Ceux qui m’ont entendu parler ou ont lu mes articles ou livres, savent que lorsque j’exprime une opinion sur un sujet, j’essaie de baser mes arguments sur notre Torah et les enseignements de nos Sages. De très nombreux événements se déroulent sous nos yeux qu’avant de pouvoir intégrer un événement, un autre prend sa place. Cette succession rapide est si envahissante qu’elle ne nous laisse pas le temps de penser.

Néanmoins, tous les événements, majeurs ou mineurs, sur le plan global et personnel, sont orchestrés par Hachem. « Tout ce qui nous arrive, le bien comme le mal, relève du domaine des épreuves » (Méssilat Yécharim). En conséquence, il y a toujours une manière juive de considérer les événements. Il y a une différence énorme entre voir les choses avec un regard laïc ou un regard inspiré de la Torah. Pensez par exemple à l’intense jubilation qui a régné dans tous les Etats-Unis à l’annonce du meurtre d’Oussama Ben Laden. Il a incontestablement été l’incarnation du mal satanique, et toute personne éprise de liberté a raison d’être reconnaissant du fait de sa disparition de la planète terre.

Il y a néanmoins une grande différence entre le fait d’être reconnaissant de son absence et de son incapacité à forger ses projets sanguinaires, et le fait de célébrer sa mort.

Avant de commencer, je voudrais préciser que, pas un instant, je ne compare la réaction dans notre pays aux manifestations de joie viles et obscènes que nous voyons dans les villes et villages musulmans. Prenez par exemple le carnage à Itamar où des meurtriers musulmans ont sauvagement assassiné les membres de la famille Fogel. Des danses effrénées et des défilés ont eu lieu pour célébrer ce bain de sang. Des bonbons ont été distribués aux enfants. Ces réjouissances insensées n’ont connu aucune limite.

J’invite nos lecteurs à méditer un instant sur ce mal débridé, célébrant le meurtre d’un père, d’une mère, d’enfants et d’un nourrisson, conférant aux meurtriers le statut de « saints martyrs ». Une telle réaction ne peut provenir que de sauvages, or, c’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Et personne ne proteste, personne n’élève la voix.

J’invite nos lecteurs à réfléchir un instant à ce qui se serait passé si le scénario inverse s’était produit. Si Israël avait commis de tels actes barbares, le monde entier aurait attaqué l’Etat juif dans sa furie. Les Nations Unies auraient convoqué une session extraordinaire. Des sanctions auraient été prononcées. Tous les sites Internet et les journaux auraient déclaré leur haine d’Israël, mais lorsque les Musulmans perpètrent de tels actes sataniques, lorsqu’ils célèbrent du sang juif renversé, on n’entend pas même un murmure. Le silence des nations est assourdissant.

L’allégresse que nous constatons aux Etats-Unis est à mille lieux des réjouissances sauvages des pays arabes. Néanmoins, aussi tempérées que soient nos célébrations, il nous appartient de nous demander : notre réaction est-elle appropriée ? Est-il juste de se réjouir du meurtre de quelqu’un, même s’il est pervers ?

Nous, le peuple juif, qui, depuis la genèse de l’histoire, a toujours été une cible, avons tragiquement beaucoup d’expérience sur ces questions. Alors que nous avons assisté à des massacres à chaque génération, nous avons aussi vu nos meurtriers s’écrouler sous nos yeux, mais - et c’est un grand mais - nous n’avons jamais dansé, nous ne nous sommes jamais réjouis de leur mort. Au lieu de cela, nous remercions humblement notre D.ieu de nous avoir sauvés et Lui demandons de nous aider à poursuivre notre mission d’allumer la lumière de la Torah dans un monde sombre. Je ne parle pas en théorie. En tant que survivante de la Shoah, j’ai assisté à cela de mes propres yeux.

Tout récemment, nous avons célébré la fête de Pessa’h qui marque la naissance de notre nation… notre exode de l’esclavage égyptien. A la table du Séder, lorsque nous évoquons les Dix Plaies qui ont détruit cette nation tyrannique, dansons-nous ? Frappons-nous des mains ? Exultons-nous ? Rien de tout cela ! Au lieu de cela, nous buvons une coupe pleine de vin et en mentionnant chaque plaie, nous renversons une goutte de notre coupe de vin, car notre coupe ne peut jamais être pleine lorsque nous assistons à la destruction des autres, même si ces autres ont été nos oppresseurs et nos meurtriers.

Nous nous abstenons de chanter des louanges à D.ieu pendant que les Egyptiens se noyaient dans le Mer des Joncs, car comment chanter alors que d’autres sont tués, même si ces « autres » visent à nous exterminer ?

Cet enseignement est renforcé par nos écrits saints. Dans le Psaume 104, le Roi David, le Psalmiste, le chantre d’Israël, a proclamé : « Que la faute soit effacée et le pervers ne soit plus… », nous implorons le Tout-Puissant d’éliminer les actes pervers, mais non les êtres humains.

Lorsque nous voulons prononcer la malédiction la plus horrible aux êtres les plus vils, nous ne demandons pas qu’ils soient sauvagement massacrés… nous ne prions pas pour un carnage sanglant, mais disons plutôt : « Yimakh Chémo », qui signifie littéralement : « Que son nom soit effacé… Que sa mission perverse soit anéantie. »

On peut peut-être le résumer par l’histoire puissante de Brouria, la brillante épouse et Rabbanite de Rabbi Méir. On nous relate qu’ils avaient une voisine misérable qui leur causait des soucis et tourments sans fin. Un jour, Brouria entendit son mari prier et demander à D.ieu d’éliminer cette voisine de la planète.

En entendant les propos de son mari, Brouria déclara : « Rabbi Méir, plutôt que de prier pour que notre voisine disparaisse, pourquoi ne pas prier pour que D.ieu élimine ses mauvaises manières ? En agissant ainsi, non seulement aurons-nous la paix de sa part, mais nous aurons une nouvelle voisine ! ». Réfléchissez-y et vous verrez que seul D.ieu aurait pu nous dispenser cet enseignement.

Enfin, il y a une autre considération dont nous, le peuple juif, sommes pleinement conscients : « Vayakoum Mélèkh ‘Hadach. Et un nouveau roi se leva sur l’Egypte », nous enseignant qu’il y a toujours un nouvel individu malveillant pour remplacer celui qui est parti, et ce nouveau venu peut s’avérer pire que son prédécesseur. Alors Ben Laden est parti, mais il y aura tragiquement d’autres pour prendre sa place. Et il en sera ainsi jusqu’à la venue du Machia’h.

Mais nous ne devons pas céder au désespoir. Rappelons-nous plutôt de ce que nous avons proclamé le soir du Séder : « Chébékhol Dor Vador… à chaque génération, ils se sont levés pour nous anéantir, mais Hakadoch Baroukh Hou, le Saint béni soit-Il, est toujours là pour nous sauver… ». Et il en sera ainsi jusqu’à la venue du Messie, rapidement, de nos jours.