D’ordinaire, au début de l’année, c’est le moment de faire un bilan de l’année écoulée. Selon la tradition, rapportée dans le Talmud (Traité Roch Hachana), le 1er Tichri est dénommé Yom Hadin, jour du Jugement, où tous les humains défilent devant le Créateur, Qui les juge en fonction de leurs actes, pendant l’année précédente. Cette année, si l’on réfléchit un peu, il est évident que le bilan est particulier, dans divers domaines, mais, spécialement depuis environ 7 mois, la crise sanitaire a détruit toutes les prévisions. Assurément, un événement semblable est totalement inédit, et inattendu, tant par son ampleur que par son impact. La société mondiale a été infectée en profondeur : près d’un million de morts, et plusieurs millions de contaminés. Le bilan est terrible, et invite à la réflexion, d’autant plus qu’au-delà des désastres humains, c’est l’économie mondiale qui a été violemment frappée.

Il ne s’agit nullement, dans ce bilan, ni d’effrayer ni de porter des jugements moraux. Il n’y a pas de coupables, il y a des victimes. On ne peut pas reprocher aux responsables politiques de ne pas avoir été préparés à ces difficultés, car qui pouvait prévoir une telle ampleur ? Certes, il y a des dirigeants plus expérimentés, ou d’autres moins capables de gérer des situations inhabituelles. Que l’on nous comprenne bien ici : il ne s’agit pas de remontrance morale, ou de référence à une Transcendance silencieuse, dans notre propos. Ce qui est ESSENTIEL, c’est que, peut-être pour la première fois dans l’Histoire de l’humanité, quelque chose nous échappe et nous surprend. Le créé a cru comprendre la création, et voilà qu’une énigme s’impose et bouleverse. Pour que cette énigme soit totale, il fallait que la planète soit semblablement touchée, universellement. Il a donc été nécessaire qu’une globalisation s’exprime pour permettre de prendre en considération le phénomène. Toutes proportions gardées, on peut évoquer ici le bégaiement de Moché Rabbénou, qui, bien qu’ayant été l’humain le plus proche du Créateur, a été affligé d’une infirmité, au niveau de l’expression. Notre époque, certainement la plus sophistiquée de toutes les époques, se retrouve handicapée de façon très profonde, par un phénomène insaisissable !

C’est ce phénomène qui nous interroge. Il convient d’y réfléchir, et l’on peut, si l’on désire rester aveugle, ne pas voir les faits les plus évidents, et les moins compréhensibles. Au début de la nouvelle année juive, il importe de dresser le bilan, et de tenter de dépasser l’immédiatement sensible. Les masques qu’il nous faut porter aujourd’hui – hélas ! – ne sont-ils pas un symbole pour nous faire comprendre que derrière le masque, au-delà du fini, se cache l’Infini ?