Chaque mercredi, retrouvez les aventures de Eva, célibattante parisienne de 30 ans… Super carrière, super copines. La vie rêvée ? Pas tant que ça ! Petit à petit, Eva découvre la beauté du judaïsme et se met à dessiner les contours de sa vie. Un changement de vie riche en péripéties… qui amèneront plus loin que prévu !

Dans l'épisode précédent : Eva est victime d’une rumeur au travail, lancée par sa propre amie Karen ! Elle rentre chez elle pour tout oublier… quand elle tombe sur David, son ancien amour, qui l’attend en bas de chez elle !

Dans les films, quand on tombe sur son ex, on a toujours les cheveux soyeux et un maquillage au naturel (soit deux heures dans les coulisses avec une maquilleuse expérimentée). Le décor est idyllique : petit éclairage tamisé des réverbères sur le pont des Arts, sans oublier la musique de fond, douce et vibrante pour traduire l’émotion de tomber nez à nez sur son âme soeur.

Dans la vraie vie, j’ai les cheveux plats qui frisottent sur le dessus, mon mascara coule un peu aux coins des yeux (merci le bikram yoga !) et je découvre David devant ma porte d’immeuble, quasi dans le noir sous le lampadaire cassé.

Dans les films, on a toujours la super phrase qui fait mouche, la répartie au bon moment… Dans la vraie vie, étonnée, je lui lance un : “Qu’est-ce que tu fais là ?”.

Bref, j’ai arrêté de regarder des films : jamais là quand on a besoin d’eux !

“Je m’inquiétais, tu ne réponds pas à mes messages, tu vas bien ?”

Je n’avais aucune énergie ni envie de lui répondre. Cette simple phrase avait réussi à me rappeler toutes les fois où j’avais moi aussi attendu près de mon téléphone un appel qui ne venait pas. Toutes ces soirées annulées au dernier moment, ces promesses non tenues… “Je vais très bien, merci, as-tu besoin de quelque chose ?

- Pourquoi tu réagis comme ça, je voulais juste savoir comment tu vas. Je suis venu, ça te montre que je me soucie de toi, non ?

- David, je n’ai pas la force de faire semblant de nous donner des nouvelles à 21h30 devant la poubelle à recyclage du papier. Donc dis-moi ce que tu veux s’il te plaît !

- Ok, je vois… Regarde Eva, puisque tu me demandes d’aller droit au but, voilà : tu me manques, j’aimerais qu’on se redonne une chance.”

J’ai tellement attendu ce moment que j’ai l’impression de rêver éveillée (la poubelle en moins). Pourquoi il faut que ça arrive maintenant ?

“Eva ? Dis quelque chose, c’est pas ton genre de rester silencieuse.”

Sacré David qui me connaît si bien, tellement bien qu’il trouve toujours les mots qui me font fondre le cœur… Dans ma tête, c’est le défilé printemps-été des émotions !! Je suis en colère, je suis surprise, je suis attendrie, je suis perplexe, je veux lui hurler de me laisser tranquille, je veux me marier avec lui, je veux… Hachem, aide-moi !

“Ecoute David, je ne m’attendais pas à ça. J’ai besoin de réfléchir, parce que moi… Je ne sais pas ce que je veux.”

C’est sorti tout seul ! Mais ça apaise tout d’un coup (merci Hachem) et lui, en face, est déstabilisé, je le vois à son regard fuyant. C’est à son tour d’être silencieux de longues secondes.

“Ok, je comprends… Alors viens on va prendre un café et on discute calmement.

- Non, pas ce soir.

- Eva, je te demande juste d’aller prendre un verre, une heure, on discute et c’est tout.”

Clap de fin ? Non, ça, c’est dans les films où les personnages récitent un texte dont ils connaissent déjà la fin. C’est déjà un exploit de lui avoir dit que je ne sais pas ce que je veux, je n’arrive pas à lutter sur tous les fronts... Je cède pour le café.

Et hop ! Revenue la boule au ventre qui me plombait depuis des semaines, depuis cette fameuse rumeur au travail. Elle avait fini par partir, mais la visite surprise de David lui a offert un ticket retour express !

Inutile de dire que je n’arrivais pas à dormir cette nuit-là ni les nuits suivantes. Et pour couronner le tout, au travail, le vent avait (vite) tourné. Si les gens avaient arrêté de murmurer mon nom dans les couloirs, je ne mesurais que maintenant l’ampleur des dégâts.

Karen était allée inventer que Franck (mon directeur) et moi, nous étions plus que proches. Bien sûr, personne n’avait pris la peine de vérifier si c’était vrai avant de propager l’information… jusqu’aux oreilles de Franck !

Depuis, il m’évitait comme la peste. Au début, je m’étais crue paranoïaque, mais au fil des semaines, j’avais été forcée de constater qu’il m’évitait, qu’il ne me parlait plus. Je n’avais reçu aucun retour sur la soirée de lancement que j’avais organisée pour la boutique de luxe, alors que c’était lui qui m’avait confié ce projet !

Quant à Karen... mon amie (enfin, je l’avais cru) m’avait trahie et tous les jours ou presque, je la croisais dans les couloirs et elle faisait comme si elle ne me voyait pas. A la longue, c’était plus que pesant.

Mardi soir, j’avais invité quelques copines, dont Guila, à dîner à la maison. Je regrettais à présent mon idée. J’étais à plat moralement et je n’avais pas la force de jouer les hôtesses souriantes.

Mais bon, cette soirée était prévue depuis des semaines, je ne pouvais pas annuler à la dernière minute.

Heureusement, pendant le dîner, les sujets de discussion ne manquaient pas et l’ambiance était joyeuse.

Alors que je m’étais éclipsée pour débarrasser les plats, Guila débarqua dans la cuisine pour un petit tête-à-tête improvisé.

“Eva, est-ce que tu es sûre que ça va ? Je te trouve un air très fatigué.

- En principe Guila, je devrais me vexer que tu me trouves une vilaine tête, mais pour cette fois, tu as raison, je suis KO.

- Qu’est-ce qui t’arrive ? Je sais que depuis le mariage, on n’a pas eu le temps de discuter, mais je pensais que tout allait bien…

- Ohlala, ça, c’était avant ! Depuis, c’est la cata à tous les étages ! D’abord ma mère qui ne comprend pas que je puisse faire Téchouva, ensuite, au travail, la rumeur court que je suis avec mon directeur et que c’est pour ça que je suis promue. Ah oui, j’oublie de préciser que l’auteur de la rumeur c’est mon ex-super-amie Karen, sympa non ? Bien sûr, maintenant, mon directeur me fuit et je suis mise à l’écart. Et la cerise sur ce merveilleux gâteau, c’est David qui est revenu de nulle part et qui veut qu’on se “redonne une chance”.

- Ah oui, en effet, c’est assez intense. Pas étonnant que tu sois fatiguée.”

Elle était vraiment sincère, c’était touchant. Le simple fait qu’elle comprenne ma situation me donnait l’impression d’alléger un peu le poids de mes galères.

“Bon, comme on dit, le mal est fait pour cette histoire de rumeur, mais que vas-tu faire par rapport à David ? Tu penses que cette-fois ses intentions sont sérieuses ?

- Aucune idée. Ça ne l’a jamais été dans le passé, pourquoi cette fois ci ça changerait ? Le problème, c’est qu’une petite partie de moi espère toujours malgré tout.

- Tu sais, j’ai fait plusieurs Chiddoukhim avant de rencontrer Nathan et d’accepter de le revoir. Ce qui a fait la différence, c’est qu’il correspondait aux critères qui étaient importants pour moi : ses traits de caractère, sa vision de la vie de couple et de la famille.

- Quoi ? Tu es partie rencontrer Nathan avec une liste de cases à cocher ?

- Ce n’est pas vraiment une liste, mais ça aide ! Ça t’aide à mettre au clair ce qui compte pour toi et ça évite de se torturer le cerveau… Comme tu le fais maintenant !

- 1 point pour toi !

- Quant à ton travail, je suis désolée, je ne veux pas juger les gens, mais ce n’est pas la première fois qu’on me raconte ce genre d’histoires. C’est fou, dans le milieu religieux où j’évolue, je n’ai jamais entendu ce type de rumeurs. Une femme peut tout à fait faire carrière sans que tout de suite on s’imagine des horreurs. Mais ça n’est que mon avis.”

Une fois mes invitées parties, n’ayant aucune chance de trouver le sommeil, face à mon ordinateur, je me mis à lister ce que je recherchais chez un garçon. Et là, je pris conscience que je n’en avais aucune idée ! Désespérée, je me mis à googler “liste Chiddoukh” et là, bingo ! Je tombai sur un livre qui s’appelle “Le Chiddoukh”, hyper clair, qui liste les critères qui pourraient m’aider. Et doucement, j’arrivais à me faire une idée des points qui avaient un écho chez moi : gentil (comme moi), calme (ok, pas comme moi) et… qui a envie de progresser dans la pratique du judaïsme (tout pareil).

Quelques jours plus tard, je retrouvais David après le travail, dans le lobby du nouvel hôtel près du pont de l’Alma. Tout comme l'hôtel, David est très chic et là, pour le coup, on se croirait dans un film. Il ne manque que la bande-son. On s’assoit près de la fenêtre et je constate qu’il est finalement plus nerveux que moi. Cette histoire de liste m’a aidée à me calmer. Il me propose de commander du champagne, mais moi, j’ai envie d’avoir les idées claires, donc, sagement, j’opte pour un cocktail sans alcool.

Il me demande comment je vais, ce que je deviens… Moi qui avais tant attendu son attention, je suis flattée, mais, étonnamment, je n’ai pas non plus envie de partager avec lui toutes mes récentes aventures. Je l’écoute me parler de lui, de son travail dans la finance, aussi stressant qu’excitant, ses soirées, ses sorties, ses voyages… Ça pétille autant que les bulles de sa coupe de champagne.

“Tu sais Eva, je te raconte tout ça, mais ne crois pas, tu m’as manqué. J’ai beaucoup pensé à toi ces derniers temps et j’ai réalisé que j’avais du mal à passer le cap de l’engagement. Mais je tiens beaucoup à toi et j’ai envie qu’on retente, parce qu’on était bien ensemble et je pense qu’on pourrait être mieux encore.

- Mais… Comment tu verrais les choses si on retentait ? Qu’est-ce qui changerait par rapport à ce qu’on a déjà vu dans le passé ?

- Je sais que je t’ai blessé Eva, mais tu sais que je ne le faisais pas exprès. Je m’excuse pour les erreurs du passé. On se connait toi et moi, on se comprend sans même se parler. Est-ce que je t’ai manqué ?

- Et comment tu imaginerais les choses entre nous ? La question de savoir si je t’ai manqué ou pas… ce n’est pas le problème. Tu as envie de t’engager sérieusement ? Et comment tu imagines la vie pour nous deux ?

- Bah oui ! Qu’est-ce que tu crois ? Je ne sais pas ce que tu veux que je te dise qui va changer. On sera ensemble, c’est bien, non ? J’ai l’impression de passer un entretien d’embauche là ! “Quels sont vos objectifs à long terme, Monsieur Arrouas ?”

- Et alors, où est le problème ? C’est ok de poser ce genre de questions quand il s’agit d’un poste dans une entreprise qui ne t’appartient pas et pour une durée de 2-3 ans maximum... mais pour ce qui est du projet de passer sa vie ensemble et de construire une famille, tu trouves ça trop artificiel ?

- Je t’avoue que j’ai du mal à te suivre. Avant, tu avais l’air moins hésitante. Je sais que je t’ai blessée, mais qu’est-ce qui a changé de ton côté ? Ma question est simple : veux-tu qu’on reprenne, oui ou non ?”

David avait raison. Il me connaissait bien. Beaucoup de choses avaient changé depuis son dernier départ. Toutes mes certitudes avaient éclaté : ma famille, mes amies, mon travail, lui. Et si mille fois j’avais rêvé de ce moment, je ne savais pas quoi lui répondre, parce que, d’une façon ou d’une autre, c’était choisir un chemin de vie.

Avec ou sans David ?

La suite, la semaine prochaine...