Tout éducateur a dans les mains 2 outils pour pousser un enfant à agir, que nous appelons ‘l’astreinte’ et le ‘’Hinoukh’. Ces 2 systèmes sont complémentaires. Il est impossible d’éduquer un enfant à une quelconque conduite morale sans le pousser auparavant à agir sans comprendre. Puis une fois l’action réalisée, il est impératif que l’enfant intériorise la portée de son acte. Sans cette seconde phase, l’enfant se sent brimé, et risque de rejeter sévèrement toute son ‘éducation’ dès qu’il en aura l’opportunité. Et même si on élève un enfant sans contrainte en le motivant par des récompenses uniquement, on nuira au bout du compte à son équilibre, car on lui fausse dans ce cas son échelle de valeur. Il apprend ainsi à ne voir que son intérêt dans toute occasion; lorsqu’il découvrira qu’il peut gagner bien plus en renonçant à certaines règles d’éthique, il n’hésitera pas à changer de mode de vie.

On pourrait comparer la complémentarité de l’astreinte et du ‘Hinoukh aux interdits de Chabbat de Sotère et Koréa – détruire ou déchirer. Il faut savoir que le dénominateur commun des 39 travaux du Chabbat n’est pas la fatigue physique, mais le fait de créer pendant Chabbat une chose qui n’existait pas. Or, les 2 travaux cités sont des actions destructrices, sans aucun caractère de création artisanale. La Guemara enseigne de ce fait que l’on ne transgresse l’interdit (de la Torah) que si ces actions entrent dans le cadre d’une construction – détruire pour construire sur un terrain plat, déchirer pour mieux recoudre. Dans ce même ordre d’idée, toute astreinte – forçage, formatage, récompense – est en elle-même une action de destruction de l’enfant, anti-éducative. Elle est néanmoins incontournable, et prend même un caractère de construction lorsqu’elle est suivie du ’Hinoukh. Contraindre un enfant à agir sans lui faire ensuite intérioriser l’importance de son acte est aussi cruel qu’un architecte qui vous promet de rénover votre vieille maison, détruit tous les murs, puis vous laisse en plan !

Quelques heures avant l’écriture de ces lignes, j’ai assisté à une scène qui m’a rappelé que même des personnes raffinées, sincèrement investies dans l’étude de la Torah, d’une gentillesse et honnêteté remarquables, peuvent s’imaginer éduquer correctement leurs enfants avec un tel formatage. Alors tentons de mettre le coup final à ce système 'éducatif' en dévoilant un nouvel aspect du désastre : le conditionnement.

Au milieu du XIXe siècle, les Tziganes étaient réputés pour leur capacité à dompter les ours, en faisant danser ses impressionnantes bêtes à l’écoute d’une agréable mélodie jouée à la flûte. Ces dompteurs ne se sont évidemment jamais souciés d’apprendre aux ours à savourer un canon de Pachelbel ! Le secret de leur réussite était bien moins enchanteur : les Tziganes mettaient les ours sur un sol brûlant, dès leur plus jeune âge, et jouaient en même temps la même mélodie. Pour ne pas se brûler les pieds, l’ours était contraint de ‘danser’. En réitérant le procédé plusieurs fois, l’ours assimilait la mélodie au sol bouillant. Il conditionnait donc la mélodie à la brûlure. Après un bon dressage, il suffit de jouer de cette mélodie luciférienne pour que l’ours croie que ses pieds le brûlent, et se mette de ce fait à danser. Pire encore : les études scientifiques sur les animaux conditionnés ont mis en évidence que l’animal ne croit pas uniquement qu’il va se brûler, mais qu’il se brûle réellement ! Par technique de TEP qui permet de localiser la douleur dans le cerveau, il a été prouvé que le cerveau émet des réels signaux de douleur au reste du corps !

Le phénomène du conditionnement existe aussi chez l’être humain. Inconsciemment, l’homme conditionne des sensations à des évènements. Et parfois même, alors qu’il n’y aucun rapport logique entre eux.