« Tous ceux qui œuvrent pour la communauté doivent le faire Léchem Chamayim, en l'honneur du Ciel, car le mérite de leurs ancêtres les assiste, et leur droiture perdurera à tout jamais. Et quant à vous (dit D.ieu), Je vous accorderai une grande récompense, comme si vous l'aviez vous-mêmes accompli. »

Dans l'article précédent, nous avons traité le sens de la clause finale de la Michna, où Hachem promet directement une grande récompense à celui qui se consacre aux besoins de la collectivité, s'il le fait Léchem Chamayim, avec désintéressement. Le Ktav Sofer propose une autre explication à cette clause, mais suggère d'abord une nouvelle interprétation de la clause précédente, où la Michna affirme "leur droiture perdurera à tout jamais." Pour expliquer simplement ce terme, disons qu'à la ligne précédente, la Michna affirme que si celui qui œuvre pour la communauté le fait pour le Ciel, il obtiendra du mérite grâce au mérite des ancêtres de la communauté. La Michna ajoute ensuite que la vertu des ancêtres perdurera pour toujours. Ceci semble quelque peu répétitif par rapport à la clause précédente.

Le Ktav Sofer explique ce principe par une idée importante. Lorsqu'une personne renforce son observance de la Torah et l'étude de la Torah des autres, elle n'est pas seulement récompensée pour la Mitsva qu'elle a réalisée, mais reçoit une récompense à chaque fois qu'un individu réalise une Mitsva en raison de ses actions initiales. De ce fait, la Michna établit que les actions vertueuses de celui qui se consacre aux besoins de la collectivité perdureront pour toujours, en raison de l'effet positif continu qu'elles auront sur le monde. Lorsque la Michna poursuit en expliquant que celui qui se consacre aux besoins de la collectivité sera largement récompensé, elle se réfère à une immense récompense durable qu'il obtiendra à chaque fois qu'un individu effectue une Mitsva en conséquence de ses actions.

On retrouve ce principe chez nos Sages et commentateurs : une autre Michna dans Avot affirme qu'un homme qui entraîne un autre à réaliser des Mitsvot (Hamézaké Et Harabim), bénéficie de retombées extraordinaires[1] : il commence par affirmer qu'il ne sera pas confronté à la faute : pour de nombreux commentateurs, cela signifie qu'il obtiendra beaucoup d'aide divine pour éviter la faute.[2] La Michna cite ensuite Moché Rabbénou comme un exemple de Mézaké Harabim et affirme qu'il a été récompensé pour toutes les Mitsvot qu'il a incitées à réaliser, comme s'il les avait réalisées lui-même. De ce fait, le Rav Aharon Kotler relève qu'un individu qui est Mézaké les autres par des Mitsvot recevra une récompense extraordinaire pour ses actions. « On ne peut imaginer le gain incroyable qu'il recevra par là, il a droit à une protection divine supplémentaire pour éviter de fauter ainsi qu'à un grand nombre de mérites, ce qui lui aurait été impossible à atteindre par son propre libre arbitre.[3]» Il écrit ensuite que ceci peut nous aider dans le jugement ; la Guémara affirme que les Livres de la Vie et de la Mort sont ouverts à Roch Hachana. Le Tossefot explique que les morts sont également jugés.[4] À quel titre sont-ils jugés ? Le Rav Kotler explique que même après la mort, les actions que l'homme a commises dans ce monde peuvent encore affecter les autres, à la fois positivement ou négativement. En conséquence, si un homme aide les autres de sorte à créer des bénéfices durables, il peut continuer à en récolter les fruits même après sa propre mort.[5]

Rav Noa'h Weinberg zatsal, fondateur et Roch Yéchiva de Aich Hatorah est quelqu'un qui, plus que toute autre personne au monde, a été un exemple classique de Mézaké Et Harabim. Après sa mort, un livre épais fut écrit, rempli de témoignages de milliers de personnes qui témoignent comment il a été directement ou indirectement responsable de leur retour à la Torah. En outre, lors de son enterrement, de nombreuses photos de ses élèves et de leur famille ont été placées avec lui dans sa tombe. Ceci, dans le but d'indiquer qu'il n'a pas été responsable uniquement du retour au judaïsme d'un individu, mais de tous leurs enfants et descendants à leur suite. De plus, il a influé des centaines de personnes à devenir à leur tour des Mézaké Harabim, et en conséquence, il est récompensé pour leur influence positive sur des milliers de personnes à leur tour. Citons par exemple une remarquable Yéchiva dans la Vieille Ville où des centaines d'élèves ont progressé dans leur judaïsme, avec de nombreuses succursales dans le monde y compris en Australie, Afrique du Sud, au Chili, au Mexique, en Grande-Bretagne et en Russie. Aish.com est l'un des plus grands et brillants sites Internet juifs au monde, le séminaire Aish de découverte du judaïsme, qui a dispensé un enseignement sur les nombreuses preuves de l'existence de D.ieu et la véracité de la Torah, a influencé des milliers de personnes. Le projet Inspired a eu beaucoup de succès pour encourager des personnes pratiquantes qui ne sont pas à plein temps dans le Kirouv (rapprocher des Juifs au judaïsme) à consacrer néanmoins une partie de leur temps et de leurs efforts à influencer les autres. Inutile de préciser que le Rav Weinberg est unique dans ce domaine, il incarne néanmoins l'exemple de quelqu'un qui croyait que s'il déployait les efforts pour aider le peuple de D.ieu, certainement le Tout-Puissant lui viendrait en aide. Puissions-nous tous profiter d'une récompense éternelle pour notre action en faveur des autres.

 

[1] Avot, 5:18.

[2] Voir Rambam, Pérouch Hamichnayot sur la Michna. Voir aussi la Guémara dans Yoma 87a avec Rachi.

[3] Michnat Rebbi Aharon, Ibid, p.246.

[4] Roch Hachana 32b.

[5] Ibid. p. 252.