עֹז וְהָדָר לְבוּשָׁהּ וַתִּשְׂחַק לְיוֹם אַחֲרוֹן

Parée de force et de beauté, elle rira le dernier jour

Habillée de… force et beauté !

On nous parle des habits de la Echet ‘Hayil ! Le Roi Salomon va-t-il nous décrire sa garde-robe ? Ses robes, ses chemises et ses chaussures ? Non ! De façon surprenante, le Roi Salomon nous parle de deux sortes d’habits assez originaux qui sont.... la force et la beauté ! Quel message veut-il nous faire passer ?

Que signifient précisément Oz (force) et Hadar (beauté) ?

Hadar signifie beauté intérieure [1]. La splendeur d’une femme c’est ce qu’elle a à l’intérieur d’elle-même, c’est sa Néchama qui est lumineuse et resplendissante. La Echet ‘Hayil a conscience de sa beauté intérieure. Oz, c’est oser : oser avoir le courage de ses opinions, sans avoir peur du qu’en dira-t-on. Mais c’est aussi la « force tranquille », le courage de surmonter les épreuves et les tribulations de la vie.

Quel est le lien entre Oz et Hadar ? Le Oz provient en fait du Hadar, c’est-à-dire de la capacité à avoir conscience de sa splendeur intérieure. En fait, la Echet ‘Hayil n’a pas besoin des autres pour définir sa qualité intrinsèque car elle a la connaissance de sa valeur. En effet, plus une femme va se définir par son aspect corporel, moins elle va avoir conscience de sa valeur, et donc moins elle aura le courage d’affirmer qui elle est. À l’inverse, plus une femme va être sensible à son intériorité, et connectée à son monde intérieur et à sa Néchama, plus elle va trouver de la force en elle. C’est de là que vient le Oz, la force intérieure, de la Echet ‘Hayil [2].

La vraie définition de la Tsniout

C’est pourquoi les habits de la Echet ‘Hayil sont conformes à la Tsniout, aux exigences de la Torah, car la vraie définition de la Tsniout c’est de s’auto-définir par rapport à notre essence intérieure profonde, et non pas de s’auto-réduire à notre enveloppe corporelle. Or, nous dit ici le Roi Salomon, plus on se définit nous-mêmes par notre extériorité moins on va être conscientes de nos forces intérieures, on risque ainsi de perdre notre Oz, qui est la capacité d’être soi-même et d’affronter les épreuves de la vie.

De quel rire parle-t-on ?

Il y a plusieurs sortes de rires définis dans la Torah comme le rire narquois de Ichmaël, le rire incrédule de Sarah, le rire de joie de Avraham et enfin le rire de Emouna de Its’hak. Il s’agit de cette dernière forme de rire dont nous parle le Roi Salomon concernant le rire de la Echet ‘Hayil. En fait, la Echet ‘Hayil a conscience de ses forces intérieures, qui découlent naturellement de sa Néchama

Non seulement cela lui donne du courage au quotidien, mais surtout cela ancre en elle une Emouna en Hachem qui va lui donner du recul sur tous les obstacles de la vie. Elle sait bien que tout provient de D.ieu, que tout mal est passager et que ce monde n’est qu’une « anti-chambre avant le monde futur » [3]. C’est ce qui lui permet de « rire » (pas forcément au sens littéral, mais au sens de prendre du recul) sur toutes les situations, mêmes les plus dramatiques, 'Has Véchalom.

Qui est la femme qui se cache derrière ce verset ?

Selon le Midrach, derrière chaque verset se cache une femme de la Bible.

Dans ce verset, il s’agit de Elichéva, la femme de Aaron Hacohen

Ce verset fait référence à Elichéva. De quel épisode parle-t-on plus précisément ? Le jour de l’inauguration du Sanctuaire, devant les yeux de la nation tout entière, une tragédie frappe et les deux fils de Elichéva et Aaron sont consumés par le feu et meurent en un instant. Elle aurait dû vivre la plus belle journée de sa vie en assistant à l’inauguration du Michkan. En effet, ses fils sont les uniques prêtres servant dans le sanctuaire aux côtés de leur père Aaron, le Cohen Gadol. Et pourtant, Elichéva a expérimenté la pire douleur qu’une femme puisse vivre, puisque cette journée s’est conclue par la mort de ses deux fils.

La grandeur d’Elichéva est de faire sincèrement confiance à D.ieu et surtout d’avoir confiance que la mort n’est en fait qu’un passage vers un monde éternel de bienfaits. Avec sa Emouna profonde, elle a eu la capacité de percevoir que sa vie est prise en charge par Hakadoch Baroukh Hou et que tous les événements de sa vie font partie d’un plan divin qui est pour le bien. Et c’est parée de cette force intérieure qu’elle peut atteindre une joie profonde et une paix intérieure en toutes circonstances, même celles qui paraissent des plus tragiques.

Le courage et la force de Elichéva ne s’est jamais perdu, elle s’est transmise à jamais : à ses descendants, les Cohanim. Le Maharal dit que les Cohanim ont tous hérité de cette qualité de leur ancêtre Elichéva [4]. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, ils ont eu le courage incommensurable de prendre les armes au moment de ‘Hanouka pour affronter avec aplomb l’Empire Grec ! Prendre conscience de notre valeur intérieure, c’est ce qui nous donne le courage d’affirmer qui nous sommes et de surmonter les tribulations de la vie. 

Souhaitons qu’il s’agisse toujours de challenges faciles et qu’Hachem nous donne le Oz, la force de les relever avec Emouna !


[1] Ashlikh sur Téhilim 104

[2] Tsiporah Heller dans "More precious than pearls"

[3] Pirké Avot (4,16) 

[4] Maharal, ‘Hidouchei Haggadot, cité par Shira Hochheimer dans "Eishes Chayil"