L'iconique Vacanze Romane, avec Gregory Peck et Audrey Hepburn, qui en Vespa traversent Rome, alors que la jeune princesse – interprétée par Hepburn – se permet une virée incognito dans la capitale italienne, n’est plus jouable aujourd’hui. La semaine dernière, bloquée en Europe suite à la "conjoncture actuelle", ballotée au gré des vols annulés et des nouveaux itinéraires, j' y étais et j’ai essayé pour vous : vous n’avez rien raté.


Jusqu’à il y a peu, j'idéalisais l’Italie, la mettant au “top ten” des pays encore fréquentables en Europe pour sa générosité, son accueil et sa chaleur humaine.
Mais… 

De l’aéroport de Fiumicino jusqu’au Colisée, version 2025, les Italiens se font très rares dans leur propre capitale, à tel point que je n'en ai rencontré qu'un seul lors de mon séjour : un chauffeur de taxi taciturne et peu bavard, sans doute fatigué des masses humaines à transporter à longueur de journée.
Piazza Vittorio Emanuele, je cherche des Romains 100 % grano duro. Mais je dois me faire à l'évidence : kiosques, fast-food, petites restaurations et souvenirs, tout est hindou. Je n’ai rien contre eux, mais si j’ai pris un billet pour l’Italie, ce n’est pas pour me retrouver aux Indes.
Je descends la Via Appia et le crépuscule descend avec moi sur les petites ruelles de la ville éternelle ; les façades ocres et roses des bâtisses, si typiquement romanesques, prennent une teinte douce et pastel, alors que des pins verts scandent le paysage, comme un maestro avec sa baguette.

“Vacanze Romane” : on ne me la fera plus !“Vacanze Romane” : on ne me la fera plus !

C’est beauuu…
Mais, bientôt arrivée au niveau de l’impressionnant monument de marbre blanc du Roi d’Italie, je suis rattrapée par une cohue affamée, qui va rapidement assaillir les petites trattorie qui s’alignent sur les trottoirs. 

Pour garder un semblant d’authenticité, les gérants des restaurants ont déposé sur chaque table une bougie vacillante dans une verrine, qui diffuse une lumière tamisée.
Je ne suis pas dupe.
Gregory et Audrey, depuis longtemps, ont été remplacés par Franz et Martha, tout rouges d’un coup de soleil attrapé ce matin devant l’arc de Titus.
Le charme est rompu.
Tout cela pour vous dire que Rome, on ne me la refera plus.
Mais j’ai appris quelque chose : on n’a pas le droit de vendre son pays pour une poignée de deutsche mark ou de yen. L’Italie a perdu sa personnalité dans ce dédale touristique. Et mon chauffeur muet en est le symptôme.
Car un Italien qui se tait est un Italien qui a muté.

Et le lien juif dans tout cela ?
J’y arrive.
Dans la ville sold out, je cherche un restaurant Cachère. Rome a un ghetto –, et le mot est d’origine italienne.
À cinq minutes de la foule, une ruelle piétonne et discrète s'invite à moi : je suis en lieu sûr. 

Des Kippot fleurissent sur les têtes en toute liberté, le touriste se fait plus rare, et surtout, dans le menu je lis en entrée, "Carciofo alla giudia". Artichaut à la juive.
Et là, sur une terrasse romaine, dans la brise de la soirée tombante, à côté de moi, un couple charmant finit son tiramisu

Ils sont français, mariés depuis 8 ans, deux enfants qu’ils ont laissés aux grands-parents pour cette escapade italienne ; elle est médecin, pneumologue, et ils me disent qu’ils ont commencé l'Oulpan à Paris car, dans cinq ans maximum, ils veulent venir en Israël.
Ils se tiennent la main, dans la trattoria Il Baguetto

Il a une Kippa. Ils regardent dans la même direction.
Ça existe donc encore la romantica, et c’est chez nous qu’elle se cache, la vraie : vibrante et passionnante !

Je les ai trouvés, Gregory et Audrey, al modo ebraico. Façon juive. 

Et c’est sans aucun doute la plus belle des façons.

“Vacanze Romane” : on ne me la fera plus !

Une « Mamie Nazie » : Ursula Haverbecka