Nous sommes tous choqués, bouleversés, et souvent même affligés devant les évènements que nous venons de traverser et qui nous laissent avec la même question qui trotte dans notre tête : pourquoi ?

Évidemment, il serait totalement futile, voire indécent de vouloir expliquer les calculs de notre Créateur qui sont les Siens et tellement loin de notre compréhension. Et pourtant, nous manquerions, je pense, à notre rôle si nous restions indifférents devant de tels appels du Ciel sans essayer d’en tirer des leçons…

Comme chacun le sait, Hachem nous a mis dans un monde où nous sommes non seulement les acteurs, mais en tant que peuple juif et détenteurs de son mode d’emploi - notre sainte Torah -, nous devons également en être les exemples ! Comme nous l’avons vu dans la Paracha de Béréchit, Hakadoch Baroukh Hou S’est référé à la Torah afin de créer l’univers. Ainsi, notre monde peut fonctionner uniquement d’après ses valeurs et ses enseignements. Toute attitude qui en serait contraire au point d’avilir le système sociétal, le menant à un point de non-retour, sera sévèrement punie, comme le témoigne le Déluge de la Paracha de Noa’h. Mais qui dit acteur ne veut pas dire figurant ! Rav Moshé Chapira avait pour habitude de nous enseigner qu’il était de la responsabilité de chacun d’agir et se préparer afin de recevoir la royauté d’Hachem à l’intérieur de notre cœur et de nos agissements. Seulement alors nous serons en phase pour recevoir le Machia’h, qui lui aura pour mission de transposer cette prise de conscience à l’échelle mondiale, et donc au niveau de tous les peuples. Nous devons véritablement prendre conscience qu’il est entre nos mains de pouvoir transformer notre peuple au point de le faire aboutir à la reconnaissance universelle d’Hachem, non seulement au niveau de l’intellect mais essentiellement au niveau du vécu… 

Mais comment ? Que manque-t-il pour parvenir à cela ?

Émouna et Da’at. Je m’explique…

Nous savons tous qu’Hachem existe ; mais est-ce que nous réalisons véritablement, au fin fond de notre cœur, que chaque Mitsva, chaque Téfila, chaque mot de Torah est une lumière qui a la capacité de véritablement éclairer le monde des ténèbres dans lequel nous sommes descendus ? À l’image d’une petite bougie allumée dans une pièce obscure, c’est alors que cette même pièce prend une tout autre dimension ! 

Nous réalisons tous qu'il est nécessaire d'avoir une armée forte de nos jours en Israël, devant la multitude d’ennemis qui nous entourent. Mais est-ce que nous réalisons véritablement que cette armée et tout son système de défense ne sont protégés QUE par le mérite de nos Yéchivot et Collelim, de nos Mitsvot, de nos Téfilot et de notre amour au sein de notre peuple ? Cela nous a réchauffé le cœur de voir une telle entraide pour nos soldats, à la fois matérielle et psychique, provenant de tout notre peuple, en Israël ou en diaspora (et nous souhaitons tous que cela continue bien au-delà des événements tragiques). Mais avons-nous atteint la maturité de réaliser que nous devrions en faire de même pour tous nos étudiants en Torah ? Si c’était véritablement le cas, comment pourrions-nous accepter et concevoir qu’un Avrekh qui étudie sérieusement plus de 10 heures dans sa journée soit moins rémunéré qu’une caissière de supermarché ?...

Est-ce que nous réalisons qu’Hachem a créé notre univers uniquement dans le but de donner, de voir le bien absolu qu’il y a chez l’autre, dans n’importe quelle création divine, et surtout en soi-même… Et de même que notre Créateur nous demande d’agir suivant les attributs que Lui-même nous dévoile, ainsi, tout celui qui trouvera ce bien fera alors avancer notre monde vers sa raison d’être… au point d’en produire une mélodie dont Hachem se délecte ! Si nous le réalisions pleinement, nous consacrerions l’essentiel de notre temps à cela. Nous ferions une place si grande à Hachem dans notre cœur qu’Il ne souhaiterait alors que Se dévoiler et résider de façon concrète parmi nous ! C’est donc toute une maturité spirituelle que nous devons tous travailler en nous. Car il est évident que lorsqu’elle sera présente, Hachem agira et nous délivrera en fonction…

J’en profite pour faire un aparté : vous connaissez probablement l’adage que le Midrach nous rapporte : “כל המרחם על אכזרים סופו שמתאכזר על רחמנים”, “Toute personne qui sera miséricordieuse sur les cruels, finira par être cruelle sur les miséricordieux.” Cela a été notamment ramené concernant le roi Chaoul, qui avait laissé en vie Agag, chef des Amalécites, et quelques bêtes, en dépit de la recommandation explicite du prophète Chmouël d’exterminer tout le peuple d’'Amalek, y compris le bétail. Chaoul avait agi ainsi, semble-t-il, afin de donner une leçon au peuple en l’exécutant sur la place publique, et faire des sacrifices avec les bêtes restantes. Pourtant, à cause de cela, il perdra sa royauté ainsi que pour sa descendance ! Chaoul avait cependant bien réussi à éduquer ses soldats et à mettre notre attribut de miséricorde de côté afin de répondre à l’injonction divine de n’avoir aucune pitié quant à l’éradication du Mal absolu incarné par ce peuple maudit d’'Amalek. Par la suite, le Midrach rapporte également que lorsque Chaoul extermina Nov, la ville des Cohanim, sans aucune miséricorde, les versets utilisent exactement les mêmes termes que ceux employés par Chmouël, injonction que Chaoul n’avait su, lui, accomplir jusqu’au bout. De là, nos Sages en tirèrent l’adage cité plus haut.

D’un autre côté, dans notre Paracha, il est rapporté qu’Avraham essaya de plaidoyer en faveur de Sodome, ville pourtant pervertie au plus haut point, afin de les sauver de l’extermination ! Pourquoi un tel agissement ? Comment défendre toute une population qui agissait à l’inverse de la volonté d’Hachem ?! Et pourtant, la Torah ne cite en rien une miséricorde mal placée de la part d’Avraham...

En fait, nos Sages nous enseignent qu’il y avait une différence intrinsèque entre les agissements d’Avraham et de Chaoul ; Avraham qui était parvenu à ne chercher que le Bien se trouvant dans toute la Création ne pouvait concevoir tout un peuple sans qu’il y ait de Bien parmi eux, 50 Tsadikim, 40… voire seulement 10. C’est pourquoi il est prêt à plaidoyer pour eux devant Hachem qui les a créés. Alors que Chaoul n’a sauvé Agag que pour des raisons et intérêts personnels qui l’ont sorti de son Bitoul (annulation de soi devant son Créateur) qui pourtant se doit d’être le fer de lance de tout roi d’Israël. Et cela se retrouvera totalement, mais de façon encore plus exacerbée envers la ville de Nov. Il perdra ainsi, par cela, son aptitude à régner sur le peuple d’Hachem.

Que mes propos ne soient pas mal compris. Il serait mal placé, de nos jours, de pouvoir décider ou montrer du doigt qui est 'Amalek parmi nous ou non. Mais cela ne doit pas nous enlever notre responsabilité et notre devoir d’être capables d’exterminer le mal absolu qui règne encore dans notre monde. Ne jamais oublier que même si le peuple entier d’'Amalek est composé de créatures d’Hachem, c’est Lui-même qui nous demande pourtant de les anéantir, car il représente le mal absolu dans ce monde, menant la société à sa perte et son non-retour pour le dévoilement divin. Ayant fait un Brit (Alliance) avec nous, après le Déluge, de ne plus exterminer ce monde, Hachem nous demandera, par conséquent, d’être dorénavant les responsables de l’ordre sociétal. Pour cela, il implantera dans les différentes générations des Tsadikim qui eux, par leur sainteté et attachement à notre Créateur, de façon tout à fait désintéressée, sauront nous guider et nous donner conseil, pour pouvoir faire la Brit-Mila de notre cœur, de façon à ne pas nous faire “polluer” par les peuples parmi lesquels Hachem nous a exilés.

Au lieu de cela, nous constatons, de façon inévitable, que ceux qui n’ont pas eu la chance de pouvoir connaître ces Sages ou d'étudier leurs enseignements, se font forcément détourner de leur chemin pour parvenir à des pensées et attitudes totalement contraires à la volonté de notre Créateur. Il faudra alors, comme l’Histoire nous l’a trop souvent témoigné, des événements tragiques pour faire éclater les écorces venues boucher l’accès à nos cœurs rendus insensibles à la profanation du Nom Divin parmi nous…

Prions tous ensemble de parvenir à cette Émouna (foi) et ce Da’at (maturité spirituelle). D’avoir le mérite de rester dans le chemin et d’agir, en fonction des préceptes de notre sainte Torah, de façon à illuminer ce monde d’une lumière de vérité, de sainteté, de joie et de paix. D’être nous tous des exemples aux yeux de nos familles, de notre peuple, et des nations… Amen.