La Paracha termine par l’ordre donné à Avraham d’effectuer la Brit Mila. Le Séfer Ha’hinoukh souligne la spécificité de cette Mitsva ; la Mila et le Korban Pessa’h sont les deux seuls commandements positifs punis de Karet[1] en cas de transgression. En quoi ces deux Mitsvot sont-elles liées et qu’est-ce qui fait leur particularité ?

Dans toute relation (entre êtres humains ou bien entre Hachem et nous), certaines actions peuvent affecter le lien existant ou bien, si elles sont plus graves, provoquer une véritable coupure. Le fossé créé dépend de la gravité de la faute. Souvent, quand le tort est irrévocable, il est sanctionné de « Karet ».[2]

Bien qu’empêchant un rapprochement avec Hachem, le fait de ne pas accomplir une Mitsva positive ne brise pas notre lien avec Lui. Une négligence dans ce domaine n’entraine donc généralement pas une telle punition (celle de retranchement), sauf pour les deux Mitsvot précitées. Pourquoi ?

Quand un homme se marie, il doit s’engager à s’unir à sa femme, sans quoi le mariage ne prend pas effet. L’individu peut effectuer plusieurs bonnes actions, prodiguer toutes sortes de bienfaits, cela ne le rend pas « marié » à l’autre. De même, lorsque l’on s’unit à Hachem, il faut un engagement qui marque le lien[3]. La Mila et le Korban Pessa’h sont des alliances avec Hachem, par lesquelles le Juif s’engage à respecter la Torah.

Yé’hezkel rappelle au peuple juif sa libération d’Égypte par Hachem, en utilisant l’analogie d’un bébé abandonné qui est sauvé. « Je[4] suis passé près de toi, Je t’ai vu t’agiter dans ton sang et Je t’ai dit : "Vis dans ton sang" et Je t’ai dit : "Vis dans ton sang". »[5] Nos Sages expliquent que les deux mentions de sang font référence à celui de la Brit Mila et à celui du Korban Pessa’h. Par le mérite de ces deux Mitsvot, les Juifs furent libérés et emmenés au Mont Sinaï pour recevoir la Torah. Elles montrent la volonté du peuple de devenir le Am Hachem.

Qui plus est, c’est en ces occasions (lors d’une Brit Mila et le soir du Séder de Pessa’h) qu’Eliahou Hanavi est présent parmi nous.  Celui-ci, voyant le peuple juif fauter continuellement, pensait qu’il ne lui restait plus d’espoir[6]. Hachem lui a alors ordonné d’être là lors de chaque Brit Mila et le soir de Pessa’h. Cela vient rappeler que peu importe le comportement du peuple juif, il reste uni à Hachem, grâce à ces deux alliances, l’une sur le plan individuel – la Mila, ordonnée au départ à un particulier, Avraham Avinou – et l’autre d'un point de vue collectif – les lois du Korban Pessa’h montrent l’importance de l’accomplissement de la Mitsva en groupe.

Ceci dit, nous pouvons comprendre l’interdiction pour un Juif incirconcis de participer au Korban Pessa’h[7], bien que le fait qu’une personne n’accomplisse pas une Mitsva ne l’exempte pas des autres commandements. Une personne qui ne s’est pas engagée personnellement à servir Hachem ne peut pas se lier à Lui sincèrement, en tant que membre de la nation.

Ceci nous enseigne une leçon fondamentale. Nombreux sont les Juifs qui se considèrent comme tels. Ils se sacrifient pour l’État d’Israël, consacrent leur temps et ne ménagent aucun effort pour le peuple juif. Mais, sur le plan individuel, leur intérêt est bien moindre[8]. Chacun doit s’efforcer d’améliorer son engagement personnel pour se rapprocher d’Hachem. Cela peut être en Lui parlant[9], en étudiant davantage Sa Torah, en respectant plus rigoureusement le Chabbat ou la Cacheroute, etc. L’essentiel est d’avancer sur un point. Souvenons-nous qu’Hachem désire un lien avec chacun d’entre nous.

Puissions-nous tous mériter de renforcer notre attachement avec Hachem.


[1] Séfer Ha’hinoukh, Mitsva 2. « Karet » signifie retranchement ; cela sous-entend une coupure du lien entre la personne et Hachem. Les commandements punis de Karet sont : l’interdit de consommer du ’Hamets à Pessa’h, de consommer certaines graisses, diverses formes de relations interdites. Celui qui transgresse ces Mitsvot par ignorance n’est pas puni de Karet.

[2] Notons que le repentir peut toujours rectifier le tort causé par la faute (bien que parfois, certaines souffrances doivent être infligées pour l’expier complètement).

[3] Cela ne le dispense évidemment pas de l’observance des Mitsvot, mais il est spirituellement très affaibli.

[4] C’est Hachem Qui parle, à travers le prophète.

[5] Yé’hezkel, 16:6.

[6] Mélakhim I, 19:10.

[7] Séfer Ha’hinoukh, Mitsva 17.

[8] Bien que la Mila soit une Mitsva qui s’applique aux hommes, l’enseignement que l’on en tire est valable également pour les femmes.

[9] Les prières fixées par nos Sages n’empêchent pas la personne de communiquer avec son Créateur dans sa langue natale, aux moments qui lui sont opportuns et de Lui exprimer ses sentiments, ses besoins et ses souhaits...