« Ah moi, si je ne sens pas quelque chose, je ne le fais pas. »« J’ai beaucoup d’instinct. » « Je ne suis pas colérique, c’est juste quand on m’énerve. » Ces phrases sont communes n’est-ce pas ? Vous les avez sûrement entendues des dizaines de fois. Mais quel est leur point commun ? Elles révèlent toutes une forme de soumission à ses émotions, une tendance à ne pas vouloir dépasser son état naturel et ses réactions innées. Pourtant, en tant que Juifs, notre mission est précisément d’aller au-delà du Néfech, notre dimension instinctive, presque animale. Mais comment y parvenir sans pour autant nier nos émotions ? Explorons cela ensemble...
Dans la vie, nous rencontrons des situations. Et, de prime abord, on n’est pas toujours satisfait, surtout quand elles viennent contrecarrer des plans déjà établis. Prenons un exemple : vous avez prévu une soirée tranquille avec votre mari. Mais voilà que votre fille de 12 ans débarque en pleurs, qu’au même moment, vous recevez un appel du professeur principal de votre fils lycéen, et que, cerise sur le gâteau, votre petite de 4 ans vient de mouiller son pyjama… Bref, la soirée avec votre mari s’annonce bien compromise. Face à cette situation pas des plus faciles (mais avouons-le, il y a pire, et on a tendance à se noyer dans un verre d’eau), deux choix s’offrent à vous : grogner ( comme 99 % des gens le feraient – et honnêtement, on ne peut pas vous en vouloir) ou se surpasser, en vous occupant de chacun de vos enfants.
Se surpasser, vraiment ? Mais comment ?
Tout d’abord, on accepte. Nous sommes croyants, donc on accepte qu’Hachem nous ait placés dans cette situation avec tous ses paramètres. Oui, c’est difficile, mais on en est capables. On se force à sourire et on agit. C’est comme quand Waze recalcule l’itinéraire : vous ne vous énervez pas contre lui parce que le chemin proposé est différent de celui auquel vous pensiez, car son seul objectif est de vous amener à destination. Eh bien, Hachem aussi veut nous faire avancer, nous apprendre à être plus patients, plus grands. Ou peut-être que ce “coup dur” est en fait un cadeau, une épreuve placée à la place d’une autre, bien pire. Faites confiance au Patron.
Vous allez me dire : Mais on ne peut jamais être naturelle ? Hurler un bon coup, pleurer, se défouler ? Nous n’avons jamais dit le contraire. Mais l’idée, c’est que vous ne soyez pas en pilote automatique. Dans la Torah, ce qui est permis l’est dans un cadre. Typiquement : on peut manger de la viande, mais après qu’elle ait été abattue rituellement et Cachérisée, on peut avoir des relations avec sa femme, mais dans le cadre du mariage et de la pureté familiale.
Eh bien, pour les émotions, c’est pareil.
Comme le dit le Roi Salomon : “Il y a un temps pour rire, un temps pour pleurer.” (Kohelet 3:4). Un endeuillé, par exemple, ne reste pas en deuil plus d’un an.
Donc oui, on peut exprimer ses émotions, mais dans une certaine mesure.
Avant de vous emporter contre votre belle-sœur qui vous horripile avec ses remarques sur votre rangement, dites-vous que ses critiques sont souvent le reflet de son propre mal-être. Apprenez à aller au-delà de votre envie de répondre, à ne pas prendre en compte ses critiques. Oui, ce n’est pas simple. Mais qu’est-ce que ça en vaut la peine !
Une immense récompense...
Dans Or’hot Tsadikim, Cha’ar Ha’anava, il est dit que se surpasser, c’est atteindre l’humilité.
Dans le Talmud – traité Roch Hachana 17a – , il est écrit cette phrase bien connue : “Celui qui se surpasse, on lui passe ses fautes.”
Cela veut dire qu’en allant au-delà de votre nature, en ne répondant pas aux attaques, humiliations, en n’envenimant pas des situations… Hachem prend en compte votre effort et se comporte avec vous de la même manière.
Prenons un exemple : vous subissez une humiliation en public. En pleine réunion, une collègue vous incendie parce que vous ne l’avez pas mise en copie (ooohhh, mais quel drame ! – eh oui, ça existe…). Deux choix s’offrent à vous : répliquer et remettre cette collègue à sa place ou se taire et ne pas entrer dans la confrontation.
Si vous choisissez le silence, cela fait du bruit dans les Cieux. Votre prière est entendue. C’est comme si vous aviez gagné un pass VIP auprès d’Hachem. Pourquoi ? Parce qu’Il voit que vous êtes de ceux qui recherchent le Chalom.
Et donc, forcément, votre conduite est agréée, même si, soyons honnêtes, vous n’aviez qu’une envie : lui dire ses quatre vérités. Se surpasser, ce n’est pas s’écraser. C’est choisir comment et quand réagir, avec intelligence et grandeur et c’est là, la clé de la sérénité. Il est d’ailleurs écrit dans Pirké Avot : “Qui est le plus fort ? Le héros ? Celui qui dépasse la nature, qui maîtrise et qui conquiert ses tendances naturelles.” (Pirké Avot, chapitre 4, Michna)





