La Torah nous enseigne que lorsqu’un homme et son épouse atteignent l’entente conjugale, la présence divine réside parmi eux (traité Sota page 17).

Nous ne trouvons nulle par ailleurs un tel privilège, il n’est pas fait mention que celui qui porte convenablement ses phylactères fait résider sur lui la présence divine, pas même concernant le respect du Chabbath ou l’étude de la Torah, des Mitsvot d’importance suprême pourtant… Que vaut donc à l’entente conjugale cette récompense si éminente ? Comment notre couple serait porteur de la plus grande des bénédictions, ici-bas ?

Où se trouve la présence divine dans le monde ?

Tâchons d’en savoir un peu plus sur la véritable essence d’un foyer juif. Pour ce faire, posons-nous les bonnes questions. 

Que signifie donc le fait que D.ieu fait résider sa présence « dans le cas où » ou bien « suivant telle ou telle condition » ? Le monde n’est-il pas déjà rempli de Sa présence, transcendé par son Être ? De plus, posons-nous la question des lieux saints, pourquoi sont-ils plus « porteurs » de la présence divine que d’autres ? D.ieu réside en certains endroits et non en d’autres ? La Torah nous dit pourtant que « l’honneur de D.ieu remplit toute la Terre » (Yéchayahou 6, 3, Yirmiyahou 23, 24) et le Zohar d’expliquer « qu’il n’y a pas un seul lieu absent de Lui » (Tikouné Zohar page 122)

C’est-à-dire qu’a priori, il n’y a pas moins de présence divine dans la cave d’un immeuble porte de Saint Ouen que dans le Saint des Saints du Temple à Jérusalem...Et pourtant, il y a bien une différence, mais laquelle ?

La transcendance divine au-delà de l’espace et du temps  

La réponse est qu’il n’y a pas plus de présence divine dans un lieu plus que dans un autre mais, dans certains lieux, Hachem offre la possibilité à l’homme de s’attacher à Lui plus sensiblement, aidé de la sainteté du lieu. Pour prendre un point de référence qui nous est connu, disons que les lieux saints sont des lieux de connexions à haut débit avec le divin. C’est ainsi que les centres d’études, le tombeau des Justes, le Mur des Lamentations permettent à l’homme d’accéder à une proximité divine sans pareille.

Le foyer juif est un de ces lieux particuliers qui ouvre la porte vers une connexion directe avec D.ieu. Et en voici la preuve…

Nous savons que les sacrifices relèvent de secrets métaphysiques très profonds et que leurs lois sont aussi nombreuses que pointues – l’abattage rituel, la réception du sang de l’animal, le transport, puis son aspersion sur les coins de l’autel, les encens... le tout entremis d’une multitude de détails excessivement rigoureux et décisifs. L’un des buts de ce cérémonial, nous dit le Kouzari, « est l’institution d’un système magistral dans lequel le Roi résidera, non pas spatialement, mais pour faire honneur à Israël » (livre deux, alinéa 26). Pourtant, au-delà de tous les détails de ce formidable procédé, le plus crucial est incontestablement le lieu du sacrifice - le Temple -, sans quoi rien ne serait envisageable. Autrefois au Sanctuaire, puis sur les autels particuliers à l’époque des Juges, jusqu’à la construction du Temple, où dès lors, il ne fut plus jamais autorisé à apporter une offrande hors de ce lieu saint. Le lieu saint est une condition sine qua non à l’agrément d’un sacrifice par D.ieu, c’est la base…

Et savez-vous où eurent lieux les premiers sacrifices du peuple d’Israël, dans quel lieu saint ? Dans les foyers juifs lors du premier Pessa’h, par l’offrande de l’agneau pascal ! (Exode chapitre 12). C’est donc que le foyer juif est indéniablement un lieu aussi prompt à la sainteté que le Temple lui-même.

Le lieu saint du bout de la rue 

On commence déjà un peu plus à comprendre le sens de l’enseignement lié à l’entente conjugale cité plus haut. Le foyer est donc un lieu de connexion à haut débit avec D.ieu, mais essayons de comprendre pourquoi.

Quelle est la véritable essence d’un foyer juif ? Serait-ce le fait de partager le même toit avec l’élu(e) de son cœur ? Ou bien d’inviter les voisins à dîner pour parler politique et business ? Peut-être les sorties du dimanche au bois de Vincennes avec toute la famille en seraient la quintessence ? Nous comprenons tous que ces différentes facettes du foyer ne reflètent pas sa véritable nature, en tout cas, cela n’explique nullement pourquoi D.ieu y ferait particulièrement résider Sa présence… 

En réalité, le foyer est bien plus que cela. Il est le point de jonction entre ce monde-ci et l’autre, le lieu d’où l’on engage des âmes venues du monde spirituel à apparaître dans notre réalité physique ici-bas, le berceau de l’existence, le lieu d’où se matérialisera l’habit nécessaire à une âme venue d’en haut pour parfaire sa mission. C’est aussi le lieu d’où émanent les innovations de pensée en Torah, ainsi que celles concernant le service divin, en somme le lieu où deux êtres reçoivent en gage le cadeau le plus précieux du monde – une âme venue du Ciel à éduquer.

Mais le foyer, c’est aussi et surtout le lieu où les époux grandissent ensemble et dépassent leurs petitesses, chacun aidé de la loi juive aidant l’autre à se parfaire. C’est également le terrain approprié pour apprendre, au fil des années, à être plus généreux, plus gentil, plus conciliant. L’espace où l’on apprend à gérer son égo, à tendre l’oreille, à sortir de sa zone de confort pour se rendre disponible pour l’autre. Sortir du cercle « moi, moi et encore moi ». Il n’existe aucun autre endroit où l’homme est autant à même de découvrir la véritable nature de sa personnalité et de la parfaire, ce n’est pas pour rien que le Midrach nous dit qu’à la fin de la vie d’un homme, D.ieu convoquera deux individus pour témoigner du niveau spirituel qu’un homme a acquis dans ce monde-ci : le Yetser Hara et… sa femme, car personne ne connait mieux un homme que ces deux-là ! 

C’est pour toutes ces raisons que le foyer juif est le lieu de prédilection grâce auquel un homme et une femme peuvent grandir et s’unir à D.ieu, et ainsi bénéficier de Sa présence ;  car le foyer tel que la Torah le conçoit permet la réalisation de but ultime de l’existence juive : être à l’image de son Créateur. Partant de là, il est bien plus aisé de surmonter les difficultés de la vie, les petites lourdeurs du quotidien… Nous savons à quel modèle de référence aspirer, celui qui nous tire vers le haut, vers D.ieu.