L’un des jeunes garçons qui participait régulièrement au cours du soir du Rav Chalom Chwadron, commença à s’absenter. Un jour, deux jours, puis trois. Rav Chalom était déterminé à retrouver le jeune homme et à le ramener à son étude de Torah.

Rav Chalom se rendit donc chez les parents du jeune homme, frappa à la porte, et voici que le jeune homme la lui ouvrit. Au début, ce dernier fut effrayé. Mais immédiatement, une discussion fascinante s’ouvrit entre eux. Discussion que Rav Chalom racontait, chaque fois qu’il s’en souvenait, à toutes les personnes se trouvant près de lui, comme s’ils étaient ce jeune homme-là.

- Rav Chalom : « Bonjour à toi mon cher. Nous ne t’avons pas vu ces derniers jours. Nous avons eu peur que tu ne sois tombé malade, D.ieu préserve, ou qu’il te soit arrivé quelque chose... »

- Le jeune homme : « Non, Kvod Harav, grâce à D.ieu, je vais bien. J’aime étudier la Guémara, c’est un réel plaisir pour moi, mais cette semaine, je suis forcé de m’absenter. La semaine prochaine, je reviendrai participer au cours, comme d’habitude, et plus encore. Je demande pardon au Rav de l’avoir dérangé et qu’il soit venu voir ce qui m’était arrivé. »

- Rav Chalom : « Et pourquoi es-tu forcé de t’absenter cette semaine, quelqu’un est malade dans ta famille ? »

- Le jeune homme : « Non, D.ieu préserve, j’ai une autre raison qui m’empêche de me joindre à vous cette semaine. Mais comme je l’ai déjà dit au Rav, je vous promets de participer au cours avec assiduité aussitôt que mon empêchement temporaire disparaitra. »

- Rav Chalom ne le lâcha pas : « Intéressant. Je suis très curieux de savoir quel empêchement peut perturber un jeune homme comme toi de participer au cours, qui a lieu à une heure fixe et relativement tôt. »

- Le jeune homme essaya de s’esquiver : « C’est difficile de le dire, je suis gêné... »

- Rav Chalom parla alors avec son cœur : « Pourquoi être gêné, qui plus est, de moi. Dis-moi tout mon enfant, et je te promets d’uniquement t’aider... »

- Le jeune homme : « Non, je ne peux pas... Ce n’est pas de la stature du Rav. La semaine prochaine, je rejoins les bancs du Beth Hamidrach. Il n’y a aucune raison que le Rav s’inquiète... »

- Rav Chalom : « Je ne m’inquiète pas. Simple curiosité. Raconte-moi rapidement, si ce n’est pas quelque chose de particulièrement personnel, pourquoi cette semaine, non, et la semaine prochaine, oui ? Quelle peut en être la raison ? »
 

Finalement, voyant qu’il ne pourrait pas se dérober, le jeune homme répondit aux questions de Rav Chalom, et commença à raconter : « Je vais dire la vérité au Rav, cette semaine ont lieu les matchs de football les plus importants de l’année. Pas Chabbath biensûr mais aux heures où le cours a lieu. Et malheureusement, je ne peux pas, je ne peux vraiment pas y renoncer. Je suis accro au football... »

Rav Chalom écouta les paroles du jeune homme et se tut un long moment. Après cela, il leva ses yeux emplis d’amour du Ciel et des hommes, et dit : « Mon cher fils, j’ai entendu, et j’ai compris. Mais le secret du bonheur que tu trouves dans ce jeu de ballon m’intéresse... Je ne connais pas suffisamment ce jeu, et j’aurais aimé en connaître le déroulement de plus près, car peut-être que je rate quelque chose... »

La discussion prit alors une tournure amicale.

Rav Chalom s’assit près du jeune homme qui commença à lui raconter, avec un plaisir personnel, le déroulement du jeu : « Si le Rav le désire réellement, je vais lui expliquer », dit-il. « Dans le jeu, il y a deux équipes, et si l’on veut rapidement définir comment le remporter, je dirais que celui qui marque un but en faisant entrer le ballon dans la cage a gagné. Le moment où le ballon rentre dans la cage est le moment décisif. » Le jeune homme finit de parler, l’excitation visible sur son visage. Il n’aurait jamais cru s’asseoir un jour à côté du Rav et lui parler de football.

Rav Chalom fit un signe de la tête, comme s’il n’avait pas compris, et demanda : « En quoi est-ce une sagesse de rentrer un ballon dans une cage ? Viens avec moi et je vais te montrer comment je fais rentrer vingt ballons dans une cage, les uns après les autres... »

Le jeune homme sourit et répondit : « J’ai oublié de dire l’essentiel au Rav. Près de la cage, se tient un gardien, dans le langage professionnel, on appelle ça un gardien de but, et il essaye d’empêcher le ballon d’entrer dans la cage et de l’arrêter... »

« Et comment fait-on pour le vaincre ? », s’intéressa Rav Chalom.

« Justement, toute la sagesse du jeu est là, répondit le jeune homme, c’est la grande satisfaction du jeu. »

« Je veux comprendre » s’entêta Rav Chalom... « Ce gardien ne va pas dormir ? Il reste là 24 heures sur 24, il mange et dort là-bas ? »

« Pas du tout ! » éclata de rire le jeune homme... « Bien sûr qu’il va dormir. Il n’est là-bas qu’aux heures des matchs. Après, il retourne à sa vie. »

« Si c’est ainsi », conclut Rav Chalom... « Quel est le problème ? Nous irons la nuit, quand il n’y est pas, et nous marquerons un but sans problème... »

Le jeune homme, pensant encore que Rav Chalom ne comprenait pas les secrets du jeu, continua à expliquer, tout en levant la voix :

« C’est justement pour ça. C’est justement parce que le gardien n’est pas là et qu’il n’y a donc pas de difficulté à faire entrer le ballon, que ce n’est pas intelligent si on le fait rentrer. La sagesse est dans les moments difficiles, lorsque le gardien se tient debout et surveille. Il y a d’autres joueurs qui sont là-bas et qui l’aident à éloigner le danger. En fait, chaque équipe empêche l’autre de faire entrer le ballon dans sa cage. »

A ce moment-là, Rav Chalom se leva, regarda le jeune homme, et dit à haute voix :

« Que tes oreilles entendent ce que ta bouche dit. Est-ce que venir au cours la semaine prochaine c’est une force ? Tu as envie d’étudier, et la semaine prochaine tu n’auras aucun empêchement de venir au cours. La sagesse d’étudier à ce moment-là n’est pas particulièrement grande. Mais à un moment où il y a un obstacle devant les portes du Beth Hamidrach qui t’empêche d’y entrer, c’est à ce moment-là qu’il faut savoir marquer un but. S’il-te-plait, n’enfreins pas les règles du jeu, et passe les portes du Beth Hamidrach en ce moment difficile, comme ça tu seras, toi, le gagnant du match... »

Rav Chalom lui tendit la main chaleureusement, et le lendemain, lorsque le jeune homme renonça au match de football et apparut au cours, il se tint devant lui en signe de satisfaction.