Une femme vaillante qui peut la trouver ! Elle est infiniment plus précieuse que les perles.

אֵשֶׁת חַיִל מִי יִמְצָא וְרָחֹק מִפְּנִינִים מִכְרָהּ

Une Echet ‘Hayil, c’est tellement rare ! Qui peut bien la trouver ?

En s’exprimant de façon si énigmatique, le roi Salomon nous intrigue dès le premier verset ! Que veut dire “‘Hayil” ? Mais là où nous sommes encore plus intrigués est lorsque nous voyons que les commentateurs nous donnent trois définitions différentes du mot “‘Hayil” !

Selon Rachi, le mot “‘Hayil” signifie “Riche” [1], tandis que pour le Ramban, cela signifie “talentueux” [2], et enfin, selon le Da’at Mikra, cela signifie “une personne de confiance” et “ayant la crainte de D.ieu” [3]. Alors, nos commentateurs ne peuvent-ils pas se mettre d’accord ?!

Avant de répondre à cette question, essayons de préciser chacune des 3 définitions pour comprendre ce qu’est la femme vertueuse version 21ème siècle.

“Riche” : Qui est riche ? Celui qui se satisfait de son sort ! [4]

La femme vertueuse, c’est celle qui se réalise en fonction des moyens qui lui sont mis à sa disposition. Autrement dit, elle n’est pas en train de loucher sur les possessions de sa voisine en se disant que si elle avait autant qu’elle, elle réussirait mieux dans la vie ! Il est vrai que, de façon naturelle, on a plus tendance à se focaliser sur ce qu’on n’a pas, ou sur “ce qu’on devrait avoir”, plutôt que de se focaliser sur l’existant. Se satisfaire de “son sort”, c’est accepter la configuration de sa vie dans tous ses détails. La femme vertueuse est convaincue que ce qu’elle a dans sa vie, ce sont exactement les moyens par lesquelles elle doit passer pour se réaliser. Elle n'estime pas qu’il manque des mètres carrés à sa maison pour sa famille, mais qu’elle a la taille parfaite, ni trop petite ni trop grande ! Elle ne pense pas que si elle avait plus d’aide ménagère, sa maison serait plus reluisante et qu’elle en serait plus heureuse, ni que si ses enfants étaient un peu plus dociles, tout filerait à merveille ! Tout file déjà à merveille parce qu’avec une femme comblée, le foyer ne peut que s’épanouir et se réaliser dans la bonne direction. C’est cet état d’esprit qui est la garantie de sa réussite. Car quand une femme sent qu’il ne lui manque rien pour être heureuse, c’est, par ricochet, tout son entourage qui se sent heureux et comblé.

“Talentueux” : Elle ne doute pas de ses compétences et de sa capacité de réussir. 

Le pire ennemi de la réussite, c’est le doute de soi. Pourtant, c’est bien ce qui guette la femme à de nombreuses occasions dans sa vie. En effet, la femme est souvent amenée à faire des actions répétitives... sans voir pour autant le résultat immédiatement ! Donner le bain, accompagner les enfants à l’école, préparer le goûter... Dans le fond, la mission d’une femme s’apparente à faire pousser un arbre fruitier. On doit l’entretenir, l’arroser et lui parler chaque jour, sans voir de résultat immédiat. Cela peut être frustrant. On se dit : “Mais est-ce que je vais manger des fruits de cet arbre un jour ?!”. De même, la femme peut parfois avoir l'impression de faire beaucoup d’efforts sans en tirer de la satisfaction en retour.

Pourtant, elle doit garder une vision long terme et se dire qu’il n’existe aucune étape inutile dans la vie. Même si cela fait 100 fois qu’elle répète à son enfant : “Fais ton lit”, un jour ou l’autre, il l'intégrera. Et s’il a fallu répéter 100 fois la même chose, c’est que chaque étape était utile pour faire intégrer à son enfant la notion d’ordre. Parfois, certaines femmes sont “fatiguées de toujours devoir répéter” et pourtant, ce qui les fatigue, ce n’est pas le fait de répéter, mais la sensation d’inutilité. 

C’est un peu comme quand on peint une œuvre d’art, pourquoi ne se dit-on pas : “Mais pourquoi suis-je en train de mettre de la peinture verte sur mon pinceau comme une idiote ?!”. On est heureuse parce qu’on sait qu’on est en train de créer quelque chose de magnifique ! De même, la femme vertueuse, c’est celle qui ne se décourage pas par la répétition des actions, ni par une pseudo-sensation d’inutilité. Quand elle prépare à manger pour la 365ème fois de l’année, elle se dit : “Ma vie a du sens, je construis une famille, je nourris mes enfants, qui sont les âmes qu’Hachem m’a confiées et je suis fière d’en prendre soin.” 

La femme vertueuse, pour ne jamais céder au découragement ou à la fatigue, s'efforce à réaliser en permanence qu’elle est en train de construire un éternel.

“Ayant la crainte du ciel” : elle sait que tout ce qui arrive est pour le bien

Le roi Salomon compare la femme vertueuse à une perle. Pourquoi la perle ? Eh bien, il faut savoir que la perle ne se fait pas naturellement [5]. Une perle, c’est, à la base, un grain de sable, logé dans une huître, qui se recouvre d’une couche à chaque fois qu’il y a une agression. Donc, non seulement, à la base, c’est juste un grain de sable, mais surtout, ce qu’il faut retenir, c’est que c’est la succession de challenges qui crée la perle ! La Echet ‘Hayil, c’est celle qui comprend que les difficultés de la vie lui sont mises sur son chemin pour faire d’elle une véritable perle. Pour relever ces challenges, elle va devoir trouver et exploiter des ressources en elle, jusqu’alors totalement inexploitées et même insoupçonnées, faire d’elle une femme précieuse, pleine de ressources. C’est celle qui, étant très en retard pour un rendez-vous important, ne va pas s'énerver mais va se dire : “Bon, Hachem m’a envoyé les embouteillages pour que j’en fasse quelque chose : dois-je travailler sur ma patience ? Ma ponctualité ? Mon lâche prise ? Rien n’arrive par hasard, et il y a forcément une raison, et ce qui est sûr, c’est que je dois profiter de cette occasion, qui est, certes, désagréable, pour me bonifier !”

La combinaison de ces trois définitions

Alors, la femme vertueuse est-elle comblée, talentueuse, ou positive ?

Eh bien, on peut combiner ces trois définitions en donnant une description de la femme vertueuse. Il s’agit d’une femme sage et talentueuse dont la richesse matérielle et spirituelle s’acquiert grâce à sa relation de proximité avec D.ieu. Elle s’investit pleinement dans ce qu’elle fait en lui donnant un sens, car, pour elle, une vie intègre et authentique est une vie qui est en adéquation avec la volonté de D.ieu.

Et le roi Salomon poursuit en disant qu’il est rare d’en trouver. Effectivement, avec la définition que l’on vient de donner, cela paraît inatteignable comme standard. Et pourtant, quelques versets plus tard, il va nous dire : “Beaucoup de femmes sont vertueuses (‘Hayil)” [6]. N’est-ce pas contradictoire ?

En fait, le Malbim explique que la femme vertueuse ne peut pas être trouvée... par hasard [7]. C’est-à-dire qu’être une femme vertueuse, ce n’est pas un hasard, ou un caractère déjà préétabli. Autrement dit, on ne naît pas Echet ‘Hayil, on le devient… Et c’est un travail de tous les jours ! La femme vertueuse, c’est celle qui s’efforce quotidiennement à se réaliser avec les moyens qui sont les siens, sans jamais se décourager et en étant toujours fière d’être la partenaire d’Hachem dans tout ce qu’elle réalise.

Et avec un tel état d’esprit… on ne pourra que réussir !

[1] Chémot (18,21)

[2] Chémot (18,21)

[3] Michlé (31,10)

[4] Pirké Avot (4,1)

[5] Selon, Wikipédia, une perle est “une création calcaire, de très grande valeur, fabriquée par les huîtres perlières. Quand un objet irritant passe à l'intérieur de la coquille, l'animal réagit en entourant l'objet d'une couche de carbonate de calcium : ce mélange est appelé du nacre”.

[6] Michlei (31,29)

[7] Malbim sur Michlé (31,10)