Ces dernières semaines, nous avons évoqué des cas où l’on n’est pas obligé de restituer un objet perdu. Le facteur le plus décisif qui entraîne l’obligation de restituer un objet perdu est la présence d’un signe d’identification (un Simoun), à travers lequel la personne qui le réclame peut prouver qu’il est le véritable propriétaire. Dans cet article, nous allons aborder ce qui constitue un Simoun valable ou non.

Le Simoun doit sortir de l’ordinaire, de sorte qu’il soit très difficile pour une personne malhonnête de « prouver » qu’elle est le propriétaire de l’objet en devinant les Simounim. Par exemple, un homme prétend avoir perdu un stylo, et sa preuve est qu’il est bleu. Ce n’est pas un Simoun convaincant, car de nombreux stylos sont de cette couleur.

Un Simoun acceptable peut être quelque chose d’unique propre à l’objet, comme : « Il avait des marques rouges sur le côté » ou « il était cassé au bout ». Si, néanmoins, cet élément apparaît fréquemment pour ce type d’objets, ce n’est pas un Simoun satisfaisant. Par exemple, l’inscription « or quatorze carats » gravée sur un objet n’est pas un Simoun acceptable. Si l’objet a une taille ou une longueur exceptionnelle, cela peut être considéré comme un Simoun acceptable.

Une autre sorte de Simoun peut être le nombre d’éléments trouvés, comme par exemple : « Il y avait cinq clés sur le porte-clés » ou « il y avait huit billets d’un dollar dans le portefeuille ». Néanmoins, une quantité standard, comme un objet vendu en pack de cinq, n’est pas un Simoun valable, car il ne constitue pas une preuve solide que le demandeur est le propriétaire légitime.

Si le demandeur peut identifier une particularité du papier d’emballage ou du contenant de l’objet, il pourra ainsi établir la preuve que l’objet lui appartient. Par exemple : « L’argent se trouvait dans un petit sac plastique contenant deux petits papiers avec des adresses » est un bon Simoun. Néanmoins, révéler que l’objet se trouvait dans un récipient ordinaire n’est pas une preuve acceptable. Si l’on peut désigner un élément exceptionnel attaché ou relié à un objet, cela constituera une preuve de l’objet lui-même. Par exemple, une écharpe grise coincée dans la poche d’un manteau est un Simoun valable.

Enfin, la localisation spécifique de l’objet peut parfois constituer un bon Simoun. Par exemple : « J’ai laissé le sac derrière l’arbre à côté du terrain de football. » Néanmoins, une identification générale de la localisation n’est pas valable; en conséquence : « Je l’ai laissé au parc » n’est pas un bon Simoun.

Comment procéder en l’absence de Simoun ? Bien que, dans certains cas, celui qui a découvert l’objet puisse le prendre et le garder, dans certains cas, il devra le garder jusqu’à la venue du prophète Eliyahou qui nous renseignera sur l’identité de son propriétaire[2].

Lorsque quelqu’un perd un objet, il en garde la possession jusqu’à ce qu’il renonce à le retrouver un jour. Cet abandon constitue un renoncement à sa propriété. La Loi juive stipule qu’un objet dépourvu de Simoun (y compris un manque de localisation spécifique qui peut être employé à titre de preuve de propriété) est considéré comme abandonné une fois que le propriétaire a réalisé qu’il l’a perdu. La raison tient à ce qu’il reconnaît qu’il n’a pas de moyen de prouver qu’il est l’authentique propriétaire de l’objet, en conséquence, il va présumer que même si celui qui l’a trouvé veut le rendre, il en sera incapable.

Lorsqu’on trouve un objet perdu qui ne porte pas de Simoun, on doit tenter de déterminer si le propriétaire s’est rendu compte qu’il avait perdu l’objet. Si l’on ne peut pas déterminer avec certitude que le propriétaire s’est rendu compte de la perte au moment où on l’a trouvé, on doit garder l’objet jusqu’à la venue d’Eliyahou qui révèlera l’identité de son propriétaire.

Dans un certain nombre de cas, nous pouvons présumer que le propriétaire a découvert sa perte avant que celui qui le découvre ne trouve l’objet.

1. Lorsque quelqu’un porte un objet lourd qui tombe, il est très probable que, peu de temps après l’avoir perdu, il va réaliser sa perte. En conséquence, lorsque quelqu’un trouve un objet lourd qui ne porte pas de Simoun, il peut présumer que le propriétaire savait qu’il l’avait perdu avant que celui qui l’a découvert ne le trouve. Par exemple, si on trouve un nouveau marteau dans un centre commercial où les clients portent leurs achats avec eux, on pourra le conserver;[3] en effet, c’est un nouveau marteau qui ne porte aucun Simoun et le fait qu’il soit lourd signifie que le propriétaire aura tôt fait de réaliser qu’il l’a perdu peu de temps après qu’il soit tombé[4].

2. Si quelqu’un trouve de l’argent, il peut présumer que le propriétaire est déjà conscient de sa perte. En effet, les gens sont particulièrement vigilants vis-à-vis du montant d’argent liquide qu’ils portent sur eux et ont tendance à vérifier fréquemment leurs poches pour s’assurer qu’ils l’ont encore. En conséquence, lorsqu’on trouve de l’argent liquide, celui qui le trouve peut présumer que le propriétaire a renoncé à l’argent peu de temps après l’avoir perdu et pourra le conserver. La règle est la même concernant d’autres objets de valeur comme des bijoux, car leurs propriétaires ont tendance à vérifier leur présence de manière fréquente. En conséquence, on peut garder un bijou trouvé à terre à condition qu’il ne porte pas de Simoun.

3. Lorsqu’on trouve un objet qui a clairement été perdu depuis un bon moment, on pourra le garder, car il va de soi que le propriétaire s’est rendu compte de sa perte avant que celui qui le trouve ne le découvre.



[1] Une bonne partie des informations pour la rédaction de ce texte sont extraites de l’ouvrage : Halachos of Other People's Money du Rav Yisroel Pinchos Bodner.

[2] Les rabbins nous enseignent qu’à l’époque du Machia’h, le prophète Eliyahou viendra et résoudra toutes les incertitudes dans la loi juive. Il révèlera également l’identité des objets perdus conservés par ceux qui les ont trouvés.

[3] Ceci, bien sûr, après que l’acheteur a payé pour le marteau.

[4] Il faut remarquer que, comme nous l’avons mentionné plus tôt, si la majorité des clients fréquentant le centre commercial sont non-juifs, celui qui le trouve peut le garder dans tous les cas.