La Paracha se termine par les injonctions de construire un autel où serait brûlé l’encens. Cet autel, comme celui des sacrifices était décoré d’une couronne. Rachi souligne que cette couronne (sur l’autel de l’encens) symbolise celle de la Kéhouna (prêtrise). Rav Moché Feinstein demande pourquoi la Kéhouna est liée plus particulièrement à l’encens et non aux sacrifices ?[1]

Il explique que bien que les Cohanim soient responsables des sacrifices, ce service n’était originellement pas le leur. Les premiers-nés étaient censés s’en occuper, mais ce droit leur fut retiré à cause de la faute du Veau d’Or. En revanche, deux services ont toujours été attribués aux Cohanim – l’allumage de la Ménora et la combustion de l’encens. Pourquoi ces deux choses sont-elles uniques aux Kohanim ? Rav Feinstein explique le rôle qui leur fut attribué dans la prophétie de Moché Rabbénou, quand il bénit la tribu de Lévi : « Ils enseigneront tes lois à Yaacov et Ta Torah à Israël »[2]. Ce verset indique qu’ils rempliraient un rôle d’instructeurs au sein du peuple juif. Rav Feinstein lie la Avoda des Cohanim (allumer la Ménora et brûler l’encens) à ce poste d’enseignants.

La Ménora et l’encens représentent deux aspects différents de l’éducation. La Ménora symbolise l’enseignement direct de la Torah et du Moussar, tandis que l’encens fait référence à l’enseignement à travers l’exemple personnel. Rav Feinstein développe cette idée.

La Ménora devait être allumée et le Cohen devait rester près de la mèche jusqu’à ce que la flamme puisse brûler d’elle-même – Rav Feinstein en déduit qu’il faut enseigner le sujet en profondeur à l’élève, pour qu’il le comprenne par lui-même. Aussi, l’enseignant doit avoir pour objectif de donner au disciple les Kélim (ustensiles) pour qu’il en vienne à apprendre seul, sans être dépendant de lui. La Michna de Pirké Avot nous exhorte : « Léaamid Talmidim Arbé », ce qui signifie littéralement qu’il faut avoir beaucoup d’élèves, mais il existe une explication différente. Les commentateurs soulignent que le terme « Léaamid » signifie « faire tenir », c’est-à-dire qu’il faut faire en sorte que les élèves « tiennent » seuls, qu’ils soient indépendants. Ou, dans les termes du Rav Noa’h Orlowek : « le maître doit avoir pour objectif de devenir inutile pour l’élève ».

La deuxième forme d’enseignement est l’exemple donné par le comportement. En un sens, cette méthode est plus efficace, car elle peut influer à distance, sans communication directe. Elle est symbolisée par l’encens qui laisse une très bonne et forte odeur, et ce même de loin. Les mariées n’avaient pas besoin de s’embaumer, parce l’odeur de l’encens les parfumait. ’Hazal soulignent que l’odeur se répand, même intentionnellement. De même, le maître peut influencer par son exemple, même si les autres ne cherchent pas activement à apprendre de son attitude.

L’histoire suivante illustre bien cette idée. Rav Elia Dushnitzer, qui s’attendait à ce que beaucoup de monde vienne prier à la synagogue le jour de Kippour, découpait du papier-toilette pour les fidèles. Un Juif non pratiquant regarda cette scène, qui lui sembla quelque peu étrange. « Pourquoi faites-vous cela ? demanda-t-il.

- Demain, de nombreux Juifs viendront prier et je ne voudrais pas que l’un d’eux soit incommodé », répondit le Rav.

Après avoir fait Téchouva, ce Juif expliqua ce qui le fit changer. « C’était ce Rabbin. Chaque morceau qu’il découpait touchait profondément mon cœur. »

Les Cohanim, dans leur rôle d’enseignants du peuple juif, devaient exceller dans les deux méthodes – l’enseignement frontal et le comportement exemplaire qui influerait positivement sur les gens. Ces deux aspects s’appliquent à chacun d’entre nous dans l’exemple que nous montrons aux membres de notre famille, à nos amis. Nous sommes les représentants de la Torah et avons la possibilité d’influencer les autres par nos bonnes actions.

Puissions-nous tous mériter d’émuler les Cohanim et de remplir au mieux notre rôle d’enseignants et de modèles.

 

[1] Darach Moché, 2ème vol., Chémot 30,3.

[2] Dévarim 33,10.