L’âme humaine est probablement l’un des domaines les plus complexes de la recherche. A la fois abstraite et variable d’un individu à l’autre, l’étude de l’âme humaine a cependant fasciné l’homme depuis toujours. Comprendre ses rouages, connaître ses limites et définir ses besoins ont toujours donné à l’homme l’espoir qu’avec la maîtrise de son être intérieur, il accèderait au bonheur.

Si plusieurs modèles ont été proposés par les philosophes et penseurs de la Grèce antique, c’est le modèle du psychanalyste Sigmund Freud qui en eut le plus grand succès. Et comme le Rambam le dit « Accepte la vérité de celui qui l’a dit » (Introduction aux huit chapitres). 

Pour Freud, c’est la recherche du plaisir qui est le modèle absolu sur lequel l’âme est bâtie, son moteur. Toute la volonté de l’homme, dit-il, n’a pour but que l’assouvissement des plaisirs et la fuite des souffrances. L’homme ne vit que pour cela. Et même le besoin fondamental d’identité, le fameux « Qui suis-je ? » se voit confondu avec la recherche et la quête des plaisirs. D’après Freud, on s’identifie avec notre recherche des plaisirs…

Si Freud a discerné en l’homme ce besoin inlassable de plaisir comme étant son moteur, la Torah lui accorde qu’il a bien défini un pan du Néfech, dans laquelle se trouvent nos penchants.

Après Freud vient Adler, son élève, qui schématisa une toute autre définition de l’âme. D’après lui, l’homme est un être social qui a pour seule ambition l’ascension sociale. Toute la volonté de l’homme ne tend que vers ce but d’après lui - se faire une place des plus prestigieuses dans la société, c’est là son ultime motivation. C’est de cela que dépend son estime de soi et son amour propre mais également ses maux… Adler ne réfute pas la vision freudienne selon laquelle l’homme est constamment à la recherche des plaisirs, il la situe juste sur un autre plan, moins animal, celui de l’ascension sociale.

Si Freud et Adler ont tous deux donné une définition de l’homme tournant autour de ses instincts, Victor Frenkel, lui, définit l’homme comme étant à la recherche de sens…

Lorsque les psychologues définissent un peu plus que les penchants

Victor Frenkel était un psychologue qui vécut l’enfer d’Auschwitz. Les nazis lui prirent tout ce qu’il avait de plus cher - ses parents, son frère ainsi que sa femme bien-aimée. Cependant, il y avait une chose dont ils ne purent le priver : son professionnalisme. Frenkel examina l’âme humaine en proie à des situations extrêmes telles qu’aucun autre psychologue ne l’eut jamais observé. Il consigna ses analyses et bâtit son propre modèle qu’il nomma la logothérapie.

Victor Frenkel remarqua que les prisonniers des camps qui avaient une raison de vivre, qu’elle soit spirituelle ou matérielle, comme le fait de survivre l’horreur des camps dans le but de le faire savoir au monde entier, survivaient. Les autres se laissaient mourir, las de tous ces tourments. Frenkel en conclut que dans une réalité où ni les plaisirs, ni la position sociale ne sont au rendez-vous, il y a tout de même un moteur à la volonté, quelque chose de plus profond dans le mécanisme de l’âme humaine – celui de vivre pour un but. 

« Si une personne a le pourquoi vivre » dit-il « il trouvera aussi le comment… »

Pour Frenkel, l’homme est toujours à la recherche de sens « pourquoi vivre ? », « Dans quel but ? ». Et c’est ce besoin identitaire fondamental qui guide tous les pas de l’homme depuis le moment où il est en âge de conscience jusqu’à son dernier souffle… 

On raconte qu’un jour, un homme âgé est venu consulter Frenkel. Il souffrait terriblement du décès de sa femme au point d’en perdre le goût de vivre. 

Frenkel lui demanda « Qu’adviendrait-il si c’était vous qui étiez décédé avant votre épouse, et qu’elle dut subir votre absence comme vous subissez la sienne ? »

L’homme poussa un soupir « Oh ! Ce serait terrible pour elle, elle ne l’aurait pas supporté ! »

Frenkel continua et lui dit « Voyez-vous, cette tristesse lui a été épargnée grâce à vous. Maintenant, vous devez en payer le prix en continuant à vivre tout en prenant son deuil convenablement. » 

L’homme se leva et, sans dire mot, serra la main du praticien et s’en alla. Une fois le seuil de la porte franchi, son mal s’était comme volatilisé. Au moment où Frenkel donna une raison à sa souffrance, l’homme put la supporter sans le moindre problème…

Ainsi, Victor Frenkel nous révéla que l’homme est inlassablement à la recherche de sens dans la vie, qu’il aspire à une raison de vivre. Mais si ce constat est bien vrai, il ne dit pas quel est le sens qui remplirait véritablement son existence. 

Tout sens donné par un système de pensée humain peut donner, dans une certaine mesure, une raison de vivre à l’homme, mais est-ce vraiment ce sens-là que l’homme recherche réellement ? Qui est véritablement à même de donner cette raison de vivre tant recherchée par l’homme ?

Le sens que Victor Frenkel donna à cet homme en mal être était-il juste ? Il s’avère que non, puisque si la situation était inversée, comme l’a fait imaginer Frenkel à son patient, sa femme n’aurait pas non plus souffert, contrairement à ce que Frenkel affirma, car elle aussi serait allée voir Victor Frenkel qui lui aurait donné une raison de supporter sa souffrance…

Qui est apte à donner le sens de la vie ?

Lorsque le sens est donné par un système élaboré par un homme, il n’y a aucune garantie qu’il soit vrai. D’ailleurs, comment saurait-il concevoir un sens absolu, lui qui est pris au piège de ses propres limites ainsi que de ses intérêts ?

Combien ont sacrifié leurs vies pour l’idéal marxiste, ou celui du communisme ? Combien se battent encore aujourd’hui pour faire régner « l’idéal » de la démocratie, ou encore le patriotisme ? Combien ont tué et se sont fait tués pour leurs rêves ? Et combien ont finalement été déçus, vidés de leur raison de vivre lorsque leur idéaux ont été pervertis ou dénoncés ?

Si l’homme est en quête de sens et que ce sens revêt pour lui un besoin si vital, ce n’est certainement pas un sens artificiel façonné par l’esprit des hommes qui lui fera trouver gain de cause, un sens poussé par des intérêts ou des calculs… 

Seul un sens absolu et authentique dicté par l’Etre suprême, Créateur de l’âme humaine pourrait le satisfaire, un sens transcendantal et éternel. La Torah donné par D.ieu n’est pas seulement un recueil de lois dont le but est de nous parfaire, elle est aussi ce sens fondamental dispensé par l’Eternel à ses créatures pour leur donner une raison de vivre, un but à atteindre. 

Chaque effort, chaque pas de plus vers la Torah offre à l’homme cette raison de vivre fondamentale dont son âme est assoiffée. Un chemin vers l’infini qui se construit pas à pas dans cette vie-là, ici et maintenant.

Un sens gravé au sein de l’existence même, celui de ressembler à son Créateur, de chercher Sa proximité, de connaître Sa sagesse et de dispenser Sa parole au monde entier. Le but d’une vie qui donne à l’homme sa raison d’être…