La période de l’Omer, dans laquelle nous nous trouvons actuellement, est considérée par les ‘Hazal comme une période de « ’Hol Hamoèd », de demi-fête, entre le souvenir de la sortie d’Egypte et la Révélation du Sinaï. Cette période, du début de l’histoire du peuple, devrait pouvoir être considérée comme une période de libération, de joie, car les 49 degrés d’impureté qui avaient souillé le peuple d’Israël en Egypte, disparaissaient progressivement chaque jour de ces 7 semaines, pour arriver à l’idéal de pureté du 50ème jour, pour la Révélation.

Durant cette période, au moment de la Sortie d’Egypte, deux événements bien différents se déroulent : d’une part, promulgation d’une « loi provisoire » et d’autre part, l’attaque violente d’Amalek. La « loi provisoire » inclut selon le Talmud trois ordonnances fondamentales : l’observance du Chabbath, les lois civiles, et le respect des parents. D’autre part, l’attaque d’Amalek représente une tentative d’empêcher la Révélation, puisqu’elle se produit avant l’arrivée au Mont Sinaï. Une orientation constructive face à un désir d’obstruction. Dès avant la Révélation, une direction positive est engagée, mais le négatif cherche à s’exprimer et à détruire. Le Tout-Puissant a créé ainsi deux pôles opposés, et qui doivent nécessairement s’affronter jusqu’à la réalisation des promesses prophétiques. C’est ici le prix à payer, la liberté, afin de donner une valeur au choix positif de la créature.

Au moment où, après la destruction du Second Temple, une épidémie a frappé 24.000 étudiants en Torah, les élèves de Rabbi Akiva, ce fut aussi une grave crise qui s’est ainsi manifestée. Cet événement symbolise, selon la tradition mystique, la difficulté pour l’homme de parvenir à comprendre l’essence de la transcendance, qui s’était traduite par la brisure des premières Tables de la Loi, lors de la faute du veau d’or. De même, parallèlement, Rabbi Chimon Bar Yohaï qui a intégré la puissance de cette Transcendance est monté au ciel le 33ème jour de l’Omer, jour où l’épidémie qui avait frappé les élèves de Rabbi Akiva s’est arrêtée. Ce jour est considéré comme un jour de joie, de lumière, et les feux allumés ce jour-là sont l’annonce de la révélation ultime de la vérité. Ainsi, une allusion est faite au 33ème jour de l’Omer avec la fin de l’épidémie, à l’avenir de l’humanité.

Alors que nous traversons l’une des périodes les plus difficiles de l’Histoire, alors qu’une épidémie atteint l’humanité entière, n’est-ce pas, pour les Juifs croyants, une occasion de réfléchir au devenir de la création ? Assurément, un projet divin apparaît, même s’il ne nous est pas facile de le saisir. Ce qui nous est interdit, c’est d’être indifférent, et d’être aveugle. Certes, l’aspect eschatologique de l’Histoire ne nous est pas révélé, mais une direction, une orientation doit nous apparaître. Le temps de nier l’impréparation des gouvernements, dans chaque pays, est passé, car les catastrophes – humaines, sociales, économiques – risquent de déborder les possibilités de chaque pays. Il est nécessaire, aujourd’hui, de comprendre que seule une entente, une compréhension universelle peut parvenir à éviter une descente à l’abîme pour l’humanité. Cette entente pourrait-elle préparer l’harmonie messianique, que l’on espère ? C’est assurément notre souhait, afin que, selon l’expression du prophète (Chofétim-Juges 14, 14) : « מעז יצא מתוק – du violent (du négatif) puisse émaner la douceur (le positif) ».