Les deux parachiot Vayéra et Bo relatent les dix plaies envoyées par Hachem sur l’Egypte. La Thora nous rapporte que chaque plaie était précédée d’environ trois semaines pendant lesquelles Moché et Aharon mettaient Pharaon en garde de ce qui allait se produire. Pourtant, ce n’est qu’à la suite de la dernière plaie, la mort des premiers-nés, que Pharaon céda et accepta de laisser les Juifs partir. Hachem aurait pu envoyer une seule plaie et faire en sorte que Pharaon les renvoie immédiatement. Pourquoi toutes ces étapes avant la guéoula finale ?

En réalité, Pharaon et l’Egypte sont le symbole même du yetser hara’. Or le yetser hara’ ne se laisse pas vaincre aisément. A l’instar de Pharaon, qui à chaque plaie, supplie Moché de faire cesser la calamité et promet en échange de libérer les Hébreux pour revenir sur sa décision dès la plaie terminée, ainsi le yetser hara’ ne s’avoue jamais vaincu et revient sans cesse à la charge.

Plus encore, lorsque les bné Israël quittent l’Egypte, s’engagent dans le désert et se retrouvent face à la mer, il s’ensuit un grand moment de désespoir. En effet, nos Sages expliquent que les bné Israël ont levé les yeux au ciel et y ont vu le prince spirituel de l’Egypte, réceptacle des forces du mal, en train de les poursuivre. Ils ont vu que l’heure était plus grave encore qu’en Egypte, du fait qu’à présent la guerre se déroulait sur un mode spirituel. Il en va de même avec le yetser hara’ : on le met en échec pendant des mois, voire des années, on en vient même à l’oublier et soudain, il apparaît de nouveau, avec toujours plus de force et de vigueur. C’est alors qu’intervient le message d’Hachem à Moche rabbénou : ne pas avoir peur et se renforcer au niveau de la émouna et du bita’hon.

A l’époque de l’esclavage des bné Israël, l’Egypte était le pays le plus dépravé du monde (ce que nos Sages appellent « ‘ervat haarets ») et toutes les formes de perversité existantes y étaient réunies. L’Egypte abritait même les 49 cha’aré touma (49 niveaux d’impureté) et Pharaon, qui était à la tête de cet empire du mal, est le symbole même de l’impureté et du vice. Hachem, en confrontant les bné Israël à une telle intensité dans le mal, souhaitait leur enseigner à eux ainsi qu’aux générations futures la manière de combattre le yetser hara’.  

Nos Sages enseignent : « le yetser hara’ de l’homme se renforce tous les jours » et « le yetser hara’ de l’homme se renouvelle tous les jours ». Nous voyons de ces deux citations, que non seulement, le mal se renforce constamment, mais en plus, il se renouvelle et se pare de nouveaux attraits tous les jours. Les tentations qu’il propose sont chaque jour différentes. Ainsi, il convient à l’homme d’être toujours vigilant et de ne jamais considérer la bataille comme gagnée. C’est pourquoi le yetser hara’ est extrêmement puissant à notre époque, tout le monde se sent assailli de part et d’autres. En réalité, Hachem souhaite nous préparer à la venue du machia’h en nous faisant progresser rapidement. S’il n’y avait aucun problème, si nous n’étions pas confrontés à de si nombreuses tentations, nous serions tentés d’être moins vigilants et de nous contenter de notre niveau spirituel sans chercher à s’élever davantage.

Prenez un lieu comme la Suisse. C'est le pays le plus paisible au monde. Rarement engagé dans les guerres, doté de paysages magnifiques, il y fait bon vivre. A priori, voilà un lieu idéal pour se développer et pour développer ses facultés intellectuelles ou artistiques. Pourtant, nous constatons que la Suisse n’a produit que très peu d’artistes ou de « grands personnages ». Lorsque tout se passe bien et que la vie est paisible, l’être humain a tendance à se reposer sur ses acquis. Lorsqu’au contraire, Hachem lui envoie des épreuves,  l’homme apprend à les surmonter et à aiguiser ses capacités. Il ne faut jamais régresser ou se décourager. Au contraire, il faut comprendre que si Hachem a envoyé tel ou tel problème, cela vise à nous faire grandir. En réalité, c’est un signe d’amour qu’Hachem nous envoie, à l’instar d’un parent qui apprend à marcher à son enfant et qui lui lâche la main durant quelques instants. Hachem ne nous abandonne jamais, seulement Il nous en donne parfois l’impression afin de nous apprendre à nous réaliser et à découvrir toutes les forces contenues en nous. Et cela constitue une preuve d’amour incontestable.