Il leur dit : « Sortez et identifiez le bon chemin auquel l’homme doit s'attacher. » (…) Rabbi Elazar dit : « un bon cœur. » Rabbi Yo'hanan leur dit : « Les paroles de Elazar ben Arakh me semblent préférables aux vôtres, car les vôtres sont incluses dans les siennes. »

QUESTIONS

1. Que signifie avoir un bon cœur ?

2. Pourquoi le fait d'avoir bon cœur englobe-t-il toutes les autres qualités ?

Rabbi Elazar répond à la question de Rabbi Yo'hanan sur le bon chemin auquel on doit adhérer, en répondant par : un bon cœur. Après avoir écouté toutes les réponses de ses élèves, Rabbi Yo'hanan conclut que la réponse de Rabbi Elazar est sa préférée, car « les vôtres sont incluses dans les siennes. » Cela signifie que toutes les Ma'alot (qualités) des autres attributs positifs émanent d'un bon cœur.

Des questions évidentes se posent : que signifie exactement d'avoir bon cœur, et pourquoi Rabbi Yo'hanan apprécie-t-il cette réponse plus que toutes les autres ? Les commentateurs abordent cette question sous divers angles.

Certains commentateurs affirment que cela se réfère aux désirs et pensées de l'homme, tandis que d'autres expliquent qu'il s'agit d'une référence au Sékhel, à l'intellect, que nous attribuons généralement au cerveau. Les deux avis citent divers versets du Tanakh à l'appui de leur approche, et nous pouvons suggérer que le cœur fait allusion à la fois au siège des désirs et à la faculté de penser.

Bien que nous pensions évidemment à travers notre cerveau, le processus de réflexion émane des désirs du cœur. En conséquence, il est impossible de penser de manière totalement subjective sans être influencé par le cœur. De plus, le cœur détermine notre manière de considérer le monde. On le voit à travers l'analyse du verset : « Vous ne vous égarerez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux. » On ne doit pas suivre les désirs de son cœur et de son regard. On pourrait penser que l'ordre devrait être inversé : un homme voit quelque chose de désirable, puis il se laisse entraîner par ses désirs provenant du cœur. Mais en réalité, les désirs d'un individu déterminent ce qu'il voit, et la manière dont il le voit. En réalité, le cœur détermine la conduite du regard. De ce fait, Rabbi Yo'hanan affirme qu'un bon œil est inclus dans un bon cœur.

De même, les autres qualités citées par la Michna – un bon voisin, un bon ami, prévoir l'avenir – suivent automatiquement si un homme est doté d'un bon cœur, car si ses désirs sont bons, il en viendra certainement à avoir de bons voisins et amis, et à réfléchir aux conséquences de ses actions.

L'idée de l'influence du cœur se trouve dans la Halakha. Le Choul'han 'Aroukh[1] écrit que les Téfilines du bras sont dirigées directement vers le cœur de l'homme, car le cœur est le siège des désirs et des pensées. Le Gaon de Vilna commente que cette idée est la même que celle exprimée dans cette Michna. Si le cœur est focalisé vers Hachem, alors tout le reste se met en place.

La question demeure : que signifie exactement un « bon » cœur ? Réponse possible : la définition du « bon » est tout ce qui rapproche l'homme de D.ieu et de « mauvais » tout ce qui l'éloigne de D.ieu. Dans notre façon courante de voir les événements, nous jugeons avec subjectivité s'ils sont agréables ou non. Par exemple, une maladie peut être considérée comme « mauvaise », ce qui donne lieu à la question suivante : pourquoi Hachem permet-Il que des gens bien soient affectés par des mauvaises choses ? En réalité, une maladie n'est ni objectivement mauvaise ou bonne, mais c'est plutôt la manière dont une personne réagit à la maladie qui détermine si elle est positive ou négative. Si elle se rapproche de Hachem à travers la maladie, au final elle était positive, mais si elle l'éloigne de Hachem, elle est négative.

De la même manière, un bon trait de caractère est celui qui rapproche l'homme de Hachem, tandis qu'un mauvais trait de caractère en est un s'il éloigne la personne de Hachem. Toutes les qualités mentionnées dans la Michna sont positives en ce qu'elles rapprochent l'homme de Hachem, mais Rabbi Yo'hanan affirme que le trait le plus important de tous est un bon cœur, car si un homme a des désirs et des pensées qui vont le rapprocher de Hachem, alors tout le reste se mettra en place : il verra le bien chez les autres, du fait qu'ils sont faits à l'image de D.ieu, et il voudra avoir des voisins et amis qui l'aident à se rapprocher de Hachem.

La réponse optimale à la question initiale de Rabbi Yo'hanan sur le bon chemin que l'homme doit emprunter, à partir duquel tous les bons traits de caractère émanent, est un bon cœur – à savoir un homme animé des désirs et des pensées de se rapprocher de Hachem. Lorsqu'il est mû par ces sentiments, tout le reste se met en place.

 

[1] Choul'han Aroukh 25,5