Le but d'un compliment n'est pas seulement d'installer une atmosphère agréable dans la maison. Il sert aussi à encourager son conjoint :

  1. Sur son travail à la maison
  2. Sur sa volonté d'évoluer et de s'adapter à son (sa) moitié.

Les compliments sont très importants pour encourager un jeune enfant. Dès qu'un bébé, même très petit, fait la moindre chose, nous le complimentons spontanément, et parfois même forçons le trait – si nous voyons un bébé ramper, nous disons avec enthousiasme : « Eh bien mais tu cours déjà mon bébé ! ». Lorsqu'il saisit un petit objet léger, nous le félicitons d'avoir porté une très lourde charge !

Quand un jeune enfant nous dit dans quelle classe il est à l'école, nous lui répondons qu'il est déjà un grand garçon. L'intuition qui nous fait venir ses mots à la bouche vient du fait que nous savons qu'ils vont encourager l'enfant, le faire se sentir bien. Cela est primordial pour lui comme pour toute personne. Il est clair pour nous qu'en le félicitant, même pour des actions mineures, il continuera à faire des choses positives dans sa vie. Nous n'hésitons pas à utiliser des mots un peu disproportionnés, et ce sans avoir le sentiment de le « flatter ».

Nous ressentons même que nous faisons une belle et noble action, pure, et que nous ne faisons que l'encourager. Or il n'y a aucune raison que ce genre de compliment n'encourage pas votre conjoint(e) dans le cadre de ses propres actions au sein de votre foyer. De la même façon qu'un compliment encourage un petit enfant, il stimule et aide un adulte à surmonter petites et grandes difficultés. Après avoir reçu de vous un compliment, votre conjoint(e) s'évertuera encore plus pour vous satisfaire. Pour amoindrir les difficultés naturelles qui existent dans toute famille, il est propice d'utiliser des mots positifs et encourageants.


Développeur de confiance

Je suis sûr que nombre de lecteurs se souviennent encore des compliments et autres mots d'encouragement qu'ils ont reçus de leurs professeurs, ou de leurs illustres pairs, et grâce auxquels ils ont développé leur confiance en eux, et ont pu réaliser de grandes choses. Parfois même remporter des succès dont ils ne croyaient pas eux-mêmes qu'ils étaient capables. Le compliment est intimement lié au profond besoin humain de reconnaissance, dont quasiment personne ne peut faire l'économie. Le Rav Israël Salanter l'évoque d'ailleurs, en disant que l'importance que je porte à l'Autre correspond à ma spiritualité, et qu'il est donc de mon devoir de respecter chacun.

Nous sommes plus familiers avec le côté négatif et destructeur de ce besoin humain de reconnaissance, qui est l'orgueil, et les terribles conséquences qu'il provoque dans la société, notamment l'humiliation que les orgueilleux font vivre aux autres, dans leur course implacable pour réussir mieux et plus vite qu'eux. Mais il a aussi un côté positif au besoin de reconnaissance, et c'est la raison pour laquelle D.ieu l'a placé en l'homme. Les maitres du Moussar (morale) enseignent que la fierté vient à l'origine de ce que l'homme a été créé à l'« image de D.ieu ». C'est pour cela même que l'homme repousse toujours plus loin ses grandes aspirations et ressent qu'il est une personnalité unique.

Le Rav Nathan Tsvi Finkel, dit le Saba de Slabodka, fondateur du courant de pensée du même nom, enseigne qu'il est possible d'amener un homme à accomplir les Mitsvot entre l'homme et D.ieu et entre l'homme et son prochain simplement en lui faisant prendre conscience de sa grandeur intrinsèque, à savoir qu'il a été créé à l'image de D.ieu. Plus l'homme aura conscience de cette grandeur, plus il s'abstiendra de faire des choses qui amoindrisse son rang, c'est-à-dire des ‘Avérot (fautes) et des mesquineries.


Collaborer avec son prochain

Cette aspiration de l'homme vers de belles réalisations doit être reprise dans la vie conjugale afin d'insuffler un esprit de collaboration au sein du foyer. Quand un conjoint ressent qu'on le considère comme une personnalité extraordinaire, qui vient en aide aux autres, il lui tient à cœur de ne pas abimer cette belle image et même de continuer à prouver qu'elle est vraie. La preuve en est que dans les maisons où fusent des mots de reproche qui vilipendent le conjoint, celui-ci se sent inutile et sans valeur, à tel point que rien ne viendra changer son état d'esprit qui lui serine : « A quoi bon faire des efforts? »

En revanche, des paroles d'encouragement suscitent la volonté de bien faire, pour tenir son rang face au regard positif que portent les autres sur nos actions. Ce genre de cercle vertueux nous amène à considérer que les mots d'encouragement ont pour fonction essentielle de faciliter les initiatives de la personne à qui elles s'adressent. Lorsque notre conjoint(e) fait face à des difficultés, surtout quand il est censé agir pour notre bien, nous devons surmonter l'obstacle émotionnel interne qui nous empêche parfois de l'encourager, tout comme nous la surpassons lorsqu'il s'agit d'encourager de jeunes enfants.

Ainsi, aucune raison ne doit nous empêcher d'encourager notre moitié, d'autant plus qu'elle est la personne qui est la plus proche de nous, et que nous attendons beaucoup d'elle. L'absence de stimulation de notre part met notre conjoint(e) dans une situation très délicate, même lorsqu'il souhaite agir pour notre bien, et rien ne justifie cela.

On peut comparer cette situation à celle d'une personne qui travaillerait sans outil, alors que son conjoint a la possibilité de s'en procurer pour quelques piécettes, mais qu'il se retient de le faire. Qu'est-ce qui pourrait justifier une telle indifférence ? Dans la mesure où des paroles de soutien aident au moins autant que des outils, pourquoi ne pas les dire à notre partenaire de vie ? Nos Sages ont fortement insisté dans les relations de couple sur l'importance des encouragements qui jouent un rôle important de catalyseur des forces potentielles de chacun. Mais les encouragements jouent le même rôle chez les personnages les plus illustres. S'appuyant sur le verset de Béréchit (37,21) : « Et Ruben l'entendit (Joseph) et voulut le sauver de leurs (ses frères) mains », Rabbi Its’hak dit : « Lorsqu'un homme veut accomplir une Mitsva, il le fait d'un cœur entier. »

Le Yalkout Chimoni écrit ainsi : "Lorsque Aharon va au-devant de Moché pour l'accueillir, le verset dit de lui : « […] à ta vue il se réjouira dans son cœur »" (Chemot 4,14), il aurait pu l'accueillir avec des trompettes et des tambours ! De même quand Boaz invite Ruth à partager la pitance des glaneurs (Méguilat Ruth 2, 14), il aurait du lui servir des veaux de lait ! Donc, si même ses illustres personnages ont été encouragés à faire plus de compliments alors même que l'on dit d'eux qu'ils ont agi de façon parfaite, cela montre combien ce comportant est essentiel dans la Torah !

Il n'y a aucun doute que de nos jours, les encouragements et le fait de souligner positivement les actions de l'autre permettent de lui faire réaliser de grandes choses, et ce avec le cœur léger. Un mari qui prend l'habitude de complimenter sa femme sur ses actions et réalisations verra son épouse en conclure inconsciemment que « cela vaut la peine de faire son maximum pour un mari pareil ». De même, une femme qui soutient et encourage son mari, celui-ci pensera qu'il est valable de s'évertuer à atteindre le meilleur pour elle. En revanche, les couples qui ne se félicitent pas l'un l'autre et considèrent les actions de l'autre comme évidentes et normales, verront la bonne volonté de leur conjoint s'étioler et disparaitre peu à peu.