuse d’origine tunisienne, son père était ‘Hazan, ministre officiant dans une synagogue en plus de son travail, sa grand-mère paternelle descendait des Rabbanim Guez de Tunisie, au 19ème siècle.

À la fin de sa scolarité en école juive, Daniel poursuit des études supérieures en France. Au milieu des étudiants qui ne sont pas juifs, sa fidélité au Chabbath est perçue au mieux comme un folklore sans aucune importance, au pire comme une pratique obscurantiste.

Mais Daniel tient bon sur ses convictions, et il continue à étudier sérieusement. Il obtient son diplôme et il commence à travailler à plein temps, tout en poursuivant à côté ses études pour obtenir, cette fois-ci, un précieux sésame : le diplôme d’expertise-comptable. Ces études sont très exigeantes et prennent du temps, mais il reste motivé, surtout par amour pour son père qui veut une meilleure carrière pour son fils que la sienne.

La vie suit son cours, mais voilà qu’en 2001, son père tombe gravement malade. On lui diagnostique un cancer, et il subit une première opération en mars 2002. L’intervention est un succès, et la maladie est en voie de rémission. Malheureusement, quelques années plus tard, la terrible maladie refait son apparition, et le papa de Daniel rend son âme au Créateur avant Roch Hachana, en 2005, quelques mois seulement avant l’examen final d’expertise-comptable de son fils. Daniel, âgé de 29 ans, est accablé par la tristesse, mais il réussit tant bien que mal à surmonter son chagrin et passe l’examen avec succès. Il est très heureux de cette grande réussite, avec un gros pincement au cœur tout de même, celui de savoir que son papa n’a pas eu la chance de célébrer cette réussite avec lui.

Daniel travaille à l’époque dans une petite entreprise et, fort de son nouveau diplôme, il souhaite changer d’air. 

Il trouve un poste dans un cabinet comptable à Sèvres, dans les Hauts-de-Seine. Rapidement, il se rend compte que son nouveau poste lui pose certaines difficultés. Il est dans l’année de décès de son père et il tient absolument à réciter le Kaddich tous les jours. Or, on lui confie un déplacement professionnel de trois jours dans une petite ville de Bourgogne, dépourvue de communauté juive à proximité, ce qui le contraindrait à prier seul pendant cette période sans pouvoir réciter le Kaddich pour l’élévation de l’âme de son père. Mais, surtout, la mission commence un mercredi, et se termine vendredi à 16h, ce qui le ferait rentrer à Paris en plein Chabbath. 

Daniel, qui est alors en période d’essai, explique à son employeur l’impossibilité pour lui d’accepter cette mission. La réponse de son patron est sans équivoque : “Toutes les conséquences nécessaires en seront tirées”, ce qui veut dire, dans un langage plus clair, que Daniel sera licencié s’il n’effectue pas ce déplacement dans les conditions prévues par le cabinet comptable. Daniel veut démontrer toute sa bonne volonté, mais hors de question de négocier sur le Chabbath. 

Il se rend en Bourgogne, et part vendredi suffisamment tôt le vendredi pour avoir le temps d’arriver à l’heure pour le Chabbath. Le jeune homme est déjà très ennuyé d’avoir raté les récitations du Kaddich pendant trois jours pour son papa, alors il ne veut pas prendre en plus le risque d’ajouter une transgression du saint Chabbath. 

Après un voyage sans encombre, il arrive à l’heure pour l’allumage des bougies et passe un Chabbath empli de joie et de piété. 

La semaine qui suit, son employeur se montre inflexible, il rompt immédiatement son contrat de travail avec une petite semaine de préavis. D’un côté, Daniel est fier d’avoir tenu son Chabbath coûte que coûte, mais de l’autre côté, il se retrouve dans une situation difficile, endeuillé et avec une petite indemnité chômage de moins d’un an, un loyer important à régler aux côtés de sa femme enceinte, sans revenus.

Sans attendre, Daniel part à la recherche d’un nouvel emploi, mais ses démarches n’aboutissent pas, ses envois de CV demeurent sans réponse et les rares rendez-vous sont sans lendemain. Les mois défilent et rien ne se passe sur le plan du travail. Daniel s’inquiète, il ne veut absolument pas rester au chômage plus longtemps. Il prie beaucoup et avec une grande intensité afin que sa situation s’améliore.

Quelques semaines plus tard, sans s’y attendre, il est contacté pour racheter une petite clientèle d’expertise-comptable, ce qui est désormais possible grâce à son diplôme qu’il a obtenu quelques mois auparavant. C’est une opportunité intéressante pour Daniel mais il est sans ressources, et il doit obtenir un crédit pour cela. Il sollicite plusieurs banques pour s’assurer d’au moins une réponse positive en cas de refus. Daniel prépare les dossiers de demande de crédit en espérant une réponse pour la fin septembre 2006, car la vendeuse de ce portefeuille clientèle attend le paiement début octobre au plus tard.

La pression monte pour Daniel et son épouse, tous deux viennent de familles modestes, sans ressources importantes et sans soutien extérieur. Faute d’avoir pu trouver un travail salarié, cette opportunité est l’une de ses dernières chances avant la fin de ses droits au chômage et de l’arrêt de ses revenus.

Au mois de Eloul, quelques semaines avant Roch Hachana, le début de la nouvelle année juive, Daniel veut mettre toutes les chances de son côté et se rend prier sur la tombe de son grand-père, pour que son mérite d’homme généreux, qui avait toujours aidé ses proches, joue en sa faveur auprès d’Hachem. “D.ieu de bonté et de miséricorde, Toi mon roi qui peut tout, daigne m’accorder ce crédit bancaire, que je puisse avoir ma propre activité et que la Parnassa, les moyens de subsistance que Tu m’accordes ne soient jamais reçus aux dépens de Tes saints commandements !”

À la rentrée, la mauvaise passe continue pour Daniel, qui reçoit une réponse négative de l’une des banques dans laquelle il plaçait le plus d’espoir. L’établissement justifie sa décision en raison d’un incident bancaire datant de huit ans.

Daniel essaie de ne pas désespérer, mais la situation se corse. Et, Baroukh Hachem, quelques jours plus tard, sans qu’il ne s’y attende, l’une des banques donne son accord pour lui prêter les fonds, alors que son dossier ne joue pas du tout en sa faveur. 

Daniel y voit un signe du Ciel assez évident, car son grand-père, qu’il avait pèleriné quelques semaines plus tôt, avait travaillé presque toute sa vie à Tunis dans une filiale de cette même banque, celle qui a accordé le crédit !

Les événements prennent ensuite une tournure très favorable. Daniel prend à bras le corps son portefeuille client, et il peut se verser son premier salaire en janvier, au moment où ses droits au chômage s’arrêtent. Il gagne rapidement plus d’argent que le salaire de son dernier poste.

D’une situation très tendue et précaire, semblant sans issue, après de longs mois de recherche de travail sans succès et dans l’année de deuil de son papa, Daniel a trouvé une activité indépendante qui lui offre de belles perspectives. Par le respect du Chabbath dont Daniel a fait preuve, au point de perdre son emploi, et le grand respect qu’il a témoigné à ses ascendants, D.ieu a orienté tous les événements pour le placer dans une situation idéale, sans dépendre du bon gré de son employeur pour lui permettre de partir plus tôt le Chabbath, ou de s’absenter pour les fêtes. Mesure pour mesure : quiconque garde le Chabbath, Chabbath le gardera !