Après l’attribut de bonté que nous avons découvert dans un précédent article, nous voici à présent à la conquête de l’attribut de rigueur dans le but d’en savoir un peu plus sur notre Créateur.

Rappelons-le, les attributs divins par lesquels D.ieu choisit de se « dévoiler » à l’humanité ne sont pas des expressions de Son essence, à l’image des traits de caractère de l’homme. D.ieu étant au-delà de toute forme ou de silhouette, Il ne répond pas aux critères émotionnels dits humains qui n’existent que de par leur réalité physique. Les attributs divins sont des manifestations de la conduite divine que D.ieu a choisi d’emprunter pour exprimer Sa volonté.

Les textes nous révèlent qu’un des attributs divins est la bonté (comme nous l’avons vu dans la première partie). Le propre de la bonté est le don gratuit, sans considération de la recevabilité légitime ou non du récepteur. On donne par amour de la bonté, que la personne le mérite ou pas.

D’ailleurs, comme le dit le Maharal de Prague (Drouchim), l’homme reçoit sans cesse sans mériter les dons que D.ieu lui octroie. A commencer par sa propre vie, alors qu’il n’était pas encore au monde pour légitimer le présent. Preuve que le don est gratuit. 

Pourtant, la Torah nous dévoile une autre facette des attributs divins, qui a priori s’oppose fondamentalement avec celle de la bonté – la justice. La caractéristique de la justice est de ne donner à autrui que s’il le mérite, s’il s’est acquitté de ses devoirs. La justice comprend aussi le fait de passer les actes d’une personne au peigne fin sans indulgence.

Comment D.ieu présente-t-Il Son attribut de justice ? 

Deutéronome 32, 4 « Lui, notre Rocher, son œuvre est parfaite, toutes ses voies sont la justice même ; D.ieu de vérité, jamais inique, constamment équitable et droit. »

Une définition de l’attribut repris par les prophètes comme Isaïe au chapitre 61, 8 par exemple « C'est que moi, l'Eternel, j'aime le droit et déteste les rapines exercées par l’injustice ; je leur rétribuerai leur œuvre avec équité et leur octroierai une alliance éternelle. »

Ou encore dans les Psaumes du roi David 37, 28 « Car l’Eternel aime le droit et il ne délaissera pas ses fidèles : ils sont protégés à jamais ; mais la race des méchants sera exterminée. » 

La justice ou l’attribut de rigueur est donc un point central de la conduite divine, à tel point que les Sages du Midrach (Béréchit Rabba 14, 15) ont dit « A l’origine, D.ieu voulut créer le monde soumis à l’attribut de rigueur »

Et n’allons pas faire l’erreur de croire que cet attribut est purement théorique aux dépens de celui de la bonté, car à plusieurs reprises, l’attribut de rigueur s’est exprimé et non des moindres…

Avraham, pourtant appelé « mon bien-aimé » (Genèse), n’a pas été épargné lorsqu’il émit un doute - infinitésimal à son niveau - sur la promesse d’héritage que lui faisait D.ieu par les mots « par quoi saurai-je ? ». (Genèse 15, 8). D.ieu le punit en lui disant « Tu le sauras par le fait que ta descendance sera en terre étrangère » (Béréchit Rabba 43, 18)

Ou encore Yaacov, dont l’effigie est gravée en-dessous du trône céleste, lui non plus ne se vit pas épargné de l’attribut de rigueur et lorsqu’il s’emporta vis-à-vis de sa femme Ra’hel qui se plaignait à lui de ne pas avoir d’enfants - lui aussi à son niveau incommensurable - se vit immédiatement sanctionner par D.ieu qui lui dit « Est-ce une façon de répondre à une femme en détresse ? Par ta vie ! Tes enfants serviront les siens » (Béréchit Rabba 71, 7)

Yossef le Juste, sur sa manœuvre “superflue” pour se faire libérer de prison en demandant à être rappelé devant Pharaon (Genèse 40, 14) se vit infliger pour son manque de foi - à son niveau lui aussi - deux années supplémentaires dans les geôles égyptiennes.

Le roi David, pour avoir appelé les enseignements de Torah des chants, s’est vu perturbé dans l’une de ses joies (Sota, page 35).

Les exemples de rigueur implacable ne manquent pas dans les textes, et nous voyons que la rigueur s’exprime pleinement dès qu'elle en a l’occasion a priori. Comment cela s’accorde-t-il avec l’attribut de bonté, qui foncièrement semble signifier l’inverse ?

La justice impartiale pour qui ?

En réalité, D.ieu n’applique la justice parfaite qu’à l’égard de ceux qui sont en mesure de la supporter, c’est-à-dire les Tsadikim, les Justes. La Guémara déclare dans le traité de Yébamot page 121 « Le Saint, béni soit-Il, est pointilleux avec les Justes comme l’épaisseur d’un cheveu. » Seulement eux peuvent supporter ce dessein si…juste.

Pourquoi un tel traitement ?

Les textes nous révèlent que le monde futur est totalement soumis à l’attribut de rigueur, c’est pourquoi il est appelé le monde de la rétribution. D’ailleurs, on y encaisse son salaire en quelque sorte. Là-bas, l’attribut dominant est la justice, comme dans l’intention originelle de la création du monde. Les Justes, eux, vivent dans ce monde-ci suivant les règles du monde futur, ils sont complètement en phase avec les règles du monde de la vérité. Leur comportement est donc soumis à la politique de l’au-delà dans les limites même de ce monde-ci.

Cela explique, au passage, pourquoi parfois certains Justes souffrent tandis que des impies ont la belle vie… La fameuse question !

En tous les cas, l’attribut de rigueur parfaite ne s’applique qu’aux Tsadikim. Mais alors, cela voudrait-il dire qu’elle n’est pas du tout en vigueur vis-à-vis du commun des mortel ? Absolument pas. 

L’attribut de rigueur, bien qu’il ne soit pas si intransigeant qu’avec les Justes, n’épargne pas non plus les petites gens, car sinon il y aurait un dysfonctionnement dans le système. Mais vis-à-vis de la masse, l’attribut de Justice ne s’exprime pas si abruptement  qu’avec les Justes, il est nuancé par un autre attribut, celui de la miséricorde.

L’attribut de miséricorde

L’attribut de miséricorde ou Ra’hamim est un attribut divin visant à donner une certaine longanimité au fauteur, un certain temps qui retiendrait la punition de s’abattre immédiatement sur lui et de plein fouet. Son rôle n’est pas d’abolir mais de diluer son châtiment sur un laps de temps plus supportable par exemple, permettant dans ce temps imparti au fauteur de se repentir et ainsi parfois même d’abolir la sentence de l’attribut de rigueur en convertissant sa peine en effort dans la Torah et les Mitsvot (Sanhédrin page 97).

L’attribut de miséricorde n’amende donc pas la peine de la Justice, mais il permet à l’homme de modifier son destin par un autre chemin que celui de la punition décrétée. C’est l’essence même de la Téchouva.

L’attribut de miséricorde se divise en treize comportements distincts visant à permettre le repentir au fauteur. Tous sont énoncés par le prophète Mikha au chapitre 7, 18-20 « Quel dieu t'égale [Eternel], toi qui pardonne les iniquités, qui fait grâce aux offenses commises par les débris de ton héritage ? Toi qui ne garde pas à jamais ta colère, parce que tu te complais dans la bienveillance ? Oui, tu nous reprendras en pitié, tu étoufferas nos iniquités, tu plongeras tous nos péchés dans les profondeurs de la mer. Tu témoigneras à Jacob la fidélité, à Abraham la bienveillance, que tu as jurées à nos pères dès les premiers âges ».

Tous les attributs divins sont réels et interagissent tous de concert - la bonté, la justice, la miséricorde -, nous devons nous en inspirer tant pour ressembler à notre Père que pour mieux le connaître. Puissions-nous toujours étudier la Torah dans le but de connaître son Auteur…