Je souhaiterais traiter dans cet article d’un cas concret qui s’est présenté à moi cette semaine et que je trouve riche d’enseignements…

Une maman d’une charmante petite fille de 5 ans me téléphone pour me soumettre le cas suivant.

Sa fille, que nous appellerons Léa, est scolarisée au gan 3 d’une école en France, où l’apprentissage de la lecture se fait de telle sorte que les enfants sont partagés en 3 groupes selon leur niveau.

Notre petite Léa a toujours été dans le groupe 1 (celui du meilleur niveau), mais il y a quelques semaines, elle a dit à sa maman que la Mora l’avait mise dans le groupe 2.

Quelques jours plus tard, elle lui dit, au grand plaisir de sa maman, qu’elle est à nouveau dans le groupe 1.

Toutefois, cette semaine, à la réunion de parents d’élèves, la maman apprend que sa fille est en réalité toujours dans le groupe 2.

Le but de son appel est de savoir comment réagir.

La réaction première est que, fort de constater un gros mensonge, une maman se doit absolument de le corriger, et de façon très énergique.

Le Emet, la vérité, l’honnêteté est une qualité indispensable, le mensonge étant un très vilain défaut qu’il ne faut pas laisser s’installer. Léa a purement et simplement dupé sa maman.

Toutefois, avant de réagir sur le vif, cette maman a très intelligemment réfléchi.

Expliquons-nous :

Une enfant de 5 ans ne dit pas à sa maman qu’elle est dans un groupe plus élevé que la réalité pour rien. Il est vraiment important d’essayer de rentrer dans sa petite tête et de comprendre son comportement. Et effectivement, la maman m’a dit avec beaucoup d’honnêteté : « J’ai des exigences trop élevées ».

Tel est sans aucun doute le problème. Léa a du ressentir une grosse déception chez sa maman lorsqu’elle lui a dit qu’elle avait été « rétrogradée », or, le désir le plus cher de tous les enfants est de briller dans les yeux de leurs parents. Il est très difficile, voire insupportable, pour un enfant de ressentir que ses parents ne sont pas fiers de lui.

Notre petite Léa a ainsi fait un vilain mensonge, juste dans le but de coller aux attentes de sa maman et de briller à nouveau pour elle. La maman m’a clairement dit qu’elle avait réalisé qu’elle était elle-même à l’origine de l’attitude de sa fille.

En fait, la plupart des cas que je rencontre s’inscrivent dans un schéma comparable. Le mensonge est une réponse à une attitude des parents. Comme un trop plein de sévérité, qui  entraîne une peur chez les enfants, par exemple.

Maintenant que la cause a été mise en évidence, quelle attitude adopter ?

Dans un premier temps, et c’est là l’essentiel, remonter à la racine. Notre Léa a besoin de sentir sa maman fière d’elle, il faut, donc, la sécuriser. Sa maman doit ainsi lui dire, par exemple : « Tu sais ma chérie, je suis très fière de toi. La Mora m’a fait beaucoup de compliments à ton égard. »

Ce que nous lui disons doit être vrai, bien évidemment, nous n’allons tout de même pas mentir !!!

La prochaine fois que la maman aura l’occasion de lire avec sa fille, il faudra absolument qu’elle la mette en situation de réussite et qu’elle la complimente.

Ce sentiment de bien être que ressent alors l’enfant est un excellent moteur de progression.

Ensuite, Léa doit savoir que sa maman est au courant qu’elle est toujours dans le 2ème groupe. Elle doit ressentir que ça ne sert à rien de transformer la vérité. Toutefois, il faut le faire sans reproche et sans s’appesantir sur le sujet. Cela ne servirait qu’à la mettre mal à l’aise. Et, comme nous l’avons vu, c’est le bien être qui permet de progresser.

Une phrase du type : « Je suis très contente que tu sois dans le deuxième groupe, d’ailleurs, la Mora m’a dit que tu es très bien dans ce groupe » est tout à fait appropriée.

Enfin, dès le plus jeune âge, il faut vous convaincre, et, ainsi, convaincre vos enfants, que ce qui est important dans la vie ce sont les efforts. Hachem nous demande une obligation d’effort et non de résultats. La  récompense qu’Hachem nous accorde n’est pas sur les résultats. Le principe pour chacun est de faire du mieux qu’il peut.

La maman de Léa peut ainsi conclure : « Elle m’a aussi dit que tu fais de beaux efforts, et c’est bien là le plus important, qu’importe le groupe où tu te trouves. »

Comme elle avait ressenti une pression, il serait bien de finir avec, par exemple : « De toute façon, l’apprentissage de la lecture, comme beaucoup de choses, est un déclic, tout le monde finit par lire correctement. » Cette dernière phrase n’étant là que pour la détendre.
 

Résumons-nous. Nous avons vu 3 points de ’Hinoukh, d’éducation, très importants

1.       Lorsqu’un enfant a un défaut de comportement nous devons toujours nous poser la question :

« Pourquoi mon enfant a-t-il agi ainsi ? » 

Les parents sont souvent surpris de constater que c’est soit eux-mêmes, soit un phénomène extérieur qui en est à la source. Il suffit alors de traiter les causes plus que les conséquences.

La sévérité n’est pas de mise, un enfant doit savoir qu’il peut toujours discuter avec ses parents, même de sujets délicats, voire désagréables. Ils doivent sentir leurs parents comme des alliés qui sont là pour les aider dans leurs actions, quelles que soient leurs difficultés. C’est aux parents d’instaurer un climat de confiance qui va permettre à l’enfant de se confier à eux dans toutes les situations. C’est la meilleure solution pour redresser un comportement défectueux.
 

2.       Dans le cas précis du mensonge. Il est interdit de mentir, c’est un des 10 commandements qu’Hachem nous a donnés au Har Sinaï ! Pour ce faire, il faut toujours valoriser la vérité, en disant, par exemple : « Je sais qu’il t’a été difficile de dire la vérité, vraiment bravo, tu es très fort ! ».

Quant au mensonge, il faut lui appliquer les lois de la Mitsva de “Tokha’ha”, faire une remontrance, c'est-à-dire sans jamais faire honte, sans exagérer, en pesant ses mots, et surtout pas en public. Il suffit bien souvent de dire au détour d’une phrase que l’on est au courant de la vérité. Votre enfant aura très bien capté le message et vous sera très reconnaissant de ne pas l’avoir accablé.
 

3.       La pression sur les résultats scolaires est très néfaste au bon développement de l’enfant.

Je sais que nous vivons dans un monde où les résultats font force de loi. Mais ce qu’il faut, c’est développer le moteur interne de l’enfant pour développer ses capacités. C’est la seule méthode qui paye sur le long terme.

Combien d’enfants sont excellents dans les petites classes et dégringolent doucement en grandissant. La raison en est que la pression marche sur les petits, mais, plus ils grandissent, plus ils feront ce que bon leur semble. Comme ils ne percevront le travail qu’au travers du prisme de la contrainte, ils essaieront dès que possible de s’en affranchir.

Chacun de ces points pourrait faire l’objet d’un article en soi. Il est particulièrement intéressant de constater comment, devant une simple erreur d’un enfant, les parents doivent réfléchir et prendre en compte de multiples paramètres. Il faut toujours prendre du recul, chaque mot et comportement pourra être tout aussi bien bénéfique que préjudiciable pour l’épanouissement de nos chers enfants.